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Des vignes, des terrasses, Dézaley ! (1)

Première partie: A Riex, on tourne à gauche!



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Evidemment, qu’il Lavaux bien, sa distinction au patrimoine mondial de l’UNESCO !
Dézaley, Calamin, Epesses, vertigineux coteaux, routes étroites, obligeant à serrer à droite, tandis qu’à Riex, on tourne à gauche. Le Lavaux, canton de Vaud, vignoble dévôt, fût supputé grand terroir par l’évêque de Lausanne, bourguignon et cistercien dans l’âme. Qui a vu dans les terrasses et les allées du Dézaley un Grand Cru du Léman. Chaussé aux moines, façonné par l’homme, récupéré par le Vaudois révolté, toujours debout, ce fabuleux lopin de terre, suspendu entre ciel et lac, est le paradis du Chasselas, ce cépage galvaudé, emblématique du vignoble helvétique, et, aujourd'hui, décrié. Un sol extrêmement pentu, très pauvre, fait de moraines glaciaires et de poudingues, qui oblige la vigne à plonger dans les entrailles du coteau pour y puiser sa richesse.  Un climat si particulier, régulé par Eole, qui emmagasine la chaleur la journée, du fait de son exposition plein Sud et de la réverbération du lac, avant de se tempérer la nuit sous l’action de la bise du Dézaley, entraînant un flux d’air froid nocturne qui ralentit la maturation du raisin. Au Dézaley, les premiers sont les derniers ! Mûrs avant les autres, les raisins sont pourtant coupés bien après ceux des appellations voisines. Cette maturation lente sur un terroir propice apporte toute leur complexité et leur richesse aux vins de l’appellation, ainsi que leur grande aptitude au vieillissement.

Pour gagner le Petit Versailles de Cully, fief des Frères Dubois, vignerons-encaveurs de l’appellation Dézaley, on tourne à droite, sauf à Riex où, comme je l'ai déjà dit, on tourne à gauche. A l’initiative de Laurent Probst, alias Valais_006, une poignée de fondus s'est retrouvée en compagnie de Christian Dubois et sous la bise du Dézaley pour tenter de juger des capacités de vieillissement du Chasselas sur ses terres de prédilection.
Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, Louis XIV n’est jamais venu en villégiature sur les bords du Léman. L’origine du nom du domaine, Petit Versailles, situé sur des anciens jardins potagers, provient d'une déformation de « versage », opération qui consistait à  « verser » la terre  lors du bêchage. A cet endroit, désormais, le raisin a définitivement supplanté le légume, roi-soleil inclus.

 

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Dans les pentes du Dézaley, c’est parfois le Grand Huit, pour acheminer la vendange ou travailler la vigne. Les téléphériques et les petites bennes facilitent la tâche aux vignerons. Pas d’arrosage, comme en Valais. Même si le sol est pauvre, on veut favoriser l’ancrage en profondeur des racines, au travers des failles présentes dans la moraine ou le poudingue, et non pas les inciter à remonter à la surface. Et pendant ce temps-là, à Riex, on tourne définitivement à gauche !

 

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Riex, soleil et gaîté, village du vignoble, réputé pour tourner à gauche depuis qu’un de ses illustres vignerons, conseiller aux Etats et dénommé Fauquex, ayant reçu à la cave un général et son chauffeur, a changé la tradition pour ne pas faire d'entorse à la bienséance. Partout ailleurs dans le Lavaux, le verre tourne à droite, dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, lors des dégustations en cave (je dis bien LE verre, car on ne descendait à l’époque dans la cave avec un seul et unique verre, qui servait à tout le monde, et pas uniquement pour boire en Suisse!). Plus à Riex depuis que Monsieur Fauquex l'a décrété  et qu'il a imposé ce geste comme une tradition du village.

 

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Chez Ghislaine Magnin, au Café de Riex, on tourne aussi à gauche, quand on sert à boire, même si chacun a son propre verre. Les bougeoirs portent des étiquettes prestigieuses de Grands crus classés bordelais ou de Grands crus bourguignons, la carte des vins du Café étant l’une des prestigieuses et époustouflantes du canton, voire au-delà, grâce à P’tit Louis, importateur et distributeur de vins hors norme. Cuisine traditionnelle, de maison bourgeoise, simple mais bonne, on se croirait à la maison quand on était petit. Dans l’assiette ce jour-là, quasi de veau en rôti, avec sa purée et le petit puits pour y déposer le jus. Dans le verre, sur commande spéciale, un avant-goût du programme de l’après-midi:

Imgp4242 Dézaley 1997 rouge, Clos des Abbayes : 95% de Chasselas sur les coteaux du Dézaley, mais aussi un peu de Gamay, Merlot et Cabernet franc. Que l’on retrouve dans cet assemblage rouge, majoritairement Gamay, à la robe tuilée et aux tanins lisses, souples et fondus. Encore du fruit, façon bonbon Sugus, et puis des notes d’humus et de sous-bois.  Encore du peps, de la vivacité et de la fraîcheur, malgré une finale à peine courte.Imgp4243

Dézaley 1989, Duboux : le premier nez est très légèrement réductif, s’ouvrant rapidement dans le verre sur des notes d’orange confite. La bouche est large et onctueuse, avec de la puissance et une perception alcooleuse en finale.

Imgp4245 Dézaley 1985, Médinette, Bovard : une cuvée classique et réputée, à l’étiquette délicieusement vieillotte, issue d’un assemblage des deux terroirs, molasse et poudingue. Le nez, c’est celui d’un beau vin blanc évolué, empyreumatique, sur le moka et la crème brûlée. Fin, élégant, fondu, équilibré, harmonieux, il possède la plénitude et la séduction des grands vins.

Dézaley 1986, Chemin de Fer, J.F. et Luc Massy : issu du seul poudingue, ce vin affiche une robe bienImgp4246 dorée. Le nez embaume le caramel, le cake aux raisins, la vieille cire et, serait-ce de l’auto-suggestion, le pudding anglais. Le charme opère, même si l’on peut regretter un manque de longueur certain. Le corps est à la peine, légèrement oxydé, probablement du fait du millésime, mais il y a de beaux restes.

Imgp4247 Dézaley 1983, Clos des Abbayes :  une grande année que ce millésime 83, équilibré, riche et généreux, et un grand domaine, celui de la ville de Lausanne, qui constitue une entité unique au cœur du vignoble. Le « vin de la vérité » pour les autres vignerons, supposé le mieux représenter la qualité de l’appellation et du millésime. Au nez, une petite note champignonneuse fugace laisse la place à d’intenses arômes de cire et de miel. La structure en bouche est impeccable, quasiment parfaite, onctueuse et fondue, riche, ensoleillée, possédant encore beaucoup de tension et d’acidité. Le point culminant de cette petite série à table, confirmant le statut du Dézaley comme vin de gastronomie.

Quand on sort du Café de Riex, on continue de tourner, mais finalement, peu importe le sens!

 

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(à suivre)

Olif

Commentaires

  • J'en ai le tourniquet, Olif, mais j'aurais bien voulu t'accompagner dans ce périple à travers des paysages si formidables.

    Tu sais, que j'adore les terrasses (et pas tellement ceux des cafés)!

  • Si pour certains boire est un vice le tourne à gauche en est l'outil : la logique est respectée.

  • Ces vignerons à Dézaley sont vraiment intrepides !

  • voila qui ma rapelle un vieux marin prussien... qui disait sur son frel esquif :" harch ! vous benzez pas comme ça vous zalez nous faire dezaley"......ok je sors, ya pô d'marins par ici !!!!

  • On a beau être prévenu. C'est toujours tellement impressionnant et agréable de te lire Olivier.

    Ton écriture est fluide, naturelle, riante, en un mot heureuse, comme l'homme, cela ne fait pas un pli!

    Quand on pense que des grincheux restent persuadés qu'un diplôme de journaliste (spécialisé) est requis pour parler du vin, et de sa passion oenophilique.

    Chapeau bas!

    Laurent,
    alias Valais_006 ou Vaud_006, je ne sais plus ...



  • Décidément, ce sont bien les coteaux du vertige, le Dézaley!... Un regret : ne pas y être z'aley, si ce n'est l'été!

  • Olif, le Audiard de la blogosphère!.. ;-)

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