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macle - Page 2

  • Château Chalon, en blanc et Jaune au Domaine Macle!


    Premier volet d’un triptyque jurassien, un véritable brelan d’as, dont le troisième sera sorti de la Manche, ce périple hivernal du GJP débute par une visite au Domaine Jean Macle et sera l’occasion d’une dégustation d’anthologie en compagnie de Laurent et Béatrice Macle, après des retrouvailles avec Saint-Vernier, le célèbre jardinier de Saint-Vincent, aucun des deux n'étant le Saint de l'exactitude horaire, comprenne qui pourra.

    Mardi 20 décembre 2005, l’hiver a pris ses quartiers sur le Jura. Dans le Haut Doubs, le froid polaire anticyclonique s’est installé sur une bonne couche de neige, augurant bien du début de la saison nordique et alpine. Le soleil encore rasant ne parvient pas à réchauffer quoi que ce soit, mais il a au moins le mérite d’être présent. Au fur et à mesure que l’on quitte les hauts plateaux, la brouillasse se fait plus dense. La neige se raréfie tout en ne disparaissant pas complètement, le froid se fait moins vif mais devient plus humide. Le soleil ne se lèvera pas de la journée à flanc de coteau. La formidable luminosité du haut se fait grisaille, ne permettant pas la réalisation des photos espérées. L’abbatiale de Château Chalon prend des allures fantomatiques dans la brume et c’est tout le village, perché sur son piton rocheux, qui donne l’impression d’être revenu plusieurs siècles en arrière. On pourrait presque entendre les gens de Philibert de Chalon sonner le tocsin! Les loups pourraient être aux portes du village. Cessez de rire, charmante Elvire...!
    Une fine pellicule de neige recouvre les champs, les vignes et les toits des maisons. Château Chalon en blanc et Jaune!

     

     

    « Je suis le seigneur du Château! »

    Telle pourrait être la devise du domaine Macle, tant les vins qui y sont produits ont de la race, en blanc comme en jaune. C’est ce que nous apprendra cette dégustation, mais pas seulement! Château Chalon, plus qu’un type de vin, le Jaune, c’est un terroir, un Cru, pour lequel on voit Grand, même si pour l’instant, rien n’est officiellement concrétisé dans la hiérarchisation. Un vin de Château Chalon, plus qu’un vin jaune, est avant tout un vin de Château Chalon. Un brin de chauvinisme de bon aloi tant il est défendu avec ardeur, mérite et conviction!

    Petite mise en bouche avec un Crémant rosé 2002, 100% Poulsard. La robe est magnifique, rosée soutenu, tirant sur la brique orangée. Le nez est typiquement Poulsard et surprend sur un crémant. Ça renarde légèrement avant de laisser parler le fruit. Vineux et puissant, à la bulle vive mais légèrement rustique, il est légèrement dosé et le sucre vient arrondir la finale. Un Crémant qui a de la personnalité, même s’il peut dérouter. Sympathique!

    Direction la cave! « Dévisse la guillette et le bon vin cherra! » La guillette! Ce petit robinet situé à mi-fût, que les Arboisiens appellent le « dzi » remplace ici la pipette. Du moment que le verre se remplit!

     


    Le prélèvement du vin à la guillette, un geste
    qui demande précision … et équilibre!

     

    Chardonnay 2004 ouillé
    Une grande première au domaine, passé maître dans l’art de l’oxydation ménagée, un test qui démangeait Laurent, s’essayer à l’ouillage! Un nez qui divise un peu, que Le Seb sent déjà pétroler, mais que je trouve plutôt légèrement marqué par le bois (fût de deux vins en provenance de Meursault). Riche, non dénué de minéralité, il possède de l’acidité et de la droiture. Un vin à suivre avec intérêt!

    Chardonnay 2004 semi-ouillé
    Ouillé pendant 6 mois, dans un fût plus ancien du domaine, ce vin a été rattrapé par son passé! Deux centimètres d’air en trop, et voilà qu’un voile s’est formé, coupant court à l’expérience! Sur la pomme, le calva, le marc et le macvin, un vin riche et large, sans caractère oxydatif véritablement marqué, mais légèrement alcooleux. Le nez du fond de verre est intéressant, finement épicé. Comme il ne fait pas bon contrarier la nature, ce fût poursuit son petit bonhomme de chemin au gré de ses envies.

    Chardonnay 2004 (sous voile)

    Le chardonnay traditionnel du domaine, au nez plus franchement oxydatif mais d’une grande finesse et d’une complexité déjà marquée: pomme, épices, petite pointe de réglisse, massepain, pâte d‘amandes. Bouche droite, presque tranchante, rectiligne, s’élargissant en finale sur une superbe trame acide. Jolie rétro sur le massepain.

    Chardonnay 2003
    Prélevé sur un premier fût, il présente des notes légèrement oxydées, moins fines qu’habituellement, moins ménagées. Un vin riche, ample et puissant, que nous goûterons sur un deuxième fût, quasiment madérisé. Le nez est alors plutôt « rentre-dedans », démonstratif, et rapidement le vin fatigue, manquant de longueur.

    Côtes du Jura 2003

    85% du chardonnay précédent (mais pas en provenance de ces fûts-là!) associés à 15% de savagnin, qui apportent une acidité et une nervosité bienvenues dans un millésime comme 2003. Ouvert et épanoui, peut-être un peu trop riche en attaque, l’équilibre est globalement satisfaisant, ce qu’on peut presque espérer de mieux cette année-là!

    Côtes du Jura 2000
    Goûté sur deux exemplaires différents, explications à suivre.
    - Le premier verre arbore une robe jaune, légèrement voilée. Le nez est déroutant, moka, céleri, légèrement pétrolant. La bouche pourrait être qualifiée de légèrement déstructurée, avec une finale abrupte, et un petit déficit de longueur. Il s’agit d’une cuvée non filtrée stérile, sans couverture de SO2 à la mise, qui a eu un problème de levures. Le lot a été en grande partie retiré de la vente et les bouteilles commercialisées sont pour la plupart revenues à la propriété.

    - Le deuxième verre offre une robe jaune brillante, éclatante, cristalline, à reflets or. Le nez est d’abord pharmaceutique, bétadiné, reniflant la pommade antibiotique, avant de devenir acidulé et épicé. La bouche est remarquablement constituée, longue, équilibrée, avec une jolie rétro sur les brisures de noix. Il s’agit de la nouvelle version du vin précédent, filtré stérile et ré embouteillé sous couvert de SO2. Plus conforme aux attentes, dira t’on, même si personnellement je préfère le nez moins discipliné du précédent. La bouche est quant à elle irréprochable!

    Côtes du Jura 1996
    Un des vins favoris de Laurent Macle et qu’il n’avait pas regoûté depuis quelque temps, dans un millésime passablement critiqué ces derniers temps, d'une manière générale. Le nez rappelle celui du Château Chalon du même millésime, malté, sur le froment, l’orge. La bouche est bien en place, impeccable, racée, élégante, louchant également du côté du grand frère. Un bien beau vin!

    Pause casse-croûte, copieuse et arrosée de Trousseau et Poulsard produits en infime quantité pour la consommation personnelle de la famille Macle. Eh! bien, tant pis pour ceux qui n’auront jamais la chance d’y goûter! Car si le secteur de Château Chalon n’est pas réputé être une terre à rouge, le Trousseau réussit bien à Laurent! Et Laurent réussit plutôt bien son Trousseau!

    La deuxième partie de la séance fut effectuée à un rythme plus soutenu, car nous étions attendus à Pupillin. Impossible de la bâcler, pourtant, tant elle fut passionnante, un moment rare et unique qui nous a été offert là! Une verticale de savagnin sur onze millésimes! Inutile de dire que nous sommes arrivés très en retard à notre deuxième rendez-vous!

    Il s’agit d’échantillons de savagnin destinés à élaborer la cuvée de Château Chalon, les sept premiers ayant été tirés du fût à la guillette, car évidemment non embouteillés.

    Savagnin 2005
    La robe trouble encore, et c’est bien normal. Un véritable jus de pamplemousse pressé, avec l’amertume qu’il faut et encore du sucre. Une matière de grande qualité!

    Savagnin 2004
    La robe s’éclaircit, brille, le voile se dévoile et de fines notes oxydatives apparaissent, un rien maltées. L’acidité est bien mordante. Le taux d’éthanal est à 262 mg/l.

    Savagnin 2003
    Large, ample, riche et puissant, il termine un peu alcooleux, reflétant les caractéristiques de son millésime. 300 mg/l d’éthanal.

    Savagnin 2002
    Bien fruité, sur les agrumes, le pamplemousse, les fruits exotiques, il possède une bouche acide mais équilibrée. Le vin se met en place, l’aromatique du savagnin sur la fraîcheur est bel et bien là. 423 mg/l d’éthanal.

    Savagnin 2001
    Un millésime qui ne sera évidemment pas revendiqué en appellation Château Chalon, puisque déclassé. Et pourtant! Très typé jaune, sur la noix, avec de l’alcool et un côté acétone que l’on retrouve plus fréquemment du côté d’Arbois. Ça « claque », c’est puissant! Un « Jaune » presque déjà fait, au bout de 4 ans, et qui sera assemblé à du Chardonnay. « Jaune, mais pas Château » , pour Béatrice Macle, qui n’en démord pas! Elle a un peu raison, même si Saint-Vernier voudrait lui démontrer que dans la terminologie, elle a tort! 600 mg/l d’éthanal.

    Savagnin 2000

    Plus d’éthanal que le précédent*, mais (paradoxalement?) plus de finesse. Très minéral, construit autour d’une grande acidité directrice, il est néanmoins déjà complaisant, s’arrondit en finale et donne le sentiment d’être déjà presque trop facile à boire. 685 mg/l d’éthanal.

    Savagnin 1999
    Un vin bientôt embouteillé (et commercialisé, à partir de la Percée 2006), qui pourra peut-être revendiquer le titre de « Seigneur du Château »! Muscade, poivre, amande, une définition déjà bien précise de ce que donnera un futur grand CC! De la majesté, de la droiture, de la prestance, de la persistance! 580 mg/l d’éthanal.

    Château Chalon 1998
    L’archétype d’un grand CC, cela se confirme au fil des dégustations. Toujours autant de finesse, et quelle longueur! 400 mg/l d’éthanal.

    Château Chalon 1997

    Une plutôt belle réussite  dans ce millésime. Epicé et poivré, noix également, il développe des notes très matures et possède beaucoup de puissance. 450 mg/l d’éthanal.

    Château Chalon 1986
    Des retrouvailles, et toujours avec le même plaisir. Moka, pétrole, orange confite. De la douceur, de la finesse, de l’harmonie…Fondu enchaîné…

    Château Chalon 1978
    La robe dore de belle façon. Nez complexe et fin, envoûtant sur la fève de Tonka, la praline. L’acidité naturelle du savagnin magistralement domptée par les ans, apporte au vin sa structure mais se fait discrète dans son expression, totalement fondue.

    L’exceptionnelle longueur des vins dégustés nous permettra de patienter, des arômes plein les papilles, jusqu’à la prochaine étape de notre périple jurassien, direction Pupillin, chez Emmanuel Houillon.

    La journée ne fait que commencer…

    Olif

    *Le taux d’éthanal augmente tout au long de l’élevage, mais ne varie plus une fois le vin en bouteille.

     

  • Fin de vendanges à Château Chalon

    Date: le 21/10/2004 à 14:15

    Mardi 19 octobre. Jour de pluie. Les vendanges ne sont pas encore tout à  fait terminées au domaine Jean Macle. Il reste à  couper les savagnins que l'on préfère ramasser ici à  maturité optimale, quitte à  perdre un peu en degré. La veille, le temps a été clément et les raisins ont été rentrés à  12,2° naturels. Plutôt pas mal! Aujourd'hui, c'est plutôt 11,5°! Mais les grains sont relativement sains! Et plus mûrs que ceux qui ont été ramassés les semaines précédentes.

    Château Chalon, petite cité comtoise de caractère, son abbatiale, ses vieilles maisons en vieille pierre et ses rues étroites! Pas de chai ultra-moderne ici, il faut s'adapter à  la configuration des lieux pour travailler. Les raisins arrivent dans des grosses bennes cylindriques vertes qui sont hissées par un palan jusqu'à  l'égrappoir.
    La vendange est égrappée parce que la rafle apporte pas mal d'acidité et que le savagnin n'en manque déjà  pas. Les grains, même mouillés, sont bien fruités et sucrés.

     

    Une fois égrappés, ils se déversent dans le pressoir, situé en hauteur, et le jus s'écoule dans les cuves par gravité. Deux pressoirs sont en service, dont un pneumatique, qui donne un jus beaucoup plus clair. Le vieux pressoir sera bientôt remplacé par un deuxième pneumatique.
    Le vin doux de savagnin (le jus de raisin, en fait) est bien agréable à  boire mais révèle déjà  toute l'acidité du raisin.


     

    Une fois les grains pressés, les peaux des raisins, complètement desséchées, sont tassées dans des grands bacs et seront distillées pour produire de l'eau de vie de marc de Franche-Comté, consommée de façon de plus en plus rare, mais qui servira à  élaborer le célèbre Macvin.

     

    Stade ultime de la vinification, voilà  ce que donne le savagnin une fois mis en bouteilles. Un régal pour les papilles.

     

    Côtes du Jura 2002
    Assemblé pour la première fois en fût à  la récolte, il comporte 20% de savagnin au lieu des 15% habituels. Encore jeune (mise récente), il affiche un certain degré de verdeur, mais la structure et la longueur sont là ! A attendre!

    Château Chalon 1997
    Puissant, sur la noix marquée, il évoque les jaunes d'Arbois, mais il ne comporte en fait que 330mg/l d'éthanal. Long et immense, une grande bouteille pour dans pas mal d'années.

    Château Chalon 1995
    Chanceux que je suis, je peux profiter de fonds de bouteilles ouvertes pour les vendangeurs et dégustées en accompagnement du fromage. A chaque repas, on remonte les millésimes. Le fond de ce 95 est superbement ouvert, sur le curry, les amandes, le massepain et les épices. Tout en finesse, mais avec une longueur interminable!

    Château Chalon 1992
    4éme rencontre avec ce 92 cette année, il est toujours aussi minéral, pétrolant allègrement, mais pas autant que la cuve de fuel du grand-père du Seb! Agréablement fondu, il est prêt à  boire!

    Château Chalon 1986
    La bouteille du repas du lendemain, que Jean Macle venait d'ouvrir! Je la teste avec grand plaisir, surtout que le vin est déjà magnifique! S'ouvrant sur le moka et le café, les notes évoluent rapidement vers une minéralité légèrement pétrolante. La grandeur d'un beau Château Chalon à  maturité!

     

    Aujourd'hui jeudi 21 octobre. La pluie s'est arrêtée, un petit vent chaud soufflait ce matin et le soleil commence à  pointer le bout de son nez. Petite pensée pour les vendangeurs du domaine Macle, parmi les derniers à  couper, et qui doivent se trouver à  l'heure actuelle dans les terrasses du Puits Saint-Pierre, un des plus beaux terroirs de Château Chalon. En principe, ce soir, tout sera bouclé!

    2004 ne s'annonce pas comme un millésime exceptionnel, probablement proche de 1992 dans l'esprit: année abondante mais raisins récoltés avec un degré limite. Le soin apporté à  la récolte au domaine Jean Macle devrait pourtant donner des choses fort intéressantes.

    Olif

  • Domaine J. Macle, au sommet du rocher de Château Chalon !

    Date: le 28/04/2004 à 22:58

    Il serait temps de lever un coin du voile qui recouvre cette prestigieuse appellation jurassienne. Et quoi de mieux que de le faire en compagnie de Laurent Macle par une magnifique journée printanière ? En route pour un petit tour de l'appellation, du domaine et de ses vins !

    L'appellation Château Chalon

    Un premier arrêt au belvédère du magnifique village de Château Chalon, l'un des plus beaux de France, sans chauvinisme aucun, permet d'embrasser le vignoble de façon globale, d'un seul coup d'oeil. Celui-ci décrit un arc de cercle d'environ 300° à la base du piton rocheux. L'appellation Château Chalon s'étend quant à elle sur uniquement 4 communes : Château Chalon, Ménétru-le-vignoble, Domblans et Nevy-sur-Seille.

    A Château Chalon le nom, à  Ménétru le cru !


    Le vignoble, côté Ménétru

     

    Dicton local qui signifie que la plus grande partie de l'appellation se situe sur la commune de Ménétru. Ménétru, c'est sympa comme nom, mais ça sonne moins bien que Château Chalon, quand même!
    Seuls 60 ha sont actuellement plantés sur les 90 possibles, mais il y a fort à parier que les trous seront colmatés avant peu, le rythme des nouvelles plantations s'accélérant.
    Les parcelles sont bien délimitées et les lieux-dits cadastrés de façon précise, même si rarement revendiqués sur l'étiquette. Quelques noms des plus célèbres, ou qui mériteraient en tout cas de le devenir : Les vignes aux Dames, le Puits Saint-Pierre, En Baumont. Les vignes sont toutes en coteaux, parfois très pentus, jusqu'à 45° de déclivité, obligeant parfois au façonnage de terrasses, notamment au Puits Saint-Pierre, à l'apic du piton rocheux, sous l'Abbatiale du village.


    A l'ombre du rocher, le Puits-Saint-Pierre

    La spécificité de l'appellation Château Chalon provient de son terroir, constitué de marnes bleutées du Lias, propices à la culture et à la bonne maturation du savagnin. L'orientation particulière des coteaux, associée à leur grande déclivité, ainsi qu'à leur disposition autour du rocher, favorise la création d'un microclimat spécifique.
    Suite au remembrement de 1977, les vignerons ont eux-mêmes effectué d'importants travaux de canalisation des eaux et de voirie, réalisant des chemins en béton qui sillonnent les différentes parcelles. Auparavant, il fallait parfois traverser la vigne du voisin pour se rendre dans la sienne !

    La mention Château Chalon sur le clavelin, ça se mérite ! Sous l'égide du Syndicat des Producteurs de Château Chalon créé en 1933, des règles très strictes ont été élaborées pour la production du dit cru. Une commission, constituée en 1952, visite chaque parcelle avant la vendange pour y constater la présence exclusive de savagnin et procéder à divers prélèvements de moûts. Elle donne ainsi le ban des Vendanges lorsque toutes les conditions sont réunies et octroie le bénéfice de l'appellation si le degré minimum requis (12°) est atteint. C'est la raison pour laquelle le déclassement complet d'une récolte peut être décidé avant même la vendange, ce qui s'est produit en 2001 notamment. Si par la suite, en cours d'élevage, la prise de voile permet l'élaboration d'un vin jaune, celui-ci pourra être commercialisé sous l'appellation Côtes du Jura. Ce repli ne sera peut-être plus possible très prochainement et tout le monde procédera alors comme au domaine Macle, à savoir ne pas produire de vin jaune les années indignes du Château Chalon. Et comme si les conditions n'étaient pas encore assez drastiques, une dégustation d'agrément a lieu juste avant la mise pour confirmer le label.

    Du savagnin au vin jaune


    Les vignes

     

    Auparavant récolté à la mi-octobre, au moment des premières gelées (la " gelée de savagnin "), il peut dorénavant, grâce à une " amélioration " variétale, être vendangé plus précocement. Il est néanmoins préférable d'attendre une maturité optimale, comme au domaine Macle, où les vendanges se font fréquemment 15 bons jours après tout le monde !
    Grande maturité, en ce qui concerne les vins de Jean Macle donc, et élevage en cave fraîche qui limite la transformation de l'éthanol en éthanal et concentre la minéralité. Ainsi, les vins du domaine n'affichent des taux d'éthanal que de 300 à 400 mg/l. D'un point de vue aromatique, c'est l'éthanal qui va être responsable des notes de noix fraîche que l'on retrouve dans le fameux goût de jaune. Son taux ne variera plus une fois la mise en bouteilles. Seul évoluera le taux de sotolon, un lactone qui apparaît en cours d'élevage, à l'origine des flaveurs de noix mûre et de curry, et que l'on retrouve dans tous les vins oxydatifs à des concentrations variables. La typicité du jaune, c'est en fait un subtil équilibre éthanal-sotolon.
    Pour ne pas fragiliser le voile mais goûter de façon régulière les vins en cours d'élevage, le domaine Macle équipe tous ses fûts de " guillette ", encore appelée " dzi " en Arbois. Il s'agit d'un petit robinet que l'on visse dans le fût juste en dessous de la limite supposée de la vidange au terme de l'élevage. Dévisser une guillette sans faire de catastrophe, c'est tout un art ! Si l'on laisse tomber le petit robinet, il n'y a plus qu'à colmater avec le doigt et appeler au secours ! Ce que nous n'aurons nul besoin de faire au cours de la superbe dégustation qui va suivre.

    Domaine Jean Macle, la dégustation

    Côtes du Jura 2001, embouteillé depuis 1 mois

    Nez de fruits mûrs, pomme séchée. Longue finale sur la cire d'abeille, la noix fraîche et les épices. Beaucoup de classe et d'élégance et ce côté surmaturé sec pour lequel je craque complètement.

    Côtes du Jura 2001, embouteillé depuis 1 jour

    Il y a donc plusieurs mises, ceci pour des raisons pratiques. Celle-ci s'effectue même sur une année, au fil des besoins, un peu à la manière des vins de Champagne que l'on dégorge au fur et à mesure. Pas tout à fait le même, pas tout à fait différent non plus. Le vin a subi une légère filtration. Le nez est plus fin, sur les épices douces et la morille. Moins confit que le précédent, encore chahuté par la mise, la longueur n'en est pas moins impressionnante avec une rétro sur la noix fraîche.

    Côtes du Jura 2000

    Nez plutôt fin et racé, sur des notes de massepain, de pâte d'amande. Grande structure minérale, avec une acidité encore prononcée en finale. A attendre, bien sûr.

     

    Côtes du Jura 2002, échantillon prélevé sur fût

    Pour la première fois, déjà assemblé en fût, dans la proportion habituelle de 15% de savagnin. Nez tout en finesse également, sur le réglisse, le bonbon Batna. A peine d'alcool encore. Dans le style du 2001, au stade d'ébauche.

    Côtes du Jura 1996

    Nez sur la pomme, le calva. Grande structure minérale et acide avec une longueur imposante. Mais la structure est calibrée impeccable, s'élargissant crescendo jusque dans la finale.

    Savagnin 2000, échantillon prélevé sur fût

    Déjà 4 ans de fût et destiné à l'assemblage du Côtes du Jura, en provenance d'une parcelle exposée Nord-Ouest, à flanc de coteau sous le village, qui n'est pas en appellation Château Chalon. Le nez est puissant, il s'affine à l'aération. La structure est très minérale, argileuse, compacte (évoquant à Laurent Macle les « mortiers », blocs de terre et d'argile mêlés que l'on retrouve ici après le labour) et finit avec un peu de lourdeur, affirmant son caractère bien trempé.

    Château Chalon 1997

    Nez fruité, légèrement agrume, poivré, épicé. Le côté éthéré (alcool à polycopieuse!), s'il est présent, se fond dans une structure déjà arrondie, d'une légèreté féminine. Une grande finesse dans un jaune, ce qui n'exclut pas la longueur. 420 mg/l d'éthanal.

    Château Chalon 1996

    Le nez n'est pas très puissant, plutôt original sur des notes d'orge malté, de scotch blend! La structure est d'une grande pureté, ample et progressive, fine et puissante à la fois. Pas du tout marqué par la noix, c'est un vin d'une grande élégance qui ne demande qu'à se fondre dans le temps.

    Château Chalon 1992

    Une année plutôt abondante et pas un très grand millésime. Le nez est puissant, me semblant empyreumatique de prime, mais lorsque l'on hume profondément le verre, pas de doute, il pétrole! Le Seb se revoit même le nez au-dessus de la cuve de fioul de son grand-père! Une minéralité très, trop affirmée, que l'on retrouve de façon non exceptionnelle dans les jaunes, mais le vin tient la distance pour finir sur un peu d'amertume et des notes mentholées. Surprenant mais rédhibitoire pour Le Seb!

    Château Chalon 1997, cuvée 707

    Un échantillon prélevé sur une pièce avant l'assemblage final. Cette cuvée affichait de façon un peu inexpliquée 707 mg/l d'éthanal. Le nez est totalement différent, sur la noix fraîche, très éthéré, se rapprochant d'un vin jaune classique. Puissant et masculin, viril même, une expression plutôt arboisienne du jaune, que Laurent Macle aimerait pouvoir développer un peu de temps en temps, même si l'on est dans un style totalement inhabituel pour le domaine.

    Château Chalon 1990

    400 mg d'éthanal, 14° d'alcool. L'entame se fait sur des notes légèrement pétrolifères, minérales, puis le bouquet s'ouvre sur des notes d'épices. Tout en finesse, il se livre pleinement dans la grande finale où les caudalies resplendissent.

    Trousseau 2003

    La cuvée du patron, car non commercialisée. Robe rubis clair, groseille. Un fruité gourmand et charmeur, confituré et épicé, un vin de belle soif, pour saucissonner en bonne compagnie.

    Macvin

    Si le marc s'impose encore au nez, la bouche fait preuve d'une jolie harmonie et d'un bel équilibre qui en font une gourmandise rafraîchissante portée par une belle structure acide.

    Macvin au fût

    Il s'agit de la récolte 2003, qui ne sera pas millésimée, comme à l'habitude sauf exception. Encore dissocié, avec plein de sucres, on sent qu'il a été muté avec un beau marc. Prometteur!

    Une gamme très homogène, où la finesse s'impose souvent sur la puissance, tant en Côtes du Jura qu'en Château Chalon, ce qui n'exclut pas la grandeur, bien au contraire. Un domaine incontournable pour qui veut faire ses gammes en Jura et approcher ainsi l'élevage traditionnel, à des lieues de l'image caricaturale que certains en ont.

    Aaah! Château Chalon!

    Olif