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  • 14 contours de syrah au creux du Van

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    Couvet, commune Val de Travers. Son hôpital, sa piscine et son ancienne tricoterie Dubied, transformée en chai du domaine de la Clavenière, tronche de Travers du vignoble Neuchâtelois. Depuis la fusion administrative, toutes les communes du Val de Travers, canton de Neuchâtel, s'appellent Val de Travers. Sauf deux, Les Verrières et La Côte aux Fées, qui continuent de voler de leurs propres ailes exécutives. Le 11 juillet 2013, 19 heures, plusieurs berlines arrivent à la Clavenière, en roulant au pas, tous feux éteints. Normal, il fait encore jour. Des individus s'en extirpent lestement et se dirigent, la mine patibulaire, vers le rez-de-chaussée du bâtiment. Normal, ils ont rendez-vous à la cave pour une dégustation à la gloire d'un des plus grands cépages rhodaniens. 14 syrahs du Valais, en 3 shots, sur 3 millésimes différents, avec pour dénominateur commun, un des maîtres à penser de nombre de vignerons et/ou œnologues helvètes.

     

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    Noiraigue, commune Val de Travers. Son Creux du Van et son gaz de schiste dont il serait temps de ne pas vouloir. Noiraigue, c'est l'un des sites jurassiens ayant reçu une autorisation de forage, avec Pontarlier et Les Moussières, côté français. Les Moussières, en plein cœur du Parc Naturel du Haut-Jura. On se demande à quoi ça sert d'être un haut-lieu naturel soit-disant protégé! Du côté de Neuchâtel, la résistance commence à s'organiser. Parce que venir polluer l'Areuse et l'absinthe pour émettre des gaz aussi délétères pour l'environnement qu'un mauvais pet foireux dans une atmosphère confinée, non merci!

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    Le 12 juillet à 10 heures, soit très précisément le lendemain du 11 juillet, plusieurs berlines se garent devant la caserne des pompiers de Noiraigue. Des individus s'en extirpent péniblement, pas tous très frais. Pour bien profiter du plus beau cirque jurassien du monde, où van (la falaise, en celtique) et vent (le vent, en français basique, voire même en romand de Suisse voisine) se mêlent, s'entremêlent et se confondent, il vaut mieux en faire le tour. Ce qui nécessite un moindre effort, que la plupart des automobilistes purs et durs n'auront jamais le bonheur de connaître, eux qui préfèrent la montée motorisée par la route jusqu'à la ferme du Soliat pour se repaître d'une bonne grosse fondue apte à combler leur petit creux, avant de jeter un œil morne et un rot fromager sur le Creux, sans avoir à fondre en grimpant le sentier dans la chaleur torride d'un été jurassien plutôt réussi. Montée dans le sens anti-horaire, via la ferme des Œillons et le sentier des 14 contours, descente par la ferme Robert et le sentier pentu du Single, où l'on ne se sent étrangement pas seul à avoir une âme de primate, tel est le menu habituel du randonneur du Creux du Van, sans se vanter.

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    14, oui, le chiffre est exact, compté, recompté, vérifié, par une foultitude de randonneurs. 14, oui, le chiffre est inexact, puisque compté, recompté, vérifié, par une poignée de dégustateurs. Il y eut finalement 15 syrahs, servies à l'aveugle en 4 flys de 5+5+4+1. 2010, 2005 et 2003. +1. Pièges et/ou pirates non exclus. Vins transvasés dans une bouteille anonyme depuis leur bouteille d'origine. Et c'est parti pour 14 contours de syrah, en quête d'un mythe mais aussi du simple plaisir de déguster, d'échanger, de commenter, de partager, une fois les dernières petites modalités du débriefing mises au point, non sans mal, d'ailleurs.

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    Mise en bouche: la montée est rude, jusqu'à la ferme des Œillons, au départ de Noiraigue. Dans le gourdon, mieux vaut un vin désaltérant et aérien, avec deux ailes. Par exemple, un Chasselas Le Brez 2012 de la Colombe, à la gloire de Raymond Paccot, chantre de la biodynamie et de la sélection parcellaire sur la Côte vaudoise.

     

     

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    1er contour: ça attaque fort, dès le franchissement des Œillons et la montée dans la forêt. Du gros calibre pour une syrah plutôt consensuelle qui ne le fut pas. Boisée, certes, mais d'un bois fin et élégant qui ne m'a pas gêné plus que cela, tant les tanins furent veloutés et frais, avant de se fondre dans une finale très syrah, d'une grande longueur et d'une exquise fraîcheur. Syrah 2010, Cave des Amandiers, Alexandre Délétraz.

     

    2ème contour: sortie du bois. Les framboisiers qui bordent le sentier ne sont pas encore chargés de fruits, cette syrah si. Un petit bonheur de fruits rouges entrelardés, sur des tanins croquants, salivants et rafraichissants. On en redemande, en ayant de surcroît un gros doute sur le géniteur. Bravo! Syrah 2010, Christophe Abbet.

     

    3ème contour: on plonge à nouveau dans la forêt. Les fruits se font discrets. Ce virage-là est plutôt raide et il faut s'accrocher. Acidité, dehors toute! C'est frais, forcément, acidulé, mais la finale se resserre sur les gencives, astringente et asséchante. Du jus, il y en a, sans doute à attendre. Si Joris su, Joris pas venu? Mais si, voyons. En l'état, c'est tout de même un peu duraille pour mon palais. Syrah Chamosite 2010, Didier Joris.

     

    4ème contour: bien accroché dans la pente, il s'agit maintenant de dérouler. Le nez est très beau, sur le caractère végétal de la syrah, bourré de fraîcheur et de notes de tapenande et d'olive noire. Une petite touche de bois ne vient même pas faire de l'ombre. En bouche, la matière en impose. Une belle grosse masse tannique acidulée qui sèche légèrement en finale, mais qui ne demande qu'un peu de temps pour se fondre. Un grand vin, pour plus tard. Syrah Quintessence 2010, Benoit Dorsaz.

     

    5ème contour: une difficulté superposable à la précédente. Ça syrahte plutôt joliment, sur un léger boisé toasté. Les tanins sont encore appuyés, mais s'enrobent déjà délicatement. Il y a la matière, l'acidulé, la fraîcheur. Ne manque juste qu'un peu de temps... Syrah Vieilles Vignes 2010, Simon Maye.

     

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    6ème contour: les lacets commencent à se resserrer, les vins aussi. On avance pourtant dans le temps, franchissant 5 années d'une traite. Une série qui m'apparaîtra un peu difficile, avec des vins au grand potentiel, mais dans une phase peu épanouie. De la violette, il y en a, pourtant, dans cette bouteille-là. C'est plutôt agréable, d'autant plus que la rétro est fruitée. Entre les deux, le vin est un peu compact et dense, comme replié sur lui-même. La finale laisse apparaître une pointe d'alcool. Globalement, c'est plutôt bien, mais pas à point. Didier, Didier! Oui. Syrah L'âme des Pierres 2005, Didier Joris.

     

    7ème contour: nouveau virage un peu sec, pour cette syrah aux étonnantes notes d'agrumes sur fond métallique, avec une touche de vernis à ongles. Les tanins sont un peu sévères, avec une acidité marquée. Il faudra lui donner une deuxième chance. Syrah 2005, Cave Le Bosset.

     

    8ème contour: le nez dans la pente, il faut continuer de grimper. Des notes de cerise, avec un petit côté noyau, pourtant, il ne s'agit pas de grenache. Et peut-être un premier nez réduit sur le caoutchouc brûlé ("il pneute!", pour certain d'entre nous). En bouche, les tanins sont marqués et finissent sur de l'amertume, ce qui induit un effet salivant bienvenu. Il y a du vin dans cette bouteille, mais c'est quand même un peu sévère! Syrah 2005, Denis Mercier.

     

    9ème contour: première sortie de route dans un virage, il fallait bien que ça arrive un jour. Nez sur la pomme blette matinée de liège et/ou de champignon, trahissant un défaut de bouchon. Là aussi, de la matière, mais des tanins durs et asséchants en bouche. De façon visiblement anormale. Pas de chance, il faudra y regoûter pour confirmer le problème ponctuel de bouteille. Grain Syrah 2005, Marie-Thérèse Chappaz.

     

    10ème contour: l'espoir renait au fur et à mesure que le ciel se rapproche. Sortie de la forêt de chêne, les framboisiers sauvages poussent à nouveau tout au long du chemin. Ça sent aussi la groseille, même s'il n'y en a pas. Le bois se fond. Les tanins acidulés sont d'une grande finesse, la finale fait bien saliver, malgré la petite pointe d'alcool bien présente et globalement toujours ressentie dans cette série, millésime oblige? Aucune impression de déjà vu/bu, pourtant... La deuxième chance de la Syrah 2005 de la Cave Le Bosset n'a pas mis longtemps à se concrétiser. Les deux bouteilles n'ont pas été conservées dans la même cave, est-ce la seule explication? Ou alors l'ordre de passage dans la dégustation?

     

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    11ème contour: deuxième sortie de route en plein virage, impardonnable celle-là. Ça sent le TCA à plein nez, impossible d'y tremper les lèvres. Dommage! Syrah 2003, Christophe Abbet.

     

    12ème contour: la délivrance est proche, la perspective de toucher au but motive les troupes, qui retrouvent un deuxième souffle. Le nez est plutôt évolué, mais très joli. Du pruneau un peu cuit, mais une rondeur bienvenue en bouche. Vin plaisir, charnu et agréable, dont il ne faudrait pas se priver. Syrah 2003, Romain Papilloud.

     

    13ème contour: à partir de là, ça déroule. Cette syrah-là ne saurait renier ses origines valaisannes. Beaucoup d'élégance, de la finesse et un petit je-ne-sais-quoi dans la texture qui évoque irrésistiblement le Valais. Un vieillissement harmonieux pour cette très belle Syrah Osami 2003 de Didier Joris.

     

    14ème contour: le final, l'apothéose! Nez complexe et enivrant sur les agrumes, l'écorce d'orange confite et le poivre. En bouche, la texture est fabuleuse. Savoureuse, aussi. Et dotée d'une grande longueur et d'une belle fraîcheur. La trame tannique est parfaitement fondue, d'une grande finesse. Ça sent le Rhône septentrional, largement en aval du Valais. Du négoce haute couture, que cette Côte Rotie 2003 de Tardieu-Laurent. On comprend ceux qui aimeraient s'en inspirer pour leur petit commerce.

     

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    À la sortie du dernier contour, il faut encore et toujours monter. Plus pour longtemps. Juste celui d'un dernier verre de syrah, un bonus ludique, puisqu'il s'agit de retrouver l'un des contours déjà franchi, présenté en magnum et, de ce fait, décliné en deux bouteilles de 75 cl, si mes calculs sont exacts. Il s'agissait de L'âme des Pierres 2005 de Didier Joris, qui présentait ma foi fort bien, derrière le pirate du Rhône français.

     

    La récompense du grimpeur, au sortir des 14 contours, c'est un panorama 4* sur le cirque rocheux, qui mérite bien une petite pause casse-croûte, pour savourer le pain, le jambon et le paysage.

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    La récompense du dégustateur, au sortir des 14 syrahs rhodaniennes, c'est un panorama 4* sur la production valaisanne, qui mérite bien une petite pause casse-croûte, pour savourer le canard, la ratatouille et le vin à table.

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    La cerise sur le gâteau, ce sera ce petit verre d'Ambre 2004, de Christophe Abbet, servi avec une tarte aux pommes maison, qui a pourtant bien failli passer à Travers. Un oubli vite réparé, juste le temps d'un aller/retour à la cuisine familiale.

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    On ne remerciera jamais assez Christophe Landry, Helvète underground, vigneron de Travers et œnologue génétiquement modifié, d'avoir bien voulu nous dessiner les contours de la syrah valaisanne et de sa vision jorissienne sur trois très beaux millésimes.

     

    Et on ne remerciera jamais assez non plus le Creux du Van de nous offrir de si beaux paysages depuis tant d'années...

     

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    Olif

  • VDV#53 et vins oranges: Veni, Vini Vivi, Vici!

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    Marre du rouge, du blanc ou même du rosé? Passe à l'orange! Sans être verbalisé. Grâce à Sand la Blonde, de la Pinardothek, oufti! Elle n'est pas blonde pour de vrai, en fait (enfin, je ne suis pas allé vérifier sous son chapeau), et elle ne trempe pas sa plume dans le sirop de Liège. Les Vendredis du vin lui ont inspiré cette thématique mécanique: orange, ô des poires. Et des scoubidous s'il le faut, pourquoi pas?

     

    Le vin orange, cet inconnu en vogue, n'a rien à voir avec celui que fait ta belle-mère, en faisant macérer une orange non traitée au dessus d'un mélange d'alcool et de sucre. On n'est quand même pas là pour boire du Cointreau, oufti? Quasi indissociable d'une vinification en amphore, comme le pratiquent les Géorgiens, les Slovènes ou les Italiens, il est le résultat d'une macération pelliculaire des raisins blancs. Une pratique qui fut abandonnée par l'œnologiquement correct, mais vite récupérée par le marché des lessives domestiques, dans le but d'obtenir des vins blancs plus blancs que blancs.

    J'en ai déjà goûté un certain nombre, depuis quelque temps, des français, des rhodaniens, des jurassiens, et des italiens, surtout. Des jaunes oranges, même, avec ce savagnin cuvé 1992, élevé 6 ans sous voile par Stéphane Tissot, amoureux de longue date des vins de Radikon. J'aime ce nez souvent envoûtant, riche et puissant, cette dimension tannique sur un blanc et puis cette bouche surprenante, souvent en contraste, très sèche et très vive.

    Des vins oranges, il y en avait un certain nombre à la Dive. Des Géorgiens, des Italiens, des rhodaniens aussi, chez Philippe Viret le pape de l'amphore en France, des alsaciens, chez Stéphane Bannwarth, qui a importé des qvevris géorgiennes pour les enterrer dans le Bas-Rhin et les remplir de gewurtztraminer et de pinot gris... De quoi largement baigner dans l'orange de façon mécanique.

     

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    Et puis, la semaine d'après, sur les bords du lac de Neuchâtel, sous un ciel bleu, devant une eau bleue, sur des terres blanches de neige, des vins oranges, aussi. Veni Vinivivi, vici! 1er salon des vins naturels à être organisé en Suisse. En voilà une bonne nouvelle! De l'avis des vignerons et des exposants venus de France plus ou moins lointaine, une organisation sans faille, propre en ordre, avec ponctualité et tout le bazar. Les Italiens et les Espagnols n'avaient sans doute aucune raison de se plaindre, je ne leur ai pas posé la question. Quant aux Suisses, ils auraient sans doute aimé, pour le fun, qu'un grain de sable vienne troubler le bon ordre établi, mais il n'en a pas été question, comme à l'habitude. Descendu de ma montagne sur un chariot chargé de paille, j'ai bien failli ne pas m'arrêter à l'orange. Mais j'ai vite fait marche arrière, pour ne pas perdre le bénéfice de quelques points sur mon permis de boire.

     

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    Olivier Pittet fait partie de la génération novatrice des vignerons valaisans. Installé depuis 2004, à la tête de 6 hectares, il n'exerce pas encore son métier de vigneron-encaveur à plein temps. Vignoble totalement enherbé, hautes densités de plantation, petits rendements, il se démarque de la majorité de ses confrères de Fully. Passionné par les vieux cépages, il est parvenu à sauver de l'extinction la grosse arvine, en couvant les 4 derniers pieds encore connus dans le vignoble. Parce que, évidemment, si l'on connait très bien la petite arvine, cela veut dire implicitement qu'il en existe une plus grosse! De la grosse arvine, il n'y en a pas la queue d'un grain, dans ce Vin orange, issu d'une macération longue de marsanne et pinot gris. Pas nom plus le moindre petit bout d'une amphore, mais un élevage en fût de mélèze, un contenant largement utilisé il y a longtemps de cela en Valais, avant de tomber bêtement en désuétude, tant il est intéressant, car ne boisant pas les vins. Un vin réellement étonnant, au nez surmaturé sec et puissant, mais à la bouche plutôt stricte. Un finale explosif pour une gamme globale très séduisante, mention particulière aux Racines de Fully, de vieux gamays hautement buvables et recommandables.

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    Et puis, ultime escapade sur la lune, un vin bleu m'attendait quelques tables plus loin. Luna Blu 2010, à ne pas consommer avant 2017, selon Bertrand Habsiger, vigneron à Caspri. Yes you Toscane, mais c'est quand même déjà ultra bon et ultra orange!

     

    Ultra Orange, justement, tiens!

     

     

    Olif

     

    P.S.: Vinivivi fut un immense succès, apparemment. Il faut croire qu'il y avait une demande helvétique pour ce type d'événement. Ce fut l'occasion pour moi de découvrir les vins du domaine de Chèrouche. Le Valais au naturel grâce à Marc Balzan et une totale redécouverte de certains cépages autochtones, vinifiés de façon minimaliste. Un gros coup de cœur, qu'il faudra aller confirmer sur place bientôt, c'est tout le mal que je me souhaite!

     

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    Et puis l'occasion aussi de croiser à nouveau la plus belle barbe souriante de Fully, une belle et vraie tronche de vin, qui sait être sérieuse pour la photo!

     

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  • VDV#50: cinquante 50

     

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    Vendredisduvin

    Les Vendredis du vin en chiffre, c'est 67 mois d'existence, 1492 participants différents (pas la peine de vérifier, j'ai dit ça complètement au pif), 458899 bouteilles dégustées (je les ai toutes comptées une par une), et ceci en partie grâce à l'arrivée des Brusseleirs. Les chiffres, c'est aussi l'affaire de Laurent Baraou. À l'origine de cette manifestation internautique, en compagnie de Liza Roskam, de Vinorati,  il a ouvert le bal avec moins de 12, il enchaine un pas de danse avec un coup de 50, à l'occasion de son cinquantenaire à lui tout seul et de la 50ème des VDV.

     

    50 cl ou rien, voilà qui est un peu fort de café, surtout pour les 50 Brusseleirs, qui ne sauraient se contenter d'1cl par personne, là où un magnum suffit à peine à étancher leur soif inextinguible de tout ce qui est liquide, fermenté, à bulle, à mousse, ou même pas. Ils ont d'ailleurs fait savoir leur mécontentement au Président en sélectionnant un grand nombre de flacons, comme à leur habitude, mais des grands contenants de 150cl sur lesquels ils ont fort discrètement et astucieusement barré le chiffre 1.

     

    Il est paradoxalement curieux de constater que les vignerons français font rarement les choses à moitié. Ils font des demies, certes, mais une demi-bouteille, c'est 37,5cl, un contenant généralement réservé à la restauration, sauf cas particulier. Mais, même pour un repas frugal et peu arrosé, il faut reconnaître qu'à deux convives, c'est clairement insuffisant, à moins d'avoir invité le Président de l'ANPAA à déjeuner. 50cl, c'est généralement un format plutôt réservé aux vins "bizarres", aux oxydatifs du troisième type, aux curiosités pleines de vilains défauts ou, alors, aux vins liquoreux, des gourmandises sucrées que l'on est censés consommer avec gourmandise et modération, non pas en raison du taux d'alcool, mais plutôt de la quantité de sucre de certains de ces vins, capable de plonger en coma acido-cétosique n'importe quel humain en bonne santé, même pas diabétique au préalable. 50 cl, finalement, ce n'est jamais que la moitié d'un litron, 100 bons centilitres, la véritable mesure que l'on n'aurait jamais dû abandonner pour quantifier le pinard. Les Helvètes, fort pragmatiques, ne rechignent pas à utiliser ce format entre-deux, qui rend le prix du flacon plus doux, même si, rapporté au déci (pour décilitre, évidemment, mesure traditionnelle du verre de vin commandé au comptoir helvète), le coût est certainement plus élevé. Il faut croire que, là-bas, la manipulation des chiffres et des nombres (notamment sur les billets de banque) y est un sport national. Beaucoup de vins y sont donc conditionnés en 50 cl (ou 500 ml, ou encore 0,50 l), qu'ils soient rouges, blancs, moelleux, liquoreux, oxydatifs, ou pas.

     

     

    Ce ne sont donc pas moins de 50 flacons de 50 cl que j'offre ainsi à Laurent Baraou, pour beaucoup venant de Suisse voisine, dont plusieurs cartons de 6 pour arriver à bon compte. L'essentiel reste de participer et aussi de faire la nique aux Brusseleirs... Parmi eux, du blanc (Petite Arvine 2004 et 2007 de Romain Papilloud (impeccablement salines), Arvine 2004 de Christophe Abbet, Marsanne Grain d'Or 2007 de Marie-Thérèse Chappaz,...), du rouge (Cornalin de Vétroz 2004 et 2007 de Romain Papilloud, juste à point, Côte Rotie 2006 Élégance de Jamet, forcément élégante, ...), de l'oxydatif (Évidence et Fleur de Damoiselle de Claude Courtois (une grosse, très grosse bouteille, que ce 99, malgré la petitesse de son format), Savagnin ouillé 2003 de Pierre Overnoy, L'air du Temps 2001 de Christophe Abbet, Poil de Lièvre de Mas Foulaquier, Fine gueule de loup du Loup Blanc, Hyper Bole 2002 du domaine René Rieux (clin d'œil au Président Lolo), ...), du liquoreux (Volupté 2004 de Romain Papilloud, Malvoisie de Gérald Besse, Maria Juby 2003 de Patrick Baudouin, Tokaji du Château Deresla, Barréjats 2001 en Sauternes, un vieux grenache noir de la Tour Penedesses, ...) et aussi du bizarre. Comme ce Suyquiême 2004 de Fanfan Ganevat, une sélection de grains nobles de vieux cépages jurassiens, vendangés en décembre 2004. Équilibre demi-sec (après probable nouveau départ en fermentation en bouteille, comme en témoigne le soulèvement du bouchon, la coulure de la cire et la légère baisse de niveau), avec une pointe de gaz persistant, des arômes de fruits secs sur une base acidulée et, au final, un vin très fin, gracile, sur le fil, judicieusement conditionné en bouteille de 50 cl.

     

    Olif

     

     

     

     

     

     

  • Clavau: itinéraire bisse en Valais

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    Lorsque la foule se presse sur les autoroutes helvétiques, s'embouteillant et bouchonnant dans la vallée du Valais, rien ne vaut un itinéraire bisse sur les hauteurs. Celui-ci le Clavau bien, puisqu'il serpente entre les murs, le long du bisse du Clavau, au cœur des vignobles Gilliard, Bonvin et Varone.

     

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    Il convient de noter que le Clavoz et le Clavau sont les deux orthographes possibles de ce micro-canal créé, parmi tant d'autres, par un certain Bisson fûté, au XVème siècle, pour irriguer la plaine du Valais depuis la montagne. Certains sont parfois vertigineux, en paroi abrupte, à déconseiller aux Hollandaises craintives habituées à s'encorder pour sillonner les chemins de halage d'Amsterdam. Historiquement, la vigne a initialement colonisé les coteaux pour laisser la place aux cultures maraichères dans la vallée. Le terroir a été façonné, tant la pente était raide, et des murs en pierre sèche, parfois monumentaux, ont été créés pour permettre au sol de résister à l'érosion. Ici, ils atteignent parfois 16 mètres de hauteur et ce sont les plus hauts du monde. De façon surprenante, il a fallu ni plus ni moins que 3 hectares de surface de murs pour permettre l'exploitation de seulement 3 hectares de vignes..! Impressionnant! "Le Bon Dieu a fait la pente, mais nous, on a fait qu'elle serve!" a fort intelligemment fait remarquer C.F. Ramuz, avant de foncer droit dans le mur il y a une paire de siècles. Les travaux titanesques entrepris à la fin du XIXème servent désormais d'itinéraire de randonnée à l'œnotouriste qui s'ignore ou aux journalistes et œno-blogueurs en goguette. 

     

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    Le long du bisse fleurissent les guérites, intialement dédiées au stockage des outils du vigneron et désormais vouées au ravitaillement. La Guérite Brûlefer, suspendue au dessus du bisse, propose au marcheur harassé et assoiffé une oasis au cœur des vignes. Courte carte de spécialités valaisannes et bons vins, ceux du domaine Bonvin, pour se remettre en forme pour la route, en plein milieu de la randonnée. Christophe Bonvin, ancien footballeur international suisse, auteur de 2 buts et d'une passe décisive à Anfield Road avec le FC Sion (il y a quand même des lustres de cela, mais c'est comme si c'était hier quand il le raconte), désormais adjoint de direction à la maison Charles Bonvin (au nom plus prémédité que ça tu meurs), sait s'y prendre en matière de communication et tire toujours plein cadre.

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    En compagnie de Rose-Marie et Marie-Rose, véritable paire de jumelles interchangeables, Christophe Bonvin voit loin et sait recevoir les clients.

     

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    Lorsque l'on reprend sa route le long du bisse, en direction de Saint-Léonard, on parvient dans un espace neuro-sensoriel en plein air, situé au milieu des vignes du domaine Varone. Après une courte ascension entre les rangs, où l'on est incité à voir, à sentir, à toucher, à entendre, à goûter, on parvient enfin au Cube, gardé par une jolie et sympathique cerbère, véritable oxymore, qui incite volontiers à la consommation de mets et vins divers et variés. Le Cube est une guérite designée et réaménagée, dans laquelle on ne range plus les outils mais qui sert de garde-manger...

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    ... un espace-dégustation, mets et vins, ouvert en été le week-end, uniquement par beau temps. Pas d'autre choix, les tables sont dressées dehors. Pour cette raison, il vaut mieux réserver au préalable et s'enquérir de la météo. Une initiative œnotouristique comme on aimerait en voir plus souvent, avec, en point d'orgue ce jour-là, un espuma de raclette sur une gélification de fendant, le genre de plat qui ferait se retourner dans sa tombe n'importe quel Valaisan pur et dur, mais qui mérite, rien que pour cela, de bisser le parcours.

     

    Bisse and love ... et Großes bisses du Valais,

     

    Olif

     

  • Vinéa 2011: de l'eau et du vin suisses...

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    Vinéa 2011, c'est déjà fini. Si le grand salon "plein air" des vins suisses a une nouvelle fois battu son plein, la pluie s'est invitée en dernière minute, et de façon plutôt continue le dimanche, alors que la manifestation avait plus l'habitude des orages de 17h30 venant nettoyer les trottoirs de Sierre des derniers buveurs dégustateurs et de quelques crachures sur le bitume. L'eau tombée du ciel n'a finalement pas réussi à diluer le vin ni le succès de Vinéa. En quête de reconnaissance sur le plan international, la Suisse viticole s'affiche en grand et n'hésite pas à se frotter au reste du monde dans des concours de dégustation, tel le Mondial du Pinot noir qui s'est déroulé ici il y a très peu de temps, et dont les vins médaillés ont été proposés en dégustation publique le vendredi soir. Un évènement planétaire à la gloire du cépage, même s'il faut parfois bien chercher le terroir derrière.

     

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    Distinguée cette année, la cave des Vins des Chevaliers de Salquenen est une cave historique où l'on ne vendange pas pourtant en armure. Reprise en 2008 par Patrick Z'Brun, juste après son ascension de l'Everest, elle se donne les moyens de ses ambitions et a été l'hôte d'honneur de Vinéa, en compagnie, entre autres, des vins de Sicile et des Lauriers d'Or Terravins, qui organisaient pour l'occasion une dégustation exceptionnelle de Dézaley, à laquelle nous n'aurons pas eu la possibilité de participer.

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    À Sierre, les histoires gastronomiques les plus de Courten sont les meilleures, c'est bien connu. À l'occasion d'un repas mémorable à l'Hôtel Terminus, s'il fallait ne retenir qu'un mets, qu'un vin et qu'un accord pour faire bref, ce serait ce bar de ligne rôti aux saveurs méditerranéennes, cuit à la perfection, et la Petite Arvine 2010 de Thierry Constantin, d'une droiture remarquable. Comme un instant d'éternité gustative...

     

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    La bouteille du week-end sera pourtant, sans nul doute possible, cet Ermitage les Chapelles septante-neuf (79, je précise juste à l'usage des Français ne parlant pas suisse couramment) de la cave Provins Valais, l'une des cuvées de cette célèbre et réputée coopérative, collectionneuse de vieux millésimes, bouteille appréciée la veille autour de fromages valaisans de premier choix. Une évolution remarquable, avec des notes de rancio et de noisette au nez, mais une bouche encore extraordinaire de fraicheur, de tension et de longueur. Le 95, goûté au préalable, fut également parfait, donnant un aperçu du potentiel de longévité de la marsanne sur des terres qui lui conviennent. Le Valais en fait indiscutablement partie.

     

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    Dernière petite épreuve, avant une ultime raclette pour la route, la dégustation de 4 séries de cépages internationaux, dans laquelle il s'agissait d'essayer d'identifier la provenance des vins et de reconnaitre notamment leur origine helvétique. Chardonnay, sauvignon, merlot et enfin syrah, un exercice ludique mené tambour battant par Thomas Vaterlaus et François Murisier, dont les résultats furent particulièrement intéressants et instructifs, les vins helvétiques se retrouvant régulièrement identifiés par la majorité des dégustateurs, tout comme les autres vins, d'ailleurs. Un début d'identité qui me semble pourtant plus lié aux habitudes d'élevage qu'à une véritable notion de terroir.

     

    Olif

     

    P.S.: Vinéa 2011 aura été également l'occasion du premier congrès improvisé et non officiel de blogueurs officiellement non retenus par le B&D. Nul doute que de cette rencontre entre Laurent Probst, Hervé Lalau, Anne Serres et moi-même, ici présent, devraient sortir de grandes choses pour les décennies à venir. J'en connais qui n'ont qu'à bien se tenir...

     

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    De gauche à droite, Hervé Lalau et Laurent Probst. Anne Serres, excusée, s'est absentée 5 minutes pour aller faire les soldes dans le magasin au fond, avec le petit lapin sur le store.

     

    P.S.2: d'autres tranches de raclette valaisanne à venir dans les jours prochains, pour ceux qui auront encore de l'appétit...

  • Chasselas naturel, il revient au goulot...

     

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    Le chasselas est un raisin qui se mange beaucoup à table mais se boit également dans un verre. Il est cultivé un peu partout en Europe mais les Suisses en sont les champions de l'encuvage, au point d'en avoir fait quasiment leur cépage national. On l'appelle fendant en Valais, parce que les grains ont tendance à se fendre à maturité, ou gutedel en Suisse alémanique, parce que tout ce que tu goûtes d'elle est vachement fendant. Véritable éponge à terroir, révélant alors la minéralité de son sol, il donne naissance à de grands vins complexes et profond. Mais il sait surtout être un parfait vin de soif et d'apéritif, "suscitant l'envie sans jamais la rassasier". Vinifié dans cet esprit, il se boit jeune, à la seille, et possède un léger perlant dû au gaz carbonique préservé lors de la vinification. C'est une culture, c'est suisse, essentiellement, même si on en trouve également en France, dans la Hiaute (à Ripaille), en Alsace, à Pouilly sur Loire et même en Languedoc, chez la Lady Chasselas.

     

     

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    Ce chasselas-là (non, je ne bégaie pas!) a été cultivé en Vaud, en 2008 et en biodynamie, à Tartegnin, chez Alain Bersier, et vinifié en Valais, à Riddes, par Reto Müller, artisan vigneron, avec un naturel revendiqué. C'est un beau romand, c'est une belle histoire. Grosse maturité, grande minéralité, équilibre inhabituel pour ce type de vin mais un grand bonheur dans le verre, qui se lappe avec avidité. Seul  petit bémol, les 50 cl de la bouteille, rassasiant vite l'envie évidemment sucitée. Chasselas naturel...

     

     

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    Olif

     

     

    Retrouvez aussi les Dégustantanés sur le Blog de la Pipette.

  • Vendredis du vin #29: La quille, bordel!


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    29ème session des Vendredis du vin. Du peu au jus, mais quand même! Vivement la quille, bordel! "Qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse", disait le poète. "Eh bien non!", s'exclame le bourguignon en direct. On ne veut pas être ivre avec n'importe quelle boutanche. Pas avec n'importe quel contenant, ni même - et surtout?- n'importe quel contenu. Et peut-être même pas avec n'importe qui non plus. S'abandonner corps et biens, oui, mais dans les règles de l'art, avec un emballage ou un emballé dignes de ce nom. 

     

    À petite ivresse, petit flacon. À méga-uber-große caisse, prévoir plus large. Douceur non exclue. Habituellement embouteillée en dé à coudre (37,5cl voire 50cl pour les gros gourmands), la cuvée Ambre de Christophe Abbet vaut tous les Martigny on the rocks du monde. Un liquoreux de l'extrême, assemblage de marsanne et petite arvine, élevé longuement en fût (jusqu'à 44 mois, si cela le justifie). Un vin qui souvent défie la mécanique des fluides et dont le grain oxydatif, apporté par l'élevage long, accentue le caractère exceptionnel et superlatif. Pour se la mettre bien profond, ou, plus élégamment formulé, toucher à l'ivresse des profondeurs, rien ne vaut les grands contenants. Jamais sans mon magnum, une mise réservée à ceux qui le méritent. Autant dire qu'ils sont rares.

     

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    "Zéro, zéro, zéro, zéro..."

     

    Olif

     

    P.S.: Un flacon géant non ouvert pour l'occasion, mais qui me rend ivre rien que de penser au jour où je le ferai!

  • Une grosse claque dans le Beudon!

    Très certainement la grosse découverte lors de Vinéa 2010! Des vignes dans le ciel, des vins célestes, une grosse claque dans le bedon. Le nom de Beudon vient de là, d'ailleurs, parait-il. Cette langue de terre tirée par la montagne, au dessus de Fully, est exposée plein sud, comme un bon gros ventre bombé surplombant la vallée. On y accède par téléphérique privé ou par des sentiers de chèvre rendant périlleux le retour à Fully, des cartons plein les bras.

     

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    Ces vignes dans le ciel du Domaine de Beudon, à Fully, ont été plantées par un notable illuminé dans la première moitié du XXème siècle, puis reprises à son décès en 1971 par Jacques Granges, alors frais émoulu d'une école d'ingénieur. Un pari un peu fou, pour un amoureux de la nature à la recherche d'un paradis perdu. Par conviction, il est le premier à appliquer les principes de la biodynamie en Valais, et ce depuis 1993. Ce qui lui permet de préserver la biodiversité  de son terroir unique et de cultiver, en plus de la vigne, plein d'autres plantes médicinales. Beaucoup plus intéressé par les plantes et leur cultures que par la vinification proprement dite, Jacques Granges confie celle-ci à un ami dans la vallée.

     

     

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    Une grande partie des cuvées du domaine était proposée à la dégustation lors de Vinéa. Y compris de vieux millésimes, toujours disponibles à la vente. Au sommet, la Petite arvine 2008, qui dépasse le stade purement variétal, le Gamay 2008, poivré et gentiment tannique et le Pinot noir 2006, gourmand, frais et finement acidulé. Le Fendant 2005, rapporté en souvenir, est étonnant de maturité et de fraicheur, rien à voir avec le standard que l'on peut déguster chez la majorité des vignerons locaux. Moins de gaz, mais pourtant une belle vivacité, de la densité et une belle profondeur qui en font un vrai vin de terroir, apte à la garde.

     

     

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    La  Dôle 2004 est toujours debout, pour quelque temps encore, je pense. À mille lieues de l'archétype du Passetoutgrains, qu'il soit bourguignon ou helvétique. Un exceptionnel grain de vin, pas passe partout, qui la rend extrêmement buvable, mais sans céder à la facilité. Un vin qui a du fond ... et des ailes. Une Dôle adorée, une Dôle adulée!

     

    Olif

     

    P.S.: les vins de Beudon sont disponibles à l'œnothèque de Fully, quasiment au pied de la langue rocheuse, au prix propriété.

     

    P.S.2: malgré le vertige occasionné par la montée en téléphérique, le Châ, qui en a fait sa grosse découverte 2009, a publié un article très complet sur Beudon pour Vin-Terre-Net, après s'être rendu sur place. Le court historique écrit dans ce billet s'en est largement inspiré, à l'insu de son plein gré.

     

  • Escale au 7ème (Confiden)Ciel

    Il faut avoir un grain, pour cela. Un grain de noblesse, un grain de confidentialité, un  Grain Noble ConfidenCiel. Un grain de folie aussi, probablement aussi, pour laisser en pâture aux étourneaux d'aussi bons raisins, naturellement et richement sucrés, passerillés ou botrytisés. Sweet Wallis, doux Valais, douce vallée. Amigne, arvine, marsanne, johannisberg, malvoisie, païen, seuls ou en assemblage, peuvent revendiquer le label imposé par la charte. Sélection de raisins de qualité, sur des terroirs privilégiés et qualitatifs, sans chaptalisation, élevage en foudre ou barrique pendant 12 mois minimum, voici quelques-uns des critères requis pour pouvoir être proposé à l'agrément et, peut-être, apposer le prestigieux autocollant elliptoïde sur son flacon.

     

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    Fort gentiment convié au Château de Villa afin de participer non pas à une dégustation d'agrément mais à l'évaluation d'un échantillonnage de grains nobles sélectionnés, c'est avec grand plaisir que j'ai fait la semaine dernière une apparition valaisanne en compagnie de l'ami Laurent Vins-Confédérés. Une douce apparition au cours de laquelle il s'agissait de déguster et noter selon un barême précis (presque une grande première pour moi!) une série de 30 vins liquoreux de la charte Grain Noble. Plus une mise en bouche et un bonus de clôture. L'équivalent, grosso modo, de 5 à 6 kilos de sucre qui ont transité dans le gosier. Et pourtant! Et pourtant...! Rarement bouche resta aussi fraîche et désaltérée après un exercice aussi opulent. La preuve d'une maîtrise du processus et d'un équilibre généralement bien construit, entre sucre, alcool et acidité.
    De cette après-midi fort studieuse mais néanmoins décontractée, en compagnie de dégustateurs réputés (Dominique Fornage, Jacques Perrin, Steve Bettschen), de grands journalistes spécialisés helvétiques et bourguignons (Pierre Thomas, Alexandre Truffer, Christophe Tupinier de Bourgogne Aujourd'hui), de confédérés blogueurs (Laurent Vins-Confédérés), de sommeliers, d'œnologues, que sais-je encore,  je retiendrai un très haut niveau global des vins issus de la charte. De nombreuses variables sont venues compliquer et enrichir la dégustation (7 millésimes, 5 cépages différents + divers assemblages), rendant l'interprétation des appréciations un peu plus difficile et aléatoire. De ces 32 vins, parmi ceux notés au moins 90 à titre personnel,  je retiendrai le Johannisberg Larmes de décembre 2008 de Thierry Constantin, pour son côté riche, rond, frais et acidulé en même temps, l'Ermitage grain Doux Collection F 2007 des Fils de Charles Favre, pour sa belle finesse, la Petite Arvine Tourbillon 2007 de Provins Valais, première cuvée du nom en arvine et grande réussite, pour son caractère opulent, riche et légèrement oxydatif, l'Ermitage grain noble 2008 de Philippe Darioli, tiré sur fût, pour sa belle et longue finale saline acidulée, l'Arvine Noblesse 2007 de Gérard Dorsaz, tirée sur fût, aux beaux amers salivants, la Malvoisie Grain Noble 2002 de Philippoz frères, pour sa belle évolution oxydative sur le café et l'arabica.

     

    Mention particulière pour l'Arvine Grain noble 2008 de Marie-Thérèse Chappaz, tirée sur fût, à un stade encore ingrat et inabouti, mais bourré de promesses, et à la cuvée d'Ermitage 2006 Vendange d'octobre, toujours chez Marie-Thérèse, complètement hors norme (plus de 300g de sucre résiduel, 9° d'alcool), mais dont l'équilibre sirupeux ne manque pas de fraicheur, une véritable prouesse.

     

    Les dégustateurs réunis ont pour leur part plébiscité la Petite Arvine Tourbillon 2007 de Provins Valais, lui octroyant une moyenne de 91,6 points sur 100. Bravo!
    Et comme en Valais, tout finit par une raclette, surtout lorsque l'on se trouve en son temple ...

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    5 fromages, à volonté, arrosée comme il se doit de moult fendant, pinot blanc, paîen, ermitage, johannisberg, petite arvine, humagne blanche, chardonnay, savagnin jurassien même.

     

    La belle vie valaisanne, quoi!

     

    Olif

     

    P.S.: un grand merci à Emmanuel Charpin et Dominique Fornage, du Château de Villa, pour l'organisation millimétrée et minutée de cette belle journée, malgré le dépassement d'horaire inéluctable, imprévu et incontrôlable lors de la raclette finale, me contraignant à un retour très tardif dans le Haut-Doubs. Que n'ai-je donc pris une chambre sur place?

     

  • La mécanique des fluides selon Monseigneur l'Abbet

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    Le cantique des quantiques ou la mécanique des fluides selon Christophe Abbet, un cours magistral reçu dans le grand amphithéâtre de la Capite des vignes de Travers. Une soirée informelle, sans prise de notes, sans prise de tête, qui nécessitait au préalable de vaincre le froid et la neige, et au cours de laquelle on a pu souffler de travers 40 balais et des poussières (il n'y avait pas de bougies) tout en goûtant à quelques vins de messe distillés par l'Abbet himself.

     

    Dégustation apéritive de vins rouges, suivie d'un osso-bucco à l'entracte, avant d'attaquer les choses sérieuses et la dégustation liquoreuse digestive. La cerise sur le gâteau, ce fut une succulente tarte, paradoxalement aux pommes, un gâteau de Travers coupé à angle droit. Un accord de choix avec la marsanne et/ou l'arvine surmaturées.

     

     

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    Première révélation, sur le pouce: les gamays de Fully et de Christophe le valaient bien. Nonante-cinq et nonante-et-un (et nonante-deux à un moindre degré) ne font pas leur âge. 95, 91 et 92, je le précise à l'intention de ceux qui ne parlent pas suisse couramment. Les dernières bouteilles, ou presque, et un immense honneur d'avoir pu y tremper les lèvres, et même plus car affinités.

     

    Deuxième impression, car ce n'est nullement une révélation, l'Abbet, en plus d'être un véritable Monseigneur du gamay, est un sorcier du liquoreux. Ambre 2002, enfin goûtée en bouteille, est un vin surnaturel, défiant la mécanique des fluides. Huileux, onctueux et d'une richesse qui mériterait d'être  taxée par l'ISF. Le grand vin attendu, après toutes ces dégustations au fût enthousiasmantes les années précédentes. Une bouteille grandiose au milieu d'OVNI liquoreux et/ou oxydatifs produits en quantité infinitésimale. Eh! oui, le sorcier est aussi homéopathe...

    Surmaturé 2000, Air du Temps 2003, Ermitage 2003 reflètent à merveille le feeling et l'inspiration de Christophe en matière de vinification. Chapeau, Monseigneur!

     

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    Olif

  • La Liaudisaz, 20 ans de cave, la dégustation

     

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    Insaisissable Marie-Thérèse! Pas simple de la prendre en photo sans qu'elle ne bouge! 20 ans, c'est l'âge de la cave, mais c'est aussi celui de sa fougue et celui de son mental. Une organisation sans faille, ou presque, qui a permis au plus grand nombre de déguster toutes les cuvées du domaine. de la Liaudisaz J'allais dire toutes les cuvées à la vente, mais bon nombre sont déja épuisées ou très fortement contingentées (du style UNE bouteille par personne). Il valait mieux avoir réservé avant!

    6 blancs, 1 rosé, 7 rouges, 3 liquoreux, 18 possibilités de déguster, puisque la Marsanne grain noble était proposée deux fois, avec deux accords différents, fromage puis chocolat. Pas question de se contenter d'un seul verre, donc, c'eût été dommage. Une dégustation volontairement proposée sans crachoirs, c'était la fête, on était là pour goûter plus que pour déguster. Les conducteurs durent ruser pour se fabriquer un petit crachoir personnel à l'aide d'un gobelet individuel. Gobelet qu'il fallait aller vider aux toilettes réglièrement et surtout ne pas renverser. Heureusement, Le Châ fut l'homme de la situation une fois de plus. Quel homme, ce Châ! Et quelle situation, mes pieds en sont encore rouges de confusion. Quelle idée aussi, de me demander l'heure, alors que je n'ai pas de montre!

     

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    Plus qu'une dégustation, donc, il s'agissait d'un parcours initiatique d'accords. Vins et fromages, de différentes provenances, d'affinages différents. Vin et vin, aussi, parce qu'à certains stands, le ravitaillement solide faisait défaut, puis vin et chocolat pour terminer. Millésime 2008 en ce qui concerne les vins, sauf mention contraire.

     

    - 3 Fendants pour la mise en bouche: celui de Martigny Les Bans développe un certain gras, Plaimont est plus tonique, Président Troillet comporte une dimension supérieure, plus minérale.

     

    - La Petite Arvine Grain blanc, elle, c'est une princesse, aux dires de Marie-Thérèse. Elle n'a pas réussi à terminer tous ses sucres, n'en faisant une nouvelle fois qu'à sa tête. Elle posède beaucoup de gras, sur des notes d'agrumes qui aboutissent à une petite amertume finale, bien adoucie par le peu de sucre résiduel. Il est clair que les puristes la préfèreraient parfaitement sèche, mais quel vin!

     

    - L'assemblage Grain cinq est constitué de cinq grains différents. Qui l'eût cru? Une belle complémentarité pour un équilibre subtil et un vin au final très séduisant.

     

    - L'Ermitage Grain d'Or possède toutes les qualités de ses prédécesseurs des millésimes antérieurs. Un vin opulent, riche, gras, puissant, mais parfaitement équilibré. L'olive verte, la truffe et l'eau de vie de framboise ne sont pas loin.

     

    - Le Rosé rhodonite, assemblage de jus de presse et de saignée, est un beau rosé plutôt vineux, qui joue la parfaite transition avec les Dôles qui vont suivre. Mon Puiné, simple, c'est son rôle, La Liaudisaz plus charnue mais bien gouleyante.

     

    On passe aux choses plus sérieuses avec le Grain Pinot, rubis éclatant, fruité et cristallin au nez, d'une parfaite fraicheur sur des petits tanins lisses mais croquants. Un très beau Pinot noir valaisan, l'un des plus renversants qu'il m'ait été donné de goûter dans sa jeunesse jusqu'à présent.

     

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    - Les spécialités valaisannes se succèderont ensuite. D'abord Grain Mariage, jeunes vignes de Cornalin et d'Humagne assemblées, frais et revigorant, puis, surtout, le Grain Cornalin, d'une belle densité fruitée qui m'a énormément plu, et, enfin, le Grain Syrah, encore plus dense, plus sérieux, plus profond, destiné à une belle garde. Le Grain Noir 2007, derrière ces trois-là, me séduit à peine moins, sans démériter pour autant.

     

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    - Place aux doux, avec une agréable mise en bouche par le Grain Doux 2008, un moelleux à l'équilibre demi-sec qui dialogue parfaitement avec un gressin aux oranges confites. La Malvoisie 2007 est une pure petite merveille acidulée, à la fraicheur exquise. Que dire alors de la Petite Arvine Grain Noble 2006 qui semble faite pour une idylle avec le Vieux Stilton? Tout simplement magnifique, d'une fraicheur exemplaire malgré la grande richesse en sucres. La Marsanne Grain Noble 2006 est à l'unisson, plus opulente, encore plus riche, mais sans uen once de lourdeur. Elle se joue du fromage et se fond dans un chocolat conçu pour elle, ganache aux truffes et à l'eau-de-vie de framboise.

     

    Un sans faute dont Marie-Thérèse est coutumière, même si l'on est évidemment en droit de préférer telle ou telle cuvée. Rien à jeter, rien à cracher (pour cette fois), il fallait tout avaler (ou presque)!  Une journée haute en couleurs, malgré la blancheur éternelle des sommets valaisans. On n'a pas tous les jours 20 ans, malheureusement!

     

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    Olif

     

     

  • La Liaudisaz, 20 ans de cave, une journée de fête!

     

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    Sans nul doute, Fully était "the place to be", en ce dernier dimanche de mai. Pour commémorer les 20 ans de la cave de la Liaudisaz, Marie-Thérèse Chappaz recevait tous ses clients et amis, les transformant, l'espace d'un instant, en beaux ouvriers de la Belle Usine de Fully.

    Petite arvine, raclettes, fraises du Valais, organisation parfaite, musique et soleil, tous les ingrédients étaient en place pour faire de cette rencontre une fête dont on aura envie de se souvenir. La dégustation de toutes les cuvées du millésime 2008 se faisait en accord avec fromage, pain ou chocolat, selon le vin servi, pour décupler le plaisir.

     

    Aperçu en images, avant quelques notes de dégustation:

     

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    11h30, la foule était déjà au rendez-vous

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    Raclette(s): pas loin de 10 fromages valaisans d'origine différente pour accompagner les pommes de terre

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    Marie-Thérèse et Steve Bettschen en plein débriefing organisationnel

     

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    Le Châ, ouvrier bénévole d'un jour à la Belle usine de Fully, véritable bras gauche des jeunes filles temporairement handicapées

     

     

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    Un air de musique festive sous les chataigniers

     

     

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    Fraises du Valais nature, un dessert particulièrement goûteux et rafraichissant!

     


    La fête fut belle, Marie-Thérèse en fut la reine. Bon anniversaire, la Liaudisaz!

     

    Olif

  • Retour à Martigny-Bourg, chez Christophe Abbet

    Martigny-Bourg, le retour! A la bourre! Après le rap des Rappes, il s'agissait de s'engouffrer dans la tanière de l'Abbet (Christophe de son prénom) pour un nouveau beau voyage au pays de l'Ambre, ce doux royaume mystérieux qu'il faut savoir apprivoiser. Un monde à part, dans l'univers des vins valaisans, à l'image du vigneron pourtant issu d'une formation classique à l'Ecole de Changins, là où tous les œnologues suisses vont apprendre à faire du vin. Pas toujours avec un sens artistique très développé, contrairement à ce que l'on peut observer ici. Des bouteilles dans lesquelles poussent parfois de drôles de choses, une fois vidées de leur contenu liquide.

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    D'ailleurs, on va s'y atteler comme des bœufs, à les vider, c'est le moment de la dégustation. Des bœufs attelés à l'Abbet Road, saisissant raccourci et petit clin d'œil éculé à l'intention des initiés.

    - Chasselas de Fully 2007, Les Avasiers: une cuvée habituellement assemblée au traditionnel Chasselas de Fully mais qui, à cause d'une panne de monorail, a été vendangée 10 jours plus tard que les autres. Donc, du coup, isolée. Le nez est d'un fruité très mûr, presque exubérant, sur la pêche de vigne que l'on a envie de croquer. Bouche ronde, suave, avec du gras. Un fendant plutôt atypique et original.

    - Arvine 2007: nez mûr et original, bouche très agrumes, acidulée, avec des notes d'ananas et d'écorce d'orange. Richesse en bouche, qui termine sur de beaux amers. Mystérieuse petite arvine, qu'il faut aller chercher, à défaut de l'attendre encore un peu.

    - Gamay de Fully 2006, Les Avasiers: une déclinaison du Gamay dans cette fameuse combe des Avasiers, qui donne un vin fruité (groseille), épicé, concentré et charnu, acidulé et frais en finale.

    - Gamay de Fully 2007, Les Avasiers: en exclusivité, un échantillon prélevé à la cuve. Structure serrée, dense, avec un joli fruit final, dans un bain de fraicheur.

    - Gamay de Fully Vieilles Vignes 2007: également prélevé sur cuve, élevé sur lies et très peu soufré. Présence d'une pointe de gaz (malgré un dégazage musclé préalable, fait en coulisses). Nez épicé et fumé, bouche soyeuse, charnelle, finale nette, droite et précise.

    - Humagne rouge Tradition 2006: souple et fruitée, sur des notes de sirop de fraise et cassis.

    - Syrah 2007: mise toute récente, en jour "fruit", par une lune ascendante. C'était la "minute antroposophique", même si les vignes ne sont pas cultivées en biodynamie. Nez un peu lardé, riche et fruitée, bouche opulente et concentrée, une passionnante rencontre avec ce vin ayant bénéficié d'un élevage original avec une macération très longue et un pressurage début juillet.

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    Après cette copieuse mise en bouche, les bouteilles se sont mises à léviter, soulagées de leur contenu pourtant aérien. Un présentoir économique, classieux, artistique et joli, fait de bric, de broc et de bouts de fil métallique. Après avoir grimpé au mur, direction la cave, dans les entrailles du vieux Bourg pour une expérience hors du commun. "Vous ne serez plus les mêmes en sortant d'ici!" nous prédit l'Abbet en dévalant les marches quatre à quatre, en roulant les épaules (private joke!), avec un sourire sardonique. Dans l'antre du sorcier, il faut jouer de la pipette et ce n'est pas du pipeau. On y trouve des mixtures qui trainent depuis de longues années, parfois, sans pour autant prendre la poussière. Pour plusieurs d'entre elles, l'heure de la consécration en bouteille va bientôt sonner. Elles sont prêtes à affronter les hordes de dégustateurs aguerris, impatientes de partir à l'aventure pour vivre leur vie hors de l'utérus octodurien.

    - Chardonnay-Petite Arvine 2003, sous voile: assemblage 40-60, qui devrait bientôt être dans l'Air du Temps, du nom de cette cuvée désormais classique et célèbre. Nez surmaturé sec, presque confit, caractère oxydatif indéniable, beaucoup de finesse et de profondeur.

    - Marsanne 2003, sous voile: cette fois-ci, on part sur un équilibre plutôt liquoreux, avec des notes d'abricot sec et de liqueur de café. Acidité, droiture et netteté, y goûter est un moment rare et privilégié dans une vie d'amateur! Superbe!

    - Marsanne-Petite Arvine 2000, sous voile: nez malté, rancio, avec une bouche riche et opulente. Le caractère oxydatif s'exprime ici un peu à la manière des Vieux Rivesaltes ambrés. Déroutant mais très beau!

    - Ambre 2006: goûtée sur plusieurs barriques neuves, ne se donne pas encore. Un "bouton de fleur" qui ne demande qu'à s'ouvrir lentement.

    - Ambre 2005: couleur déjà ambrée, nez sur les fruits secs et la mine de crayon, camphre et essence de pin sur une autre barrique, qui évolue sur des notes entêtantes de thym et de garrigue. Le boisé marque encore un peu, la finale est à peine chaude. Là encore, l'élevage est loin d'être terminé! A attendre patiemment.

    - Ambre 2004: une approche du produit fini et un vin plus abouti, même s'il garde encore sa part de mystère. Présence d'acidité volatile plus marquée, bénéfique, qui accentue la sensation de buvabilité.

    - Ambre 2002: un monument à mettre en bouteille et en cave, la sienne personnelle, et se prosterner devant, matin et soir, tant que l'on ne l'aura pas bue! Huileuse, grasse et onctueuse, mais caressante, fraiche et digeste, une Ambre sensationnelle à réserver aux gourmands et aux amateurs de vins riches. 

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    D'anciens comptes-rendus de dégustation chez Christophe Abbet ici, et encore , et puis l'avis de mes compères ici et .

    Olif
  • Le rap de Gérald Besse, le vigneron des Rappes

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    Patricia et Gérald Besse, artisans vignerons aux Rappes et amis des artistes

    Il n'en fallait pas plus pour que je dégaine mon gun et rentre en piste

    Avec mon calepin, mon stylo, mon sweat à capuche, mon baggy et mon Pentax

    Tout l'arsenal du chroniqueur rappeur ayant choisi de rester dans l'axe

    Du rap du dimanche

    Du hip-hop romanche

    "Ch'est un beau roman, ch'est une belle hichtoire

    Ch'est une romanche d'aujourd'hui ..."

     

    C'est le rap du vigneron des Rappes

    Le rap de Patricia et Gérald Besse

    Si tu n'y vois rien c'est que t'as la vue qui baisse

    Fais gaffe que ton pied ne dérape

    Hume ton verre et laisse-toi emporter

    Par le nez du Fendant de Champortay

    ...

    Comme je n'ai jamais fréquenté l'Ecole du Micro d'Argent

    Je ferais peut-être mieux d'en rester là les gens

    La dégustation ne me fait pas peur

    Mais je n'ai pas l'étoffe d'un rappeur

    Arrêtons-là la musique

    Mettons le hola au hip-hop

    Revenons à des commentaires plus classiques

    Pour des vins qui goûtent au top

    ...

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    Hum hum... Après cet intermède musical digne de NTM, revenons aux choses sérieuses et saluons la recherche sur les terroirs pratiquée au domaine Besse ainsi que tout le travail à la vigne. D'ailleurs Gérald Besse s'y trouvait au moment même où nous arrivions, confiant notre découverte de sa cave à Patricia son épouse, elle-même très impliquée dans la gestion du domaine. Après une visite des installations, suivie de considérations sur la vigne, le vin, le raisin et sur l'art d'une manière générale, nous sommes allés nourrir les animaux avant de nous abreuver personnellement.

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    - Fendant Champortay 2007: du gras, sous-tendu par une pointe de carbonique. Belle alliance de la tension et de la richesse, pour un équilibre global plutôt élégant.

    - Fendant de Martigny Les Bans 2007: fleur de vigne et pierre à fusil, fruité et minéral, droit et tendu, malgré une pointe de sucrosité finale.

    - Johannisberg Martigny 2007: réservé et peu expressif, il garde une certaine vivacité malgré la malo faite. Un vin qui ne me parle malheureusement pas beaucoup, je réserve mon jugement.

    - Petite Arvine 2007: sans malo, celle-ci. Des agrumes et de l'amertume qui apporte la fraicheur, malgré la richesse de constitution. 14,8° d'alcool parfaitement fondus, une belle petite arvine parfaitement sèche.

    - Ermitage 2006: riche et puissant, un peu marqué par le bois, sur des arômes de pêche et de noix de coco. La finale a gardé un peu de résiduel, qui se dilue dans la puissance.

    - Gamay Champortay 2007: nez épicé et fumé, fraicheur acidulée en bouche.

    - Pinot Noir Les Serpentines 2006: boisé fin, discret, pinote joliment, bouche charnue et concentrée, élégant et fin. Un très beau Pinot Noir.

    - Syrah Les Serpentines 2006: nez boisé, matière dense et serrée, de la fraicheur et de l'acidité, finale chaleureuse. Demande du temps. Le millésime 2005, dégusté en 1/2 bouteille à la maison, est également un peu marqué par le bois. Les tanins sont compacts et la matière plutôt riche. A attendre aussi.

    ...

    C'est le rap du vigneron des Rappes

    Le rap de Patricia et Gérald Besse

    Si tu n'y vois rien c'est que t'as la vue qui baisse

    ...

     

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    Olif'n, membre du collectif de rap VTV (Vide Ton Verre)

     

     

     

     

  • Bande-annonce: La Belle et l'Abbet

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    "Octodurus : qui vicus positus in valle non magna ADJECTA PLANITIE altissimis montibus
    undique continetur. Quum hic in duas partes flumine divideretur.”

    Après s'être gavé de Côtes du Jura dans le Sud-Revermont en compagnie de Fanfan Ganevat, le preux Olif a mis le cap à l'Est, direction un "bourg, assis dans une petite plaine au fond d'un vallon et entièrement entouré de montagnes très élevées", afin de goûter aux joies du cor des Alpes en compagnie d'une belle paire de bouilles, celles de deux éminents représentants de la Bloglouglou, l'un spécialisé en vins confédérés, l'autre maniant la pipette avec dextérité.

    Point de vieux château, dans cette histoire, mais des caves remplies de barriques et renfermant de divins secrets. Un conte de fées n'ayant duré qu'une journée, avec dans le rôle de la Belle, Patricia Besse, qui nous a fort gentiment accueillis au domaine familial des Rappes, sur les hauteurs de Martigny, avant que nous ne gagnions l'antre de l'Abbet, Christophe de son prénom, au cœur de Martigny-Bourg. Difficile de s'arracher des oubliettes de la cave et de ne pas être hanté par ces breuvages iconoclastes qui s'épanouissent encore en barrique après tant d'années. Des vins à déconseiller aux âmes sensibles et aux ardents défenseurs de l'œnologiquement correct. Pardonne-leur, Mon Dieu, ils ne savent pas ce qu'ils perdent!

    De l'émotion, du suspense, du rire, des larmes, des monstres à roulettes, de la musique des cités , des coups de pipette, de l'art moderne et puis du vin, aussi, un peu. Tout cela, à venir  plus en détail sur Le Blog d'Olif dans les jours prochains. Une exclusivité partagée avec mes copains blogueurs qui ne devraient pas hésiter à donner leur propre version des faits!

    Olif

  • La vie est belle à Vinéa!

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    A chaud, quasiment en direct-live, quelques impressions sur Vinéa 2008, une oasis au milieu des pluies torrentielles qui se sont abattues toute la journée sur le reste du territoire franco-suisse, à l'Ouest de la Dranse, et qui frappaient à la porte à Martigny lorsque je fis le chemin en sens inverse.

    A Sierre, ce ne fut que déluge de fendants, de petites arvines et autres cornalins. Une journée chargée, qu'il fallait aborder de bonne heure, la foule étant au rendez-vous. L'avantage du salon en plein air, quand il ne pleut pas, c'est l'air et l'espace, l'absence de sentiment d'oppression pour déguster sereinement. Moments d'échanges conviviaux avec les vignerons, bien connus pour certains d'entre eux, plaisir de déguster côte à côte, par pure coïncidence, avec le "Grand Jacques" du GJE.

    Au rayon des grandes satisfactions, essentiellement des confirmations. Superbe gamme et quasi sans-faute chez Jean-Claude Favre, de Sélection Excelsus, et Romain Papilloud, du Vieux Moulin. Mention particulière à la Petite Arvine 2007 et au Cornalin 2007, chez les deux vignerons, à une toute nouvelle cuvée de Marsanne 2006 et à un assemblage rouge barriqué chez Jean-Claude Favre, ainsi qu'à la Syrah 2007 et à l'Ermitage Volupté 2005 chez Romain. Superbes Syrah et Cornalin 2006 chez Denis Mercier, très beau Cornalin 2007 chez Marie-Bernard Gillioz.

    Déception chez Simon Maye, dont le peu de vin restant à la vente se goûtaient très mal, servis un peu chauds de surcroît, et chez Fabienne Cottagnoud, avec des vins ultraboisés et indigestes, hormis une superbe Amigne flétrie 2006.

    Perplexité chez Cédric Flaction, de la Cave des Cailles, où, en compagnie du grand spécialiste en Vins-Confédérés de la Bloglouglou, nous avons été très bien reçus et avons pu goûter à toute la gamme. Habillage et élevage luxueux, souci et volonté de perfection, mais au final, des vins très technologiques qui, même bien faits, paraissent déshabités et sans âme. Dans la gamme des Vins de table haut de gamme, signature de l'œnologue séduisante sur le papier, seul Lo Grafion, tire son épingle du jeu par son originalité (assemblage de Merlot valaisan et de Tempranillo espagnol) mais peut difficilement être qualifié de "vin de terroir". Le blanc Torpâ ("brûlé par le soleil") l'a été également par la barrique et Lo Terôn (liquoreux à base de paîen et de Marsanne), à force de vouloir s'écarter de la voie tracée par les grands valaisans de cette famille, y perd son harmonie et finit sucraillon. Dommage! Seule un jolie Humagne rouge 2006 trouvera grâce à mes yeux, du fait d'un fruit préservé et d'une certaine élégance.

    Et on se quitte avec Jean-Claude Favre, grâce à qui les arômes d'Eranthis 2005 ont poursuivi mes papilles jusqu'au parking, puis sur la route du retour.

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    Vinéa se poursuit encore aujourd'hui, dimanche 7 septembre. Peut-être qu'il reste encore un ou deux trucs à goûter!

    Olif

  • One zi Abérode eugaine...

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    Abérode, suivant la manière dont on l'orthographie, est un nom qui interpelle aussi bien le beatlemaniaque, aimant venir ensemble sous le soleil vouloir quelque chose dans un jardin de pieuvre parce que le ciel est bleu et que sa majesté est une jolie belle fille, que l'ambremaniaque, aimant goûter l'air du temps l'un dans l'autre à propos d'ailes. Abbey Road, la rue qui passe devant le célèbre studio londonien, est virtuellement fermée depuis pas mal de temps, pour cause d'enterrements, Abbet Road*, la rue principale du vieux bourg de Martigny (VS), qui conduit au nirvana chez Christophe Abbet, est fermée pour travaux, en cette fin d'après-midi pluvio-orageuse d'août 2007. Les passages piétons ont disparu comme par enchantement, les piétons aussi, qui courent s'abriter entre deux éclaircies, et aucune Coccinelle n'est garée sur le trottoir, puisqu'ils sont en réfection. Le caveau de Christophe, situé au coeur de cette rue également mythique, est peut-être moins réputé que la fondation Giannada, qui accueille Chagall jusqu'au mois de novembre, mais on y trouve néanmoins de l'art vinique à tous les étages.

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    Venir déguster ici en compagnie de Christophe est un plaisir toujours renouvelé, tant sa conception du vin, que l'on pourrait qualifier de marginale en Valais, trouve sa justification à son contact. Intuitif, attentif à ce que les vins ont envie de lui dire en cours d'élevage, il est capable de fulgurations à l'origine de vins hors normes, qui restent parmi les plus belles "claques" que je me suis prises en matière de découverte! Et cette nouvelle rencontre n'allait pas être en reste! On the Abbet Road again...

    Arvine 2005
    Au nez, salinité marquée, avec une petite note terpénique, type riesling, et des agrumes confits, écorce d'orange amère. La bouche est bien ciselée, ronde en attaque, onctueuse, puis droite, avec une fort belle acidité. Une petite pointe de résiduel parfaitement intégrée, du fait de quelques raisins botrytisés, témoins de la richesse du millésime.

    L'air du temps 2001
    Un OVNI produit par Christophe, dont le 1999 reste encore gravé dans ma mémoire. Derrière une petite note lactique, le nez embaume le cake sortant du four. Un cake anglais, avec des raisins macérés, du fait d'une petite odeur de rhum. Un assemblage d'Ermitage (marsanne), de Chardonnay et de Pinot blanc élevé longuement sur un mode oxydatif. On y trouve à la fois de la finesse, de la longueur et de la puissance. Un vin hors normes, méditatif, à boire pour lui même. L'accord avec un mets ne semble pas évident à trouver!

    Décembre 1998, mis en bouteilles le 10/02/2007
    De l'arvine et de l'ermitage, restées dans un fût de 60 litres pendant 9 ans. 30 litres à la mise, soit 67 bouteilles de 50 cl, une expérience unique, irrationnelle, inoubliable. Nez de malt, un peu sherry. Attaque sèche, qui s'enrobe progressivement, laissant s'exprimer l'alcool, pour donner la sensation d'un vin muté, ce qu'il n'est pas. Longueur exponentielle pour un vin digestif! On n'avait pas fini de méditer sur le vin précédent qu'on est reparti pour un tour, encore plus long!

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    Gamay de Fully Vieilles Vignes 2005
    Très poivré et épicé, il emplit la bouche, laissant une sensation rafraîchissante malgré la jolie concentration. Intéressant de le comparer avec le Gamay 2005 de la Combe des Avasiers, plus fruité, moins épicé, possédant une belle vivacité. Une vigne nouvellement exploitée, pas si vieille que la précedente, mais pas toute jeune non plus.

    L'un dans l'autre 2005
    Assemblage Syrah-Gamay, faits pour aller l'un dans l'autre et dans cette cuvée assez riche en 2005, légèrement marquée par l'alcool.

    Cornalin 2006
    Un joli fruit porté par une pointe d'acidité volatile. Du coup, les tanins sont adorablement croquants et une belle fraîcheur vient souligner la jolie matière de cette nouveauté abbetienne.

    A propos d'ailes 2005
    Un échantillon prélevé sur fût, ce qui donne un premier nez légèrement boisé. Concentré et charnu, avec de la fraîcheur, c'est un Gamay particulièrement charpenté, mais dans lequel je ne retrouve pas l'originalité et la structure "vintage" du 2003, que lui procurait son caractère surmaturé.

    Syrah 2005, tirée du fût
    Nez réglissé, frais, avec beaucoup de fruit. Bouche volumineuse, riche et concentrée.

    Humagne 2005
    Un "beau voyage" , comme dit Christophe, que cette humagne en dentelles, souple, fluide, fruitée, délicate et élégante. Un joli fond de verre chocolaté vient compléter une aromatique de petits fruits rouges, d'humus et d'écorce d'arbre.

    Ambre 2001
    Ambre! Un nom qui fait désormais rêver l'amateur de vins liquoreux valaisans, l'amateur de vins liquoreux tout court, l'amateur de vins encore plus tout court! Cette dernière version est légèrement différente, plus classique que les précédentes, peut-être, car moins oxydative. Toujours aussi riche et onctueuse, sur les fruits jaunes et les agrumes, les fruits de la passion, elle possède une structure opulente et grasse, soulignée par une acidité exemplaire. Séductrice en diable, sa gourmandise n'incite pas à la raison!

    "On the Abbet Road again, again..."

    Olif

    * Merci à Valais_006 à qui j'ai emprunté  à son insu l'excellent jeu de mots sur Abbey road (il peut venir le récupérer quand  bon lui semble), à Marcel Gotlib, pour son Hamster Jovial, dont le ton et l'anglais approximatif ont légèrement inspiré ce billet, et aux SImpsons, qui ont bien voulu poser sur le célèbre passage piétons, et dont l'image, apparemment libre de droits, a été trouvée sur internet.

     

  • Christophe Abbet, artiste vigneron éleveur, Martigny (VS)

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    M-art-igny, Valais, au pied du Grand Saint-Bern-art, ville d’art-chéologie, de pin-art et d’art tout court.

    La fondation Pierre Gianadda accueille cet été les chefs d‘œuvre de la peinture européenne du Metropolitan Museum of Art de New-York, tandis que Christophe Abbet, artiste vigneron éleveur,  expose ses œuvres en permanence à Martigny-Bourg.

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    Quelques douelles de tonneaux usagés, et hop!, une ambiance ethnique dans le caveau! Quelques grains de Gamay artistiquement vinifiés, et hop!, une bouteille d‘A Propos d‘ailes!. A l’étiquette joliment calligraphiée. Et il y en a plein d’autres, dans ce style-là! Des œuvres au bon goût de raisin, qu’on peut toucher et goûter, totalement dédiées au vivant. Des œuvres pour ainsi dire slurpiques, comme dirait l’esthète Helvète Estèbe, qui ne perd pas une occasion d’égarer ses notes de dégustation lorsqu’il s’intéresse à l’art vinique.  Charité bien ordonnée commençant par moi-même, je n’ai pas retrouvé son calepin, mais le mien, que je m’empresse de déchiffrer, là, tout de suite, maintenant.



    Petite Arvine 2004

    Une petite arvine sèche, mais avec néanmoins un poil de sucre, vraisemblablement très peu, pas volontaire mais témoignant de la grande maturité de raisin, et qui, malgré tout, reste tendue grâce à sa grande acidité. Ne serait-ce pas cela qui permettrait le vieillissement harmonieux du cépage, comme le suppute Christophe Abbet? L’équilibre me ravit, superposable à celui d’un noble riesling alsacien.

    Gamay de Fully Vieilles Vignes 2004

    Que voilà un beau Gamay bien gouleyant, frais, épicé, réglissé, soyeux, charnu et d’une grande buvabilité.

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    L’un dans l’autre 2004
    Robe soutenue, nez épicé, légèrement lactique, avec un petit côté syrah marqué. Tanins un peu serrés, mais de la fraîcheur et du croquant, de par une acidité végétale friande. 50% Gamay, 50% Syrah, à y bien réfléchir, on retrouve l’apport des deux cépages.

    Piège 2004
    Nez original, floral et fruité. Un vin plaisir, avec de l’acidité, de la fraîcheur et de la gourmandise plein les yeux! C'est du Gamay!

    Humagne rouge 2004
    Nez très baroque, sur le cassis, le cassissier, le cuir et la fourrure. Assez typique de l’humagne, finalement, animal, fruité et végétal. La robe est plutôt claire, rubis, malgré une longue macération. Une humagne rouge très réussie, expressive et goûtue

    Syrah 2004
    Noir, c’est noir! Olive noire, cerise noire, tapenade, le tout se fondant dans une belle structure acidulée et fraîche. Ça joue!

    A Propos d’Ailes 2003
    Un Gamay surmaturé récidiviste, après une première expérience en 2000! Une récidive, mais différente. Nez sur le poivre de Séchouan, le bois exotique, la griotte. Pas trop cuit, ni trop surmaturé, de l’originalité, de l’élégance, un vin d’une grande séduction!

    L’air du Temps 1999
    La robe dore légèrement, c’est dans l’air du temps! Le nez est d’emblée puissant, sur les épices, les fruits secs, la pomme à cidre. Un style indéniablement oxydatif, même si la volonté n’est pas de faire un succédané de vin jaune, contrairement à ce qui a été dit dans la presse. La bouche est riche, la finale tonique, la longueur conséquente. Petite arvine et Marsanne (+ une petite « touchette » de Chardonnay) en élevage long, sans ouillage.  En accompagnement de quelques fromages et charcuteries valaisannes, préparées par Christophe pour l’occasion, c’est le top!

    « Je ne sais pas si vous estimez que c’est de la chance, mais j’ai plusieurs millésimes d’Ambre au frais, du fait d’une verticale prévue! »

    Il faut croire que c’en est une, de chance! Pas moins de 6 millésimes à déguster, dont un collector, pas (encore?) commercialisé. Ambre, un vin sans concession, qui commence à se tailler une solide réputation dans l’univers des vins liquoreux. Marsanne et Petite Arvine en proportion variable selon les millésimes, suivant la qualité de la vendange, l’évolution des fûts et l’inspiration de Christophe, à la recherche perpétuelle du "caractère intime et mystérieux, sans âge," des vins liquoreux. « Ah! Mon Dieu! Mon Dieu! » s’extasiait-il le nez dans le verre en humant de l’Ambre en direct live, sous les caméras de la TSR et le regard mutin d’Annick Jeanmairet. Je confirme! Ah! Mon Dieu! Mon Dieu!

    Ambre 1998
    Un vin qui n’avait pas jusqu’à présent trouvé grâce aux yeux de son géniteur, et qui attendait là, tout seul, dans son fût, perdu au fond de la cave. Battant sa coulpe et se jurant de finir par plaire! La durée de l’élevage, un élément déterminant dans l’expression du vin! A l’origine du style légèrement oxydatif de l’Ambre, particulièrement marqué ici: fruits secs, café, notes de torréfaction. La liqueur est très riche et onctueuse, mais non dénuée de fraîcheur. Les pièces du puzzle se mettent en place!

    Ambre 1999
    La robe est ambre, presque acajou. Un millésime d’une grande richesse: 9° d’alcool, 285 g de sucre résiduel, une densité et une concentration hors du commun, mais avec de l’acidité, qui tient le vin dans la durée et la fraîcheur, sur des notes d’abricot confit!

    Ambre 2004
    Encore embryonnaire, il s’exprime sur un fruité primaire à base d’ananas, d’agrumes confits. Pas encore complètement fini, il présente encore beaucoup d’acidité volatile et à peine de gaz en finale (léger picotement de la langue). La vivacité de l’arvine!

    Ambre 2003
    Nez plutôt original, fumé, sur le thé vert. Ultra liquoreux, il possède de la vivacité et de la fraîcheur, indispensables pour digérer tout ce sucre. Toujours en cours d’élevage, évidemment!

    Ambre 2002
    Un vin « tensio-actif », le côté acidulé sur les zestes d’agrumes, prédominant à ce stade, qui voit co-exister la liqueur et l’acidité, non fusionnelles pour l’instant, mais pas complètement dissociées. Là encore, la poursuite de l’élevage est indispensable pour atteindre l’harmonie.

    Ambre 2001
    Nez « fini », sur les fruits secs, le thé fumé, et un boisé un peu perceptible. Un vin aérien, qui n’empâte pas la bouche, l’harmonie est presque atteinte, le caractère acidulé de l’arvine apportant fraîcheur et vivacité.

    Pour une chance, c’en était bien une!

    Christophe Abbet, Martigny, Valais, un nom (ou plutôt trois!) que tout amateur d’art se doit de retenir! Le randonneur également, si jamais l'envie lui prend d'user ses semelles dans le Valais viticole!

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    Olif

  • Verticale de Cornalin de Sierre par la face Nord

    Résumé des épisodes précédents:

    Après un excellent échauffement à grands coups de Petite Arvine et d'Amigne, la Patrouille du Vignoble affiche une forme olympique avant d'aborder verticalement le Cornalin de Denis Mercier.

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    Cornalin de Sierre 1996, Denis Mercier

    La robe est encore grenat soutenu, à peine tuilée sur les bords. Le premier nez, animal sauvage, tonifie et réveille. Il s’estompe vite à l’aération pour laisser la place à des notes plutôt tertiaires empyreumatiques torréfiées (moka). Encore pas mal de corps et une belle longueur pour un vin qu’il vaudrait mieux ne plus attendre trop longtemps en cave.

    Cornalin de Sierre 1995, Denis Mercier
    Là encore, la robe est relativement homogène. Le vin délivre encore beaucoup de fruit, un joli cassis assez pur, sur des notes de suie et de fumée. La bouche reste fraîche, acidulée, équilibrée. Un vin de demi-corps, bien tonique, à la finale un poil chaleureuse!

    Cornalin de Sierre 1999, Denis Mercier
    On poursuit la série des nonantes avec ce 99 à la robe grenat brillante, au nez fruité éclatant, cerise noire, mûre, cassis, avec du végétal croquant et une acidité fraîche dans le verre. Un vin d’une grande jeunesse!

    Cornalin de Sierre 1998, Denis Mercier
    Une robe pourpre violacée de cardinal sous laquelle il est vain de vouloir faire des découvertes. Dans une phase peu expressive, avec une bouche serrée mais bien structurée. Je ne le goûte pas très bien ce jour-là et je serais curieux de le revoir dans d'autres circonstances.

    Cornalin de Sierre 2000, Denis Mercier
    Robe presque violine. Un vin fruité, acidulé, frais, de bonne constitution, un peu moins harmonieux que celui qui va suivre et qui était servi en parallèle.

    Cornalin de Sierre 2001, Denis Mercier
    Robe burlat, nez intense de fruits frais, cassis, cerise noire, bouche bien stucturée, tannique. Un grand potentiel, qui donne envie de l'attendre quelques années.

    Une dégustation assez homogène. J’avoue ne pas être insensible à la patine des ans sur un vin de Cornalin (ce qui était loin de faire l’unanimité au sein de la patrouille), mais je ne pense pas qu’il faille se lancer dans la longue garde non plus. Entre 5 et 10 ans me semble actuellement un bon compromis.

    Nouveau dénivelé en vue, avec une verticale de Cayas, la Syrah emblématique de la maison Germanier Bon Père, qui nous a dépêché un excellent guide, en la personne de Gilles Besse, l’un des deux œnologues de la maison.

    A suivre...

    Olif

  • La Patrouille du Vignoble à l’assaut du Valais

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    Le Valais, une impressionnante collection de sommets alpins dépassant 4000 mètres d’altitude, mais pas celui qui est sur la photo! Situés au fond de longues vallées parallèles et transversales à la Vallée du Rhône, ils ont pour nom Grand-Combin (alt. 4'314m), Dent-Blanche (alt. 4'356m), Bishorn (alt. 4'159m), Cervin (alt. 4'478m) ou encore Mont-Rose (alt. 4'634m). Un Mont-Rose largement supérieur au cru de Saint-Estèphe, même lorsque ce dernier prétend atteindre des sommets comme en 2003, soit dit en passant!

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    Le Valais, une impressionnante collection de cépages, cultivés au fond de la vallée ou à flanc de coteaux. Une haute vallée du Rhône qui jouit d’un ensoleillement exceptionnel et d’un micro-climat qui voit pousser des abricotiers au pied des neiges éternelles!

    Lorsque la Patrouille du Vignoble a posé son barda à l’Oenothèque de Leytron, sur les coups de 15 heures en ce samedi 29 avril 2006, elle ne connaissait encore rien du programme de l’après-midi. Elle ne savait pas qu’elle allait avoir à affronter deux verticales censées la conduire vers les sommets. Une double verticale, parsemée de quelques fragments d’horizontales, une manière d’avoir une approche globale des vins de la région, à la manière de l‘ascension d‘un 4000. Non exhaustive, mais abordable sous différents angles. Judicieux! Et pas besoin de s’encorder!

    Et on poursuit évidemment par des blancs, pour se refaire la virginité du palais après les superbes Marsannes dégustées chez Marie-Thérèse Chappaz.

    Petite Arvine 2004, René Favre & fils
    Robe claire, nez salin, avec des notes d’agrumes et l’amertume qui va avec. Un vin minéral, avec une finale iodée sur les amers. Manque d’un peu de séduction à ce stade, même si on ne peut lui reprocher son caractère archétypique.

    Petite Arvine 2001, Sélection Excelsus, Jean-Claude Favre

    La robe dore franchement! Les années supplémentaires se font sentir au niveau de la couleur! Le nez est mûr, riche, sur les agrumes, beurrant presque un petit peu. Une expression inhabituelle de la petite arvine, riche, presque à tendance oxydative, mais j’ai surtout le sentiment d’une belle maturité de fruits. J’aime plutôt bien.

    Petite Arvine 1998, Germanier Bon Père
    Une cuvée élevée en barrique, au nez légèrement beurré et aux notes boisées encore présentes. La bouche est lisse et patinée, mais paradoxalement fluette et décharnée, courte, ne donnant le sentiment de tenir que par son ossature bois! La première Petite Arvine que j’ai eu l’occasion de découvrir, à Arvinis en 2001. Séquence nostalgie… Je pense qu’il est plus que grand temps de la boire! Je crains qu’il ne m’en reste une ou deux bouteilles à la cave!

    Petite Arvine 2001, barrique, Fabienne Cottagnoud
    Nez et bouche séduisantes, sur le tabac à pipe, l’écorce d’orange. De la patine, stimulée par une belle acidité et une longueur satisfaisante. Plutôt plaisant, même si l’on peut toujours s’interroger sur la nécessité de barriquer l’arvine.

    Petite Arvine 2000, Jean des Crêtes, Les fils Maye
    Le nez n’es pas désagréable, discrètement fruité. En bouche, ça se gâte un peu: sucre résiduel, du gaz, des amers dissociés, un équilibre improbable, caricature de ce qu’il vaudrait mieux ne pas réaliser avec la petite arvine!

    Amigne 2004, légèrement douce, Germanier Bon Père

    Fréquemment vinifiée « avec un petit sucre », l’amigne le supporte généralement bien. Il faut pour cela que l’équilibre soit aérien pour que ce petit résidu se transforme en volupté! Ici, j’aurais tendance à le trouver un peu lourdaud! Une Amigne pas totalement convaincante!

    Amigne 2001, Romain Papilloud

    Une version beaucoup plus satisfaisante qui a en outre l’opportunité de démontrer le potentiel de garde de l’amigne. A peine de sucre, de la minéralité, une bouche riche. Une amigne que je ferais volontiers mienne!

    Amigne 2001, Fût de chêne, Fabienne Cottagnoud

    Le nez est élégant et subtil, anisé. La patine de la bouche gomme superficiellement la présence d’un léger sucre, loin d’être prépondérant. Un vin séduisant qui interpelle également sur la mode du barriquage de l’amigne! Quand c’est bien fait, il serait dur d’aller contre!

    Arvine, Amigne, un large pan de l’identité valaisanne! Avec un troisième cépage, rouge celui-là, pas très facile à travailler aux dires des vignerons, mais dont il serait grandement dommageable de se priver! J’ai nommé Messire Cornalin, que nous allons aborder à la verticale, du côté de Sierre, au domaine Denis Mercier. Prenons une grande inspiration avant une petite remontée dans le temps!

    A suivre...

    Olif