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Hors les vignes, chronique de la fin d'une reconversion

2005-2025. Voilà vingt ans déjà qu'elle allait au charbon. Dans les vignes*, à la Carbonelle, la parcelle originelle. Deux décennies!  Pas grand chose à l'échelle de la vigne, mais un sacré bail professionnel, surtout quand il s'agit d'une deuxième vie, après un parcours journalistique. Pour Catherine Bernard, l'heure de la retraite a donc sonné. Le sécateur est désormais rangé, mais pas le stylo, qu'elle devrait encore continuer à manier pour pousser le monde viticole, entres autres, à la réflexion sur la bonne gestion de la crise qui le frappe et, peut-être, se forger ainsi un avenir.

Retour sur un parcours singulier et une assemblée générale au goût particulier.

 

*Titre de son premier ouvrage, paru aux Éditions du Rouergue

Initialement noyée au milieu d'un océan de chimie, du côté de Saint-Drézéry, la parcelle de la Carbonelle, acquise par Catherine Bernard en 2005, a déjà été arrachée, en vue d'une replantation en agro-foresterie, initiée par Nicolas Allain, le fils de Catherine. Un beau projet qui ne verra finalement pas le jour. Seuls subsistent cinquante ares de vieux marselans, plantés en 2000 et arrivés en fin de vie, obsolescence programmée des clones productifs. Ils ont servi à élaborer cette année un vermouth pour la soif, le dernier verre d'un condamné qui n'aura à avoir finalement aucun regret. Ce bout de vigne désormais historique devrait être mis en vente prochainement, en tant que terre nue, la décision ayant été actée par les membres du Groupement Foncier Agricole de la Carbonelle, lors de la dernière assemblée générale, GFA dont je fais partie depuis une dizaine d'années maintenant. La fière structure en palettes (affectueusement dénommée Château Palette) construite au Mas du Baron, aux allures de pagode japonaise , est louée depuis cette année à Paul-Émile Costa, jeune œnologue-conseil qui a déjà travaillé dans les domaines les plus réputés, en Rhône, Loire ou Bourgogne. Il a créé sa propre entité et ne devrait pas tarder à faire des vagues dans le landerneau viticole héraultais. Fort opportunément, il l'a d'ailleurs appelée La Grande Houle. L'atelier de distillation de la Thériaque, démarré en 2020 par Lana Labermeier, est également toujours installé sur le site du Mas du Baron et continue d'utiliser, entre autres, les différentes herbes aromatiques, fruits et essences issues du jardin extraordinaire entourant la cave, un autre beau projet expérimental dont l'avenir reste malheureusement incertain.

 

catherine bernard,la carbonelle,

La Carbonelle, clap de fin, certes, mais elle a de beaux restes. Et ce sera le thème du rituel apéritif post AG, une verticale courant sur une dizaine de millésimes de cette parcelle emblématique, des bouteilles retrouvées lors du déménagement de la cave. Manque une bouteille-mystère sur la photo, repêchée en dernière minute suite à un accident de bouchon sur le millésime 2015. Presque une chance, tant elle s'est avérée être exceptionnelle. Sans doute la meilleure de cette dégustation mémorable.

catherine bernard,la carbonelle,

Débutée par ordre croissant des millésimes, les plus vieux en premier, elle est quasiment allée crescendo. Les deux premières bouteilles, antérieures à 2011, mais non millésimées car en mention vin de table (sans même un petit code ou numéro de lot comme indice), présentaient un début d'évolution, mais furent néanmoins plutôt appréciées. Elles étaient effectivement loin d'être décaties. 2011 un peu strict (mais pas étriqué), 2012 magnifique (juvénile avec un fruit éclatant), 2013 un peu austère (mais toujours jeune), 2014 tonique et fringant, avant 2015, totalement bouchonné, donc. Le magnum  était un 2017, particulièrement remarquable lui aussi. La bouteille-mystère, sans étiquette, aurait pu rester complètement mystérieuse. Rien ne permettait de l'identifier, même pour Catherine Bernard. Quelques indices, néanmoins. Elle était antérieure à une inondation survenue à la cave, au début des années 2010. En bouche, de surprenantes notes d'agrumes, de pamplemousse, une fraîcheur exceptionnelle et un fruit toujours bien présent, avec une structure encore sans faille et un joli acidulé. "Un poulsard du Jura!", se sont exclamés en chœur plusieurs participant·es. Autant dire un cinsault du Languedoc, alors. Et, obligatoirement, un 2009, le seul millésime où ce cépage, tellement magnifique à la récolte, n'a pas été assemblé et a été embouteillé à part. Pas d'autre proposition envisageable. Bingo! Encore plus perspicaces que l'équipe de France championne de dégustation, les membres du GFA de la Carbonelle.

catherine bernard,la carbonelle,

Même si l'avenir du GFA est désormais incertain, cette AG ne sera certainement pas la dernière. De futures belles agapes en perspective, ce qui, pour les associé·es reste un événement précieux, convivial et primordial, à ne manquer sous aucun prétexte.

 

P.S.: l'un des derniers projets de Catherine, avant de cesser son activité de vigneronne, était de reprendre une parcelle de vieux terrets pour les vinifier et les sauver de l'arrachage. Parce qu'elle aime le blanc, parce qu'elle aime la vigne, parce qu'elle accorde beaucoup de valeur au patrimoine ampélographique. Sauver les terrets, c'est toujours possible (Des racines et du vin, une association de sauvegarde des cépages patrimoniaux a repris le projet), et il ne faut pas se priver de le faire en cliquant sur le lien.

 

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