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  • Le Priorato en diagonale

    Date: le 27/04/2003 à 21:09

    Pas vraiment une horizontale, ni une verticale, un peu des deux mais plus que cela encore ! Magnifique dégustation des vins du Priorat au salon Arvinis à Morges (CH), en compagnie d'Eric Duret, meilleur sommelier d'Europe en 1998 avec, dans le même temps, découverte de cette région d'Espagne et consécration de sa grandeur, tout ça en 2 bonnes heures qui sont passées très vite.

    Après une présentation d'ordre général par Eric Duret, meilleur sommelier d'Europe en 1998 (je l'aurais pas déjà écrit quelque part, ça ?), nous passons aux choses sérieuses. De 7 vins initialement prévus, la dégustation est passée à 11, avec un fameux bonus ! On ne va pas s'en plaindre !
    Les vins sont servis dans des verres INAO estampillés Arvinis et ont été longuement aérés au préalable. Nous ne les dégustons pas à l'aveugle et ils sont présentés et commentés au fur et à mesure, dans un souci didactique, je suppose.

    Roquers de Porrera 99 : grenache et carignan.
    Robe grenat foncé, brillante sur les bords du disque. Beau nez fruité et réglissé, frais. En bouche, on est sur les fruits noirs avec un peu de verdeur dans les tanins, une grosse mâche en finale mais un vin qui sait rester frais. 14° qui passent inaperçus. Un peu massif mais une bonne introduction au Priorat avec ce vin d'entrée de gamme (35 FS quand même).

    Clos Les Fites 2000 : 2ème vin de Comte Pirenne. Grenache, carignan et cabernet sauvignon (20%).
    Le nez est sur les fruits rouges et noirs avec une touche végétale (eucalyptus). Souple et fruité en bouche, les tanins sont plutôt fins et élégants. Moins extrait que le précédent, il est plus frais que le précédent même si je le trouve un peu trop souple à mon goût. Un style différent du précédent, que l'on retrouvera plus tard chez son grand frère. 20 FS.

    Clos Manyetes 99 : grenache, carignan et syrah (20%). Un vin vinifié pour le compte d'un de ses amis par René Barbier, un des « pères » de l'appellation avec son Clos Mogador.
    Robe sombre, presque opaque. Nez sur les fruits noirs, cassis surtout. Tanins fins et soyeux, beaucoup de classe et d'élégance même si on perçoit un peu plus l'alcool (14,5°) que dans les vins précédents. Note réglissée légèrement amère en finale que je rattachais personnellement au carignan mais qu' Eric Duret (meilleur sommelier d'Europe en 98 si vous ne le savez pas encore) rapporte au terroir fait d'ardoises et de schistes. Très beau vin qui me plaît énormément. 35 FS.

    Cims de Porrera 99 : 70% carignan, 30% grenache.
    Robe opaque. Nez sur la liqueur de fruits noirs, cassis, réglisse, témoignant d'après Eric Duret (meilleur... Bon, j'arrête !) d'une extrême maturité du carignan. Bouche ample, profonde, puissante, intense. Longue finale rémanente sur une légère amertume. Magnifique !

    Comte Pirenne 2000 :grenache, carignan, cabernet sauvignon (20%).
    Nez légèrement réglissé, un peu boisé, sur la liqueur de mûres. Les tanins sont polissés, d'une agréable souplesse, tout en développant un beau volume. Un style que je trouve un peu plus international. Est-ce dû à la présence du cabernet sauvignon ?

    Clos Martinet 2000 : grenache, syrah, carignan (15%).
    Le nez développe un fruité légèrement mûr, qu'Eric Duret (...) rattache à des notes oxydatives de poire blette. D'une grande élégance en bouche, avec une texture veloutée qui tapisse le palais (du velours, Averroes, du velours !). Sensation de chaleur réconfortante en fin de bouche. Très beau vin mais le nez me gêne tout de même un petit peu. Une hypothèse a été avancée par qui vous savez pour expliquer ce léger défaut, l'attribuant aux fûts, peut-être d'origine américaine.

    Vall Llach 2000 : carignan, merlot, cabernet sauvignon.
    Le nez est plus réservé, toujours sur les fruits noirs mais la présence du boisé est plus perceptible. Les tanins sont marqués, c'est un vin extrait, puissant et boisé, d'un style radicalement différent des précédents, peut-être un peu formaté pour le palais de notre ami Bob. Je suis un peu moins convaincu! Tout en reconnaissant que l'on n'a pas affaire à un petit calibre.

    Clos Mogador 2000 : carignan minoritaire (seulement 10 %), grenache et cabernet sauvignon à proportions égales, 20% de syrah. On retrouve pourtant les arômes caractéristiques de liqueur de mûres. Les tanins sont civilisés et élégants, la texture est soyeuse. C'est un vin chaud et frais en même temps, équilibré dans la puissance, affichant un style un peu nouveau pour le domaine d'après les connaisseurs, notamment qui vous savez. C'est en tout cas un très beau vin.

    Après les zigzags et l'horizontale, nous partons cette fois-ci à  la verticale descendante !

    Clos Mogador 1999 : pas de syrah dans ce millésime, à la différence de 2000, et je le trouve plus marqué carignan. Plus puissant de ce fait, il arbore une finale également légèrement plus amère. Très beau vin aussi, il est pourtant très différent du 2000, se rapprochant un peu plus de Cims de Porrera du même millésime.

    Clos Mogador 96 : la robe commence à montrer de très légères notes d'évolution. Le nez est un peu plus animal, avec des notes de cuir et de sous-bois. Les tanins sont très ronds mais le vin reste puissant et chaleureux. Longue finale réglissée. On peut préférer les expressions plus jeunes de ce cru mais il ne montre cependant aucun signe de déclin.

    Clos Mogador 91 : un des premiers millésimes du cru. La robe est tuilée mais encore relativement sombre. Le nez développe des arômes tertiaires de sous-bois, de champignon et de cuir. Je le trouve fondu, harmonieux et caressant mais la finale est un peu alcooleuse. Ce vin a été carafé depuis la veille sinon il se serait révélé extrêmement dur dans ses tanins, ce qui est tout de même un peu étonnant. Vin intéressant de par l'aperçu qu'il donne sur l'évolution du style de la propriété depuis ses débuts. On peut néanmoins lui préférer les millésimes plus récents.

    Fin de ce passionnant voyage en Catalogne. On peut simplement regretter que ces vins, produits en quantités très limitées, soient aussi chers et aussi difficiles à se procurer.
    Je ne suis pas complètement convaincu de l'apport des cépages bordelais, notamment le merlot, qui risque d'avoir un peu de mal à s'exprimer du fait des conditions climatiques particulières peu adaptées à son bon développement, mais pourquoi pas !

    Le plus grand vin de cette dégustation fut pour moi Cims de Porrera 99, suivi de près par Clos Mogador 99 et 2000. Clos Martinet est à mettre un cran en dessous du fait du manque de netteté arômatique de son nez, même si sa texture est presque parfaite, Vall Llach ne m'a pas vraiment emballé.
    Le Clos Manyetes, de par son prix relativement attractif, est à inscrire au registre découverte. Je ne suis pas sûr qu'il soit facile à trouver pour autant !

    Voilà , il s'agissait pour moi d'une réelle découverte et j'espère avoir l'occasion de boire à  nouveau ces vins un jour.

    Olif

  • Vosne-Romanée, force et finesse!

    Date: le 01/05/2003 à 10:21

    Opposition totale de style, hier soir dans la cave du Bon Echanson à Pontarlier, pour une joute amicale entre deux domaines de Vosne-Romanée. Deux expressions d'un (quasi) même terroir à des lieues l'une de l'autre.

    A ma gauche, le domaine Mongeard-Mugneret, 25 ha, répartis sur 23 appellations, plutôt bien doté en grands crus ; à ma droite, le domaine Lamarche, 8 ha 68, de nombreux grands crus dont un en monopole.

    Les vins sont dégustés par paires, non à l'aveugle, sauf pour les grands crus, carafés à l'avance. Petit jeu (facile !) destiné à nous faire reconnaître le style du domaine après l'avoir apprécié sur un village, puis un premier cru.

    - Vosne-Romanée village 1998, domaine Lamarche : robe rubis brillante, sans trace d'évolution. Un vin concentré, massif avec des tanins serrés, témoins d'un boisé marqué, même si pas agressif, en train de s'harmoniser. Encore un peu austère à ce stade, il est doté d'une bonne allonge. Force et puissance, il devrait gagner à vieillir encore un peu.

    - Vosne-Romanée village 1998, domaine Mongeard-Mugneret : la robe est rubis légèrement tuilée. Le nez est très ouvert, épanoui, sur le fruit avec quelques notes de sous-bois. De demi-corps, mais avec une bonne longueur, c'est un vrai vin plaisir dont l'évolution relativement rapide peut surprendre par rapport au précédent. Finesse et élégance toutefois, même si je ne l'attendrais pas trop.

    - Vosne-Romanée 1er cru Les Suchots 1996, domaine Lamarche : nez puissant sur la sciure de bois un peu brûlée. Encore un vin massif, puissant, avec un gros volume en bouche et une certaine raideur des tanins. Le boisé devrait pouvoir se fondre dans cette énorme matière mais il faudra être patient.

    - Vosne-Romanée 1er cru Les Orveaux 1996, domaine Mongeard-Mugneret : le nez est ici tout en fruit, avec des notes florales (pivoine ?). Une belle trame acide procure de la longueur à ce vin qui s'exprime tout en finesse. De la dentelle, surtout comparé au précédent, dans un style souple et élégant.

    - Grands Echezeaux 2000, domaine Lamarche : nez puissant, un peu alcooleux, sur lequel viennent se greffer des notes boisées. Visiblement, une extraction poussée qui donne un vin puissant, dans un style démonstratif.

    - Grands Echezeaux 2000, domaine Mongeard-Mugneret : très fruit encore une fois, fraise, fraise des bois et épices, ce vin développe des tanins soyeux et caressants. Beaucoup d'ampleur, de longueur et de finesse qui laissent percer une légère minéralité du cru, qui ne demande qu'à s'exprimer. La relative souplesse de ce vin qui se laisse déjà très bien boire n'empêche pas qu'il ait encore un gros potentiel à révéler.

    - Grands Echezeaux 97, domaine Mongeard-Mugneret : histoire de clôturer en beauté, un grand cru dans un millésime plus ancien et entrant dans sa phase de maturité. Les fruits rouges s'expriment pleinement avec des notes de fumée, légèrement lardées. Beaucoup de race dans ce vin, toujours dans un registre très fin, et qui s'exprime pendant longtemps, longtemps, longtemps,... Un vin Duracell!

    S'il fallait résumer cette soirée, on pourrait dire qu'il s'agissait bien d'un match puissance contre finesse. Qui a gagné?
    Pour les amateurs de chiffres , on peut décréter le domaine Mongeard vainqueur par 4 vins dégustés contre 3 du domaine Lamarche.

    Olif

  • Chardonnays : Jura 2 - Reste du monde 0

    Date: le 25/04/2003 à 10:10

    Sans volonté de plagier la dégustation de DidierD, l'idée ayant germée de manière totalement indépendante, le GJP (Grand Jury Pontissalien, petite formation dissidente du Club des amis du Bon Echanson) s'est réuni en ce 24 avril pour une grande dégustation de chardonnays du monde, forcément non représentatifs de ce qui se fait dans chaque pays ou région, sans volonté non plus d'affirmer la suprématie de l'un ou l'autre (même si force est de constater que... ! winking smiley ), dans une gamme de prix allant de 10 à  30 euros.

    Pour ne pas être taxés de chauvinisme, tous les vins ont été dégustés à l'aveugle par série de 3, ce qui fait au total une dégustation de 9 bouteilles retenues sur les 13 proposées initialement.

    Espagne, Suisse, Australie, Argentine, Nouvelle-Zélande, Pays d'Oc, Bourgogne et Jura au menu, dans des millésimes s'échelonnant de 1998 à 2001 ; + une bouteille surprise, d'un millésime beaucoup plus ancien, qui s'est révélée véritablement ...surprenante !

    Je vous livre les commentaires et appréciations de dégustation à l'aveugle pour ménager un peu le suspense !

    - Vin n°1 : robe plutôt claire ; boisé outrancier au nez, vanille et noix de coco très prononcées. Bouche un peu exotique, sur les agrumes et les fruits de la passion, acidulée, avec un côté un peu artificiel. Longueur correcte dans un style très tape-à -l'oeil. Modérément apprécié de par son côté archi boisé un peu putassier.

    - Vin n°2 : robe jaune clair ; nez crayeux, arômes fruités artificiels rappelant un peu le désodorisant ( !) associés à des notes médicamenteuses et pharmaceutiques. Vif et acidulé, il est plutôt, pour ne pas dire franchement déplaisant.

    - Vin n°3 : robe jaune brillant ; le nez est de prime sur la réserve et s'intensifie progressivement à l'aération sur de belles notes briochées beurrées. Beaucoup d'intensité et de profondeur. Long, bien structuré, il séduit l'ensemble des dégustateurs car dans un style plus conforme à nos attentes en matière de chardonnay.

    - Vin n°4 : robe d'un bel or déjà vieilli ; nez beurré, caramel au lait, moka, très beau, racé. Bouche encore nerveuse, structurée par une belle acidité, contre balancée par une pointe de gras. Grande longueur avec rémanence des arômes de moka en finale. Il s'agit sans aucun doute de la bouteille surprise, beaucoup plus âgée, à son apogée et loin de décliner. Personne à ce stade, hormis moi, ne connaît la provenance ni l'âge de ce vin, mais tout le monde s'accorde pour dire que c'est très beau et très bon.

    - Vin n°5 : robe d'un beau jaune soutenu ; nez sur les agrumes et les fruits exotiques. Le boisé, bien que perceptible, est relativement bien intégré, non envahissant. Bouche ample, avec du gras, légèrement citronnée. Un vin très honnête, plutôt plaisant.

    - Vin n°6 : robe jaune clair ; nez peu expressif qui s'ouvre à l'aération sur des notes plutôt minérales (craie). Pas vraiment mauvais mais peu de personnalité, assez neutre.

    - Vin n°7 : robe très claire ; nez fruité, sur les agrumes, raisonnablement exubérant si je puis dire. Bouche ample, acidité bien équilibrée. Pas immensément profond mais tout à fait correct.

    - Vin n°8 : si la robe est jaune, le nez et la bouche, eux, sont verts ! Un concentré d'acide (citrique ?) qui entraîne chez moi une crispation de la mâchoire avec douleur en avant de l'oreille, phénomène maintenant bien connu sur LPV, à la limite de la buvabilité. Pouah !

    - Vin n°9 : robe jaune clair ; nez légèrement éthéré avec des notes de (dis)solvant ( ?), pas très net. Mal défini en bouche, un peu crayeux et déséquilibré. Pas terrible !

    Incontestablement, le n°4 et le n°3 sont les meilleurs vins de la dégustation (même si l'on peut mettre hors concours le n°4 du fait de son grand âge) et le n°8 le plus mauvais.

    Résultat des courses :

    - Vin n°1 : chardonnay Suisse 2000, Michel Ryser de Bonvillars. A noter que ce vin a obtenu la médaille d'or au concours des chardonnays du monde 2002 à Mâcon (je sais, ça ne veut pas dire grand chose !). De par ses arômes, on peut le qualifier de vin le plus « exotique » de la soirée ! Où est le terroir ?

    - Vin n°2 : vin de pays d'Oc 2001, Primo Palatum. Une cuvée apparemment ambitieuse et au final très décevante.

    - Vin n°3 : Arbois 98, Les Graviers, Stéphane Tissot. Le premier millésime de ce très beau chardonnay ouillé du Jura qui se bonifie au vieillissement. Superbe !

    - Vin n°4 : Arbois chardonnay 1969, vinifié par André Tissot, bouteille cadeau de Stéphane, dénichée dans la cave particulière du domaine, en vue de cette dégustation. L'aptitude au vieillissement de ce vin est réellement étonnante et confirme à mes yeux le réel potentiel de la région, apte à produire de très grands vins blancs. Aucune note oxydative dans ce vin, donc chardonnay vraisemblablement déjà ouillé.

    - Vin n°5 : Terrazas de Los Andes 2000, Tupungato, Mendoza, Argentine. Plutôt une bonne surprise, mais une bouteille pas vraiment donnée question prix. Sébastien H., qui nous lit régulièrement sans avoir franchi le pas de l'expression écrite sur le forum, le confirmera peut-être.

    - Vin n°6 : Clos Mont Blanc 2001, Conca de barbera, Espagne. Ce vin, qui ne m'avait pas déplu lorsque je l'ai dégusté seul il y a peu (cf rubrique Vins d'Europe), supporte mal la dégustation comparative. Honnête, sans plus.

    - Vin n°7 : Jacob's Creek 2001, Australie. Le candidat australien s'en sort plutôt bien en proposant un vin très agréable.

    - Vin n°8 : Cloudy Bay 2000, Nouvelle-Zélande. LA grosse déception de la soirée, un vin totalement indigne de son rang et de son prix (29 euros, c'était le plus onéreux !). J'ai conservé le fond de bouteille pour apprécier d'éventuelles améliorations à l'aération (je n'y crois pas !).

    - Vin n°9 : Chassagne-Montrachet 1er cru 1999, Marquis de Mac Mahon. Deuxième déception de la soirée avec ce blanc bourguignon d'un pourtant très bon millésime, qui se révèle très en dessous de ce que l'on pourrait en attendre.

    Cette dégustation totalement subjective appelle quelques commentaires :

    La grosse surprise - mais en est-ce vraiment une ? winking smiley ... c'est que les vins du Jura tirent très bien leur épingle du jeu parce qu'ils correspondent surtout à nos attentes en matière d'expression du chardonnay. Peut-être que mon palais est formaté pour ce type de vin, mais les autres dégustateurs présents ne sont pas particulièrement habitués aux chardonnays ouillés jurassiens.

    Ce qui est frappant, c'est la diversité des arômes développés par le chardonnay, qui reflète plus souvent à mon avis l'élevage que le terroir : notes beurrées, briochées, torréfiées qui sont de loin celles que je préfère, les plus conformes surtout lorsqu'elles s'expriment en profondeur, notes exotiques d'agrumes, souvent un peu artificielles, que j'ai, pour ma part, plus l'habitude de retrouver dans le sauvignon, notes minérales pas toujours très nettes qui dans le cas présent révélaient plutôt des défauts.

    A défaut d'avoir été une très grande dégustation, cette soirée fut donc très instructive en plus d'être éminemment sympathique. Vivement la prochaine, concrétisation d'un grand projet évoqué naguère, ici et ailleurs, la descente du Rhône en Syrah . Avec au programme de très grands vins même si aucun du Jura grinning smiley .

    Olif

    lapassionduvin.com

  • Petite visite au domaine Trapet, à Gevrey

    Date: le 26/03/2003 à 09:31

    Belle journée ensoleillée, hier, le temps idéal pour sillonner la route des grands crus. La vigne est bien ordonnée, propre, taillée très courte, petite coupe printanière oblige!
    En cette heure de midi, personne sur la route, ce qui me permet de circuler tranquillement sans perturber le traffic. Ce qui me frappe plus qu'à  l'ordinaire, peut-être parce que les ceps sont bien taillés, c'est le côté "mouchoir de poche" de ce vignoble. Quelques rangs de vigne et hop! On passe d'un grand cru à  un autre!
    Le but de ma visite, c'est de prendre livraison de ma réservation annuelle au domaine Jean et Jean-Louis Trapet. Un domaine auquel je suis fidèle depuis plusieurs années, y trouvant là  une belle expression du Gevrey-Chambertin et surtout de ses grands crus. Comme il n'est pas toujours facile de pénétrer au sein d'un domaine de Bourgogne, je préfère ne pas laisser ma place!

    Après une halte nourricière à  La Sommellerie, un très bon restaurant de Gevrey, où ce n'est, malheureusement pour eux, pas la foule des grands jours, je gagne le domaine, situé en bordure de la RN 74.
    Jean-Louis en déplacement à  l'étranger, je suis accueilli par les parents, Jean et Andrée. C'est Me Trapet mère qui est habituellement chargée de la dégustation et nous descendons les escaliers qui nous mènent à  la cave.
    C'est donc le millésime 2002, actuellement en fût, qui sera mis à l'épreuve de mes papilles. Me Trapet s'empare de la pipette (du nom d'un célèbre journal) et nous voici partis dans les travées.

    Gevrey Village: bien fruité, un côté un peu crémeux avec un boisé marqué.

    1er cru Petite Chapelle: un grain beaucoup plus fin, minéral et racé.

    1er cru Clos Prieur: un vin massif, aux tanins serrés, gros volume en bouche.

    Chapelle-Chambertin: habituellement le plus séducteur à  ce stade, il est en train de faire sa malo. Perle donc un peu mais beau fruité.

    Latricières-Chambertin: une matière énorme, très long en bouche.

    Chambertin: démarre aussi probablement sa FML car il perle légèrement. C'est toujours un réel bonheur de tremper ses lèvres dans le roi des vins, la définition étant déjà très nette malgré le léger perlant.

    Comme d'habitude, et ce, depuis plusieurs années, la gamme est très homogène, à  un très bon niveau qualitatif. Le millésime 2002 a produit des vins colorés et charpentés qu'il me tarde de découvrir à  un stade plus avancé. Dur, dur, le jugement des vins en primeur!

    Il ne me reste qu'à  charger le coffre avec mes 2000, les 2001 venant d'être mis en bouteilles et devant reposer jusqu'à  l'automne avant d'être commercialisés.

    Retour vers le Haut-Doubs en traversant une partie du vignoble jurassien vers Poligny, mais je suis raisonnable, je ne m'arrête pas! La prochaine fois!

    Olif

  • Sociando-Mallet, le plus classe des Bourgeois: la preuve par 9

    Date: le 14/02/2003 à 09:47

    On a donc déjà beaucoup parlé de Sociando-Mallet, un des plus fameux crus bourgeois actuels dont tout le monde estime le niveau à celui d'un bon 3ème cru classé et qui est capable sur certains millésimes d'égaler, voire de dépasser les plus grands, même si cela est contesté par les ardents défenseurs de la hiérarchie bordelaise archaïque (là , je prends ouvertement position !).
    Sociando tient une place particulière dans mon coeur car j'en ai fait depuis de nombreuses années mon cru fétiche (il en fallait un et je ne regrette absolument pas mon choix, même si nous sommes nombreux dans ce cas et notamment parmi mes amis qui ont emboîté le pas !) et je possède tous les millésimes depuis 1990. C'est pour cette raison que c'est également le vin du Bordelais que je connais le mieux pour l'avoir goûté, souvent plusieurs fois, dans bon nombre d'années, y compris le célèbre 82 dégusté récemment par ailleurs.

    D'un point de vue historique, on retrouve trace de cette propriété située à Saint-Seurin de Cadourne, à l'Ouest de Saint-Estèphe, depuis 1633, lorsqu'elle appartenait à sieur Sociando, qui lui a donné son nom pour moitié, jusqu'en 1850, date à laquelle Mme Mallet se porte acquéreur et y accole son nom pour donner naissance au château Sociando-Mallet que nous connaissons actuellement, même si la qualité n'était pas encore forcément au rendez-vous.
    De 1876 à 1969, cinq propriétaires se sont succédés, qui n'ont guère laissé de souvenirs, si ce n'est qu'ils ont eu la bonne idée de ne pas rajouter leur nom à celui du domaine, ce qui l'aurait considérablement alourdi !
    En 1969, la propriété compte 5 ha et n'a guère bonne réputation. Les vignes et les chais sont quasiment à l'abandon. C'est cette année-là que Jean Gautreau, négociant et ancien tennisman, à la réputation de dilettante, rachète cette propriété en bordure de la Gironde. Il n'aura de cesse alors de reconstituer un vignoble digne de ce nom, d'un seul tenant, et de l'agrandir, puis de rénover les chais et le cuvier.
    Sociando-Mallet commence alors véritablement à faire parler de lui au début des années 80 avec un millésime 82 considéré comme d'anthologie. Plusieurs bonnes années se succèdent, avec un 86 à la réputation flatteuse, un 87 très réussi malgré la petitesse du millésime, et un beau 89.
    Puis commence la décennie 90, objet de cette verticale, où la qualité des vins ne cesse d'augmenter, Sociando venant même titiller les plus grands. Jusqu'en 96, les prix en primeur étaient une véritable aubaine, on assiste depuis à un ajustement du fait de sa qualité et sa réputation, mais ceux-ci restent tout de même très raisonnables.

    C'est donc dans la cave du Bon Echanson, à Pontarlier, que nous nous sommes réunis pour une dégustation prometteuse. Les bouteilles ont été ouvertes dans l'après-midi par notre ami caviste, non carafées, et nous avons décidé de les déguster en semi-aveugle, deux par deux comme nous avons souvent l'habitude de le faire. Les millésimes dégustés ayant été dévoilés au fur et à mesure, la dernière bouteille a été découverte par tous les participants et ce fut bien la seule !
    Ambiance conviviale et bon enfant comme à notre habitude mais tout le monde a quand même bien écouté les commentaires et explications du maître de cérémonie. Nous avons donc à déguster 9 millésimes, à savoir 88, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96 et 97, servis dans un ordre connu du seul caviste.


    Premier service !

    Le premier vin présente une robe pourpre, légèrement trouble ; il nous semble âgé. Un nez d'abord fermé, qui s'ouvre sur du fruit mais qui y associe une pointe d'iode (de la Bétadine® pour les nombreuses personnes du milieu médical présentes dans l'assemblée). Un manque certain de longueur, avec une finale un peu courte (« il bloque devant et il n'y a plus rien derrière » souligne un des dégustateurs). Ce vin est toutefois très honnête et pas encore sur le déclin, ce qui est une petite gageure quand on connaît le millésime, en l'occurrence 92.

    Le deuxième vin révèle une belle robe grenat, sans trace d'évolution, avec un beau nez agréablement fondu, sur de fines touches de havane et un léger boisé. Les tanins sont fins et soyeux et libèrent à l'aération un cassis explosif et envoûtant. Souplesse, harmonie, équilibre ! Ce vin semble encore très jeune. Beaucoup (dont moi) le situent en 97. Surprise, c'est un 91, qui étonne réellement par sa fraîcheur et sa jeunesse.

    Deuxième service !

    Le troisième vin nous offre une robe grenat et un nez de moka, très torréfié, avec des nuances cacaotées, des tanins fins et serrés. Flatteur, fondu et agréable, il séduit la majorité des dégustateurs même s'il n'est pas d'une grande complexité. C'est un 93.

    La robe du quatrième vin est d'un grenat plus soutenu, presque opaque. On retrouve de nouveau au nez des nuances iodées qui troublent le fruité. Si la matière est dense, on peut lui reprocher un manque d'élégance et une certaine austérité avec de la sécheresse en finale. Il fait craindre à nombre de dégustateurs une évolution défavorable vers plus de sécheresse. La faute au millésime ? C'est un 94.

    Troisième service !

    Avec le cinquième vin, on arrive aux choses sérieuses ! Le nez est splendide, complexe, sur la boîte à cigares, le cèdre, le fumé. Il emplit les narines d'un parfum envahissant. La bouche est volumineuse avec une matière dense, noble, sur des tanins serrés et chatoyants, et présente une grande longueur. C'est un grand vin qui impressionne l'ensemble des dégustateurs. 95 ? 96 ? Eh non ! Enorme surprise, c'est le 97 ! Un vin fabuleux qui démontre que, quel que soit le millésime, il est possible de faire bon si on veut s'en donner les moyens.

    Derrière ce 97 d'anthologie, le sixième vin nous semble un peu fluet, pas désagréable mais il souffre de la comparaison et ses arômes sont un peu écrasés par le précédent. Il semble plus âgé et, effectivement, c'est une relative déception : on était en droit d' attendre plus de choses du millésime 88 !

    Quatrième service !

    Il ne reste en principe que des grands, nous ne devrions pas être déçus. Le septième vin présente une robe sombre, presque noire, et s'ouvre sur un nez très torréfié, moka et cacao. Une matière très dense avec une acidité bien ressentie qui procure une immense longueur avec de la mâche en finale. Un vin juvénile, énorme et magnifique. Le plus grand jusqu'à présent et c'est le 95.

    Le huitième vin me semble être le petit frère du précédent, tout aussi beau sur le moka et le cacao, avec une matière que je trouve légèrement en retrait par rapport à 95, mais si peu ! On joue à présent dans un registre de haut niveau. Encore un vin très jeune et vous aurez deviné que l'on a affaire à 96. Impressionnant !

    Cinquième et dernier service !

    La neuvième bouteille, gardée pour la bonne bouche, même si on peut considérer que c'est une erreur de la servir en dernier, les papilles pouvant commencer à fatiguer, c'est le 90. J'avoue cependant que j'aime bien ce côté crescendo car on a l'impression de franchir des paliers et le vin que l'on goûte semble toujours supérieur au précédent. L'inverse ferait trop souffrir de la comparaison les vins moins puissants. La robe de ce 90 est encore opaque avec toutefois de légères nuances plus claires sur les bords du disque. Le nez est plein, fruité, torréfié, et, en bouche, la matière est impressionnante, volumineuse, avec une rondeur, que n'ont pas encore les millésimes plus jeunes, qui tapisse et caresse le palais à l'infini. Admirable !

    S'il faut hiérarchiser, mon classement personnel sera donc le suivant : 90, 95, 96, 97, 91, 93, 94, 92, 88. Mais tous les millésimes obtiennent sans problème la moyenne.

    On termine la dégustation par un petit dessert, une excellente tarte aux pommes de Mme l'échansonne, accompagné d'un petit café, et c'est le retour (à pied !) à la maison, par un petit moins 10°C qui vivifie et maintient les sens en éveil. Un grand moment vient de se terminer et je dois avouer que les verticales des crus bordelais nous ont toujours procuré une immense satisfaction, même si, personnellement et actuellement, je suis plus enclin à découvrir d'autres appellations. La magie de Bordeaux fonctionne toujours ! Et Sociando-Mallet est un très grand vin, d'une régularité exemplaire !

    Olif

    lapassionduvin.com

  • De la transhumance des huîtres...

    Date: le 12/12/2002 à 13:26

    Chaque année, phénomène immuable, lorsque les feuilles commencent à se ramasser à la pelle, ce coquillage pierreux empoigne son bâton de pèlerin et quitte son parc ostréicole, fuyant la traditionnelle marée noire de Noël, pour gagner les blancs pâturages de la montagne et s'épanouir en liberté, petit caillou sur le chemin.

    Son long périple est pourtant semé d'embûches et notre brave coquillage va devoir affronter une foule de dangers ; son pire ennemi est un prédateur redoutable : l'homme des montagnes, en carence iodée perpétuelle, qui a découvert, après des siècles passés à se lester l'estomac, que l'intérieur du caillou était mou et plus facile à digérer lorsqu'il était ingurgité seul.
    Un peu désemparées par le froid, on retrouve nos amies les huîtres en bande, souvent devant les vitrines du poissonnier, lorsqu'elles ont cru reconnaître un ancien ami poisson qui leur rappelle alors cruellement leur pays natal. C'est là qu'on peut les cueillir facilement à la main, par douzaines, ayant seulement à faire face à la vindicte de notre Ordralfabétix montagnard, fort heureusement non gavé de potion magique.

    C'est au moment précis où elles ouvrent le bec pour appeler au secours qu'il faut leur briser net la mâchoire, d'un coup sec, pour s'en régaler en s'abreuvant de vin blanc.

    A ce stade du récit, le lecteur de LPV se demande certainement si je n'ai pas pété un câble ! Il n'a pas entièrement tort! Alors, après ce préambule naturaliste et poétique, rentrons enfin dans le vif du sujet.

    C'était hier soir la traditionnelle soirée huîtres de l'association des amis du Bon Echanson. Soirée très conviviale, plutôt festive, où nous avons l'habitude de tester les meilleurs vins blancs destinés à accompagner ce mets simple, mais royal pour de pauvres jurassiens sevrés d'embruns.

    La séance de l'ouverture est un grand moment réservé aux gens armés d'un bon couteau et sachant s'en servir. Les huîtres sélectionnées chaque année sont des spéciales n°3 de chez Gillardeau, célèbre ostréiculteur de Charente, le top de l'huître ! Le salaire de l'ouvreur, en plus de quelques chapeaux d'huîtres prélevés par ci par là , c'est un petit verre de vin, en l'occurrence un Château Haut-Bertinerie 1999, petit Graves blanc frais et fruité, vif et gouleyant, bien sympathique.

    Passons enfin aux choses sérieuses :

    - Montagny 1er cru 2000, Château de la Saule : une appellation fort méconnue et un vin à  la robe très claire, vif, minéral, parfait sur les huîtres.

    - Riesling Bennwihr 2000, Jean-Michel Deiss : une erreur de casting ! C'est un très beau riesling mais la présence de sucres résiduels le place hors-sujet sur les huîtres!

    - Ménetou-Salon Morogues 2000, H. Pellé : un sauvignon archétypique qui se plaît bien également avec les coquillages. Bonne vivacité.

    - Saumur 2000, domaine Langlois-Château : assemblage 80% chenin, 20% chardonnay. Nez discret de pomme, un modèle de structure minérale, un vin long et très sec. Mérite de vieillir et n'est pas trop à sa place sur les huîtres du fait de son caractère excessivement sec, à la limite de la dureté.

    - Clos Floridène 1998 : un nez typé de sauvignon, très pipi de chat, déroute les dégustateurs ! Inhabituel pour un Graves, je trouve. Mais ce nez s'estompe rapidement pour s'ouvrir sur les agrumes. La structure en bouche est belle, onctueuse, longue. Le boisé est à peine perceptible. Mérite de vieillir un peu pour s'harmoniser et perdre ses notes variétales de sauvignon. A mon avis, la plus belle bouteille de la soirée. J'ai un faible pour les vins de Graves sur les huîtres, à la condition que ces dernières soient plutôt charnues et pas trop iodées.

    - Château Bouscassé 1998, Pacherenc sec : un vin un peu austère, acide, peut-être passé. M'a très peu inspiré hier soir !

    - Auxey-Duresses 1999, Comte Armand : ah ! ça sent bon la Bourgogne et le chardonnay ! Des notes beurrées en attaque (pas de polémique, s'il vous plaît !), peut-être trop pour un Auxey car elles masquent la minéralité du terroir, étant vraisemblablement apportées uniquement par l'élevage. Un vin controversé même si très flatteur et plutôt agréable. Ce côté un peu beurré convient bien à ces huîtres spéciales qui développent elles-mêmes des arômes de noisette (on y revient toujours, au beurre et à la noisette !)

    - Château Reynon 2000, Cadillac : une gâterie pour terminer et accompagner le dessert. Un beau liquoreux vinifié par Denis Dubourdieu , extrêmement agréable, restant très frais en bouche.

    Voilà , fin de la soirée ! Les plus courageux se sont octroyés un petit digestif, j'ai préféré faire l'impasse ! Cela ne m'a visiblement pas empêché de délirer un peu ce matin!

    Ostréicolement vôtre,

    Olif

    lapassionduvin.com

  • Jura : des terroirs multiples pour un goût unique ?

    Date: le 15/12/2002 à 11:13

    La question de la typicité jurassienne me taraude depuis quelque temps : typicité de terroir ou typicité de goût ?

    Je l'ai déjà souvent évoquée au fil de mes messages, à travers les dégustations que j'ai effectuées mais j'ai voulu « enquêter » de façon plus approfondie dans le but de tenter de répondre aux questions que je me pose, et, éventuellement de vous faire profiter de quelques éléments de réponse.

    Y'a-t'il un ou plusieurs terroirs jurassiens ?
    Y'a-t'il une unicité du goût en Jura ?


    Les relativement récentes cuvées parcellaires ouillées de S. Tissot, A. Labet, et d'autres encore, tendent à prouver qu'on peut sortir du sempiternel goût de jaune, fer de lance de la culture viticole jurassienne. Mon propos n'est pas de parler de ce produit phare du Jura, mais force est de constater que bon nombre de cuvées de blancs élaborées sur un mode oxydatif aboutissent à une uniformisation du goût, qui plaît tant aux autochtones mais qui rebute un peu l'amateur non initié, même si cela peut constituer une bonne introduction au monde du vin jaune.

    Pour illustrer mon propos, après un petit rappel géologique bienvenu, y compris pour moi, je me suis amusé à voir si l'on peut dégager quelques caractéristiques liées au terroir à travers un échantillonnage (non représentatif !) de chardonnays issus de différents terroirs jurassiens.


    Petit rappel géologique :

    Le vignoble jurassien est planté sur une bande qui court de Salins les Bains à Saint Amour (pas celui du Beaujolais !), englobant une surface de 1700 ha sur environ 80 km de long.
    De Saint Amour, au sud du Jura, à Lons le Saunier, les vignes occupent le bas des pentes du Revermont, avec une exposition générale ouest, parfois sud ou sud-ouest. Le terrain est constitué d'éboulis calcaires mêlés à des argiles du Lias, formant d'excellentes terres à vignes, pierreuses et chaudes, facilitant la maturité du raisin, qui peut devancer d'une dizaine de jours celle du nord du département. De nombreux petits villages vignerons, en appellation Côtes du Jura, constituent le vignoble ; Rotalier est peut-être le plus connu, c'est la patrie d'Alain Labet.

    Vers Lons, le vignoble s'élargit, l'orientation est extrêmement variée. Le sol est composé de marnes bleues, grises ou noires du Lias. Ce sont des terres riches, profondes et fraîches qui donnent les vins de l'appellation L'Etoile et ceux d'Arlay, en Côtes du Jura.

    Plus au nord, , de Voiteur à Poligny, le vignoble est planté sur des argiles du Lias donnant naissance aux vins de Château Chalon. Les blancs sont toujours en appellation Côtes du Jura.

    De Poligny à Arbois, les coteaux sont constitués de marnes irisées, argileuses et compactes . Des bancs calcaires ou des éboulis pierreux s'y mêlent, sur Arbois, Pupillin ou Montigny, pour fournir les meilleures terres à vigne du Jura, exposées sud.

    Le chardonnay et le pinot noir se plaisent à peu près partout. Le ploussard exige des marnes bleues et rouges, le trousseau donne son meilleur sur les sols filtrants, calcaires (ceux de Montigny, par exemple), le savagnin se régale sur les marnes bleues, de Château Chalon entre autres.

    Voilà , ces quelques notions de base peuvent permettre de comprendre les différentes appellations jurassiennes et la répartition des cépages. On devrait donc pouvoir mettre en évidence des différences gustatives entre les vins provenant des différents terroirs. Ce sera l'objet de la deuxième partie de mon exposé, à venir, peut-être avant Noël si j'en ai le temps.

    Références bibliographiques : « Vins, vignes et vignobles du Jura », éditions Cêtre.


    Les travaux pratiques
    Date: le 10/01/2003 à 11:54

    Pour essayer d'illustrer mon propos, j'ai sélectionné, de façon totalement aléatoire, 6 vins de chardonnay provenant de 6 régions distinctes géologiquement (1 côtes du Jura du Sud Revermont d'A. Labet, 1 vin de l'Etoile, 1 côtes du Jura du secteur de Château Chalon, 1 côtes du Jura de la région de Poligny, 1 Arbois Pupillin, 1 Arbois), ceci afin de voir s'il est possible de déterminer des caractéristiques différentes suivant le terroir. Cette « étude » se veut juste un instantané totalement subjectif et je revendique cette subjectivité.

    - Côtes du Jura 98, domaine Morel-Thibaut, Poligny :

    Robe jaune pâle, nez discrètement oxydatif sur l'écale de noix. La bouche est bien équilibrée avec une pointe de gras en finale. Le côté oxydatif ne ressort que très légèrement et ne masque pas les qualités intrinsèques du vin, très peu minéral, issu en théorie d'un terroir marneux.

    - Arbois Pupillin 98, Paul Benoit :

    Robe jaune pâle. Nez floral, aucune note oxydative. Je ressens une plus grande minéralité en bouche que sur le vin précédent. Bonne nervosité et finale sur des notes légèrement briochées. Un beau chardonnay, subtilement équilibré.

    - L'étoile 99, château de Persanges :

    La robe varie peu par rapport aux précédents. Le nez est sur la réserve à l'ouverture, avec quelques notes d'herbes coupées, puis évolue franchement sur la noix à l'aération. un vin assez sec en bouche, à la limite de l'austérité, qui termine sur des notes oxydatives assez marquées. Difficile de percevoir la part du terroir dans ce vin que l'on pourra par contre trouver très typé Jura.

    - Côtes du Jura 97, Caveau des Byards, Le Vernois (secteur Château Chalon) :

    Le nez est frais, légèrement acidulé, sur des notes de cake au citron. La bouche est vive, agréable et bien équilibrée. Aucune trace d'oxydation dans ce vin dont le terroir laisse bien s'exprimer le cépage, à mon avis, car il me semble correspondre à ce qu'on peut attendre d'un vin de chardonnay.

    - Arbois 98 élevé en fût de chêne, fruitière vinicole de Pupillin :

    Nez légèrement floral et citronné. Une bonne structure acide confère de la longueur au vin. L'élevage en fût n'est pas trop perçu, harmonieusement fondu, et fait que ce vin tout à fait honnête privilégie l'expression du cépage à travers le terroir.

    - Côtes du Jura 99, Alain Labet, Rotalier :

    Une cuvée standard du vigneron « star » du Sud Revermont et un élevage oxydatif qui saute au nez. à‡a sent la noix fraîche à une lieue à la ronde mais pour un palais jurassien, ce n'est pas forcément désagréable. La structure de ce vin me semble tout à fait apte à « digérer » cette élevage qui ne permet par contre en aucun cas d'identifier le cépage ou le terroir.

    Voilà pour la partie gustative ! Ce qui, bien évidemment, ne me permet de tirer aucune conclusion, si ce n'est que les vins élevés dans le respect du cépage sont des vins de chardonnay plus universels que les autres, plus marqués par un régionalisme qui recherche l'association avec la cuisine franc-comtoise et plus particulièrement celle avec du Comté. Difficiles à exporter, donc, et plutôt destinés à une consommation locale, autochtone ou touristique.

    Deuxième remarque qui me vient après cette dégustation, échelonnée sur plusieurs semaines, c'est le niveau tout à fait correct et homogène de ces vins qui restent dans une gamme de prix inférieure à 7 euros.

    Une véritable définition des terroirs se fera probablement d'elle-même, au fil du temps, lorsque l'élaboration de ces cuvées ouillées se généralisera.

    Olif

  • La Colombe de la vigne au verre...

        6/2/2002

    ... ou comment petit chasselas de Féchy deviendra grand.

    Dans le cadre de la semaine du goût helvétique, journées portes ouvertes au domaine La Colombe à Féchy dans le canton de Vaud. Portes ouvertes, ce n'est pas difficile car le soleil plombe sur les rives du Léman en ce samedi 2 juin 2002.

    A peine arrivé au domaine, je suis embarqué dans un charter en direction du "Petit Clos" pour une présentation du sol et du sous-sol.
    Là -bas nous attend Raymond Paccot pour un petit cours de géologie appliquée. L'homme est chaleureux, passionné, et son exposé très clair et intéressant (il paraît que c'est un ancien instituteur!). Un trou d'1m50 de profondeur en bordure de quelques pieds de vigne nous fait office de travaux pratiques: comment peut-on amener la vigne à laisser s'exprimer le terroir?
    Le retour à une culture raisonnée, étape indispensable avant de passer en biodynamie, comprendre le sous-sol, permet de mieux gérer la qualité du raisin, donc celle du vin. Quelque soit la nature du terrain (graves, argile, calcaire,...), une constante semble se dégager: le drainage naturel du sous-sol qui permet à la vigne de toujours trouver de l'eau en profondeur, juste ce qu'il faut, même et surtout si elle doit souffrir pour s'en procurer, va favoriser l'éclosion des beaux terroirs.
    Si Raymond Paccot procède ainsi dans son domaine, il s'investit aussi au niveau cantonal dans des études de terrain pour établir une véritable cartographie des meilleurs terroirs vaudois.

    Vu des coteaux, le Léman luit sous le soleil, au pied des sommets alpins encore enneigés. Il commence à  faire soif!

    Ca tombe bien, passage au caveau pour une dégustation du millésime 2001. Un chasselas La Colombe, véritable vin de soif, frais et gouleyant, fait office de rafraichissement et de mise en bouche.
    Suivent:
    - le Petit Clos dont nous avons pu apprécier le terroir, à la robe très claire, presque limpide, au nez très floral, vif, avec un léger perlant.
    - En Bayel, au nez plus complexe, très minéral, au goût de pierre à fusil marqué, un vin issu d'un très beau terroir et récompensé il y a peu par la coupe suisse du meilleur chasselas (ça ne s'invente pas!). Et c'était le 1er vin vaudois à recevoir cette distinction!
    -Le Brez, encore sur la réserve, avec une belle minéralité, à  attendre pour qu'il s'exprime.
    - un pinot noir sur le fruit, avec des notes un peu caramélisées et réglissées, déjà  très agréable.

    Les cuvées de réserve ne sont pas encore disponibles, même si j'avais pu en avoir un aperçu à Arvinis en avril dernier (j'ai donc publié mes notes de dégustation sur le millésime 2001 bien avant Parker et la Rvf!).

    Petit jeu avant le départ: un concours de dégustation portant sur 5 millésimes du Petit Clos, à déterminer à l'aveugle sur les 10 dernières années. Reçu 3/5, presqu'un exploit pour un novice en chasselas! Je suis plutôt fier de moi et on m'offre une bouteille du dernier millésime! A noter dans la dégustation, un Petit Clos 92, à la robe ambrée et au nez superbe de pomme. Je ne savais pas que le chasselas pouvait vieillir autant et aussi bien!

    Nous sommes donc loin ici des "infâmes chasselas de Féchy" dont on parlait à une certaine époque. Violaine et Raymond Paccot sont un couple de vignerons fort sympatiques et La Colombe un fort beau domaine vaudois.

    Olif, envoyé spécial en territoire vaudois.

  • A6 sortie Beaune Sud

    Date: le 19/11/2002 à 12:01

    Première partie: Thierry Matrot, l'épure murisaltienne

    Une sortie d'autoroute à  ne pas manquer car elle vous mène tout droit du côté de Meursault et de Pommard.

    C'est par une belle journée ensoleillée que j'ai été convié par mon ami caviste du Bon Echanson à rendre visite à 2 de ses fournisseurs en côte de Beaune, à savoir le domaine Matrot à Meursault et le domaine du Comte Armand à Pommard.
    Voyage à 2 voitures pour des raisons d'horaires de départ incompatibles ; toujours à l'heure, comme à mon habitude, j'arrive à 11h pétantes (au lieu de 10h30) chez Thierry Matrot, juste pour être accueilli le verre à la main et descendre à la cave, dans un dédale de fûts et de bouteilles.
    Mise en bouche sympathique avec un Saint-Romain 2001 que Thierry expérimente à partir de l'achat de raisins en vue d'une diversification de la production. Visiblement, les situations ne sont jamais simples en Bourgogne. Th. Matrot n'est en fait que le gérant des vignes du domaine Joseph Matrot. Suite à une querelle familiale dans laquelle quelqu'un a récupéré ses billes, Thierry cherche à devenir plus indépendant et à vinifier sous son nom, ce qui l'oblige à diversifier sa production du fait de son statut de négociant. La conversation est animée, Thierry est un vigneron comme je les aime, franc et sympathique. En quelques mots, il vous dresse le portrait d'un vin et la correspondance avec son terroir. La vigne, la terre et le terroir seront d'ailleurs des termes qui reviendront souvent car c'est ce qu'il cherche avant tout à exprimer, comme tout bon vigneron qui se respecte (« Va d'abord dans les vignes pour comprendre avant de ramener ta science à la cuverie » lui a dit en substance son père alors qu'il rentrait au domaine, frais émoulu du lycée de Beaune).

    Pendant que nous conversions, nous nous humections la bouche avec quelques petites choses que je vous livre pêle-mêle, de mémoire :

    - d'abord ce Saint-Romain blanc, nerveux et très agréable

    - puis un Auxey-Duresses blanc 2001, vif, tendu, minéral

    - Meursault 2001 : très jeune, bien sûr, mais déjà  très expressif, d'une grande pureté

    - Meursault 99 : un peu plus de gras et de complexité, un grand millésime

    - Meursault-Blagny 2001 et 98 : un premier cru fétiche du domaine car produit en relativement grande quantité qui permet un suivi précis de l'évolution des vins (de très vieux millésimes sont ouverts dans les repas de famille). Le 2001 exprime parfaitement la minéralité du terroir et le 98 m'impressionne beaucoup par sa profondeur et son gras qui se révèle.

    - Blagny la pièce sous le bois 2001 : un rouge que j'aime beaucoup (superbe 95 actuellement), à la robe framboisée, étincelante ; en bouche, le vin est dense, long, les tanins sont fins et serrés. Une vraie gourmandise à boire sur son fruit mais un bon potentiel de vieillissement.

    - Volnay Santenots 2001 : la robe et le nez sont plus profonds, des notes un peu terreuses, évoquant le cuir de Russie. Un vin ample, de grande garde.

    Il est 12 heures 30, le temps a passé vite, il est temps de quitter Thierry Matrot, un fort sympathique et excellent vigneron murisaltien, dont les vins sont sincères et proches du terroir.
    Nous filons en direction de Beaune pour une petite collation aux Caves Madeleine, un Wine Bar au cadre et à l'accueil soignés. Juste un verre de Meursault de Louis Chavy pour accompagner le repas, le premier verre avalé de la journée ! Je revis !

    Deuxième partie : Domaine du Comte Armand, au coeur de l'aristocratie bourguignonne

    Aussitôt le repas ingurgité, nous repartons en direction de Pommard chez le Comte Armand où nous attend Benjamin Leroux, le régisseur du domaine, et nous descendons illico à la cave pour une belle dégustation au milieu des fûts. Très jeune, Benjamin semble avoir déjà beaucoup d'expérience. Cela fait 4 ans maintenant qu'il a repris en main les vins du domaine suite au départ de Pascal Marchand pour le domaine de la Vougeraie, les vins de prestige de chez Boisset.

    Nous commençons la dégustation par quelques blancs et notamment un Saint-Romain et un Auxey-Duresses, qui semblent donc être les nouveaux terrains d'investigation des vignerons bourguignons lassés de ne produire que des Pommard ou des Meursault smiling smiley ,et surtout à la recherche d'une gamme de bons vins à prix intéressants. Il peut s'agir ici d'un achat de raisins sur pied, avec suivi complet de la vigne, ou encore de vignes en fermage, permettant là encore le contrôle total de la production, de l'entretien du terrain à la vinification, condition sine qua non car le domaine est en biodynamie.
    Ici encore, on parlera beaucoup terroir, travail à  la vigne, maîtrise des rendements.

    - Bourgogne blanc 2001 : simple mais impeccable pour se refaire le palais

    - Saint-Romain 2001 : vif, minéral, de l'allonge

    - Auxey-Duresses blanc 2001 : encore un vin minéral, tendu, exprimant de façon assez caractéristique son terroir (ce n'est pas moi qui le dit !)

    - Auxey-Duresses rouge 2001 : fruité, droit, de la longueur

    - Auxey-Duresses 1er cru rouge 2001 : on gagne en complexité. Un vin plutôt strict mais au fruité magnifique, charnu, avec une belle mâche en finale. Superbe !

    - Volnay 2001 : un vin de vinificateur d'après Benjamin, car nécessitant quelques artifices pour compenser les imperfections de la nature (mauvaises conditions de récolte, je crois). Il restera encore quelque temps en fût et nécessitera un collage.

    - Pommard 2001 Le clos des Epeneaux : le 1er cru maison, en monopole, une parcelle située entre les grands et les petits Epenots. Les raisins sont vinifiés séparément suivant l'âge des vignes. Nous commençons par goûter les jeunes vignes (20 ans d'âge) , récoltées en influence lunaire « fruit » ; le vin est effectivement très fruité, déjà flatteur. Ces fûts ne seront très certainement pas intégrés à l'assemblage final et commercialisés en appellation village (les années précédentes, vendus au négoce). Les vignes de 30 ans montrent plus de concentration ; la prise de bois est magnifique, laissant s'exprimer le fruit, les tanins sont fins et serrés. Les vignes de 40-50 ans, récoltées en influence « racine » nous font encore monter d'un cran et gagner en concentration, avec un côté très pur, et les vignes de 70 ans expriment un fruité intense et complexe, magistralement soutenu par le bois. L'apothéose, c'est l'assemblage à la pipette (du nom d'une fameuse revue vendéenne smiling smiley ) des 3 dernières cuvées dégustées, donnant une petite idée de ce que sera le probable Clos des Epeneaux 2001 : l'alchimie du vin ! une impression difficile à décrire ! chaque fût pris séparément aurait donné un très bon vin mais l'assemblage des 3 produit un vin étonnamment différent (quoique très proche), plus complexe, plus grand, et donne un sentiment de plénitude, d'accomplissement, non ressenti auparavant. C'est magique et c'est très bon ! une véritable naissance sous nos yeux et dans nos verres !

    Benjamin est visiblement fier de sa production en 2001 ; c'est un vin qui exprime pour lui le terroir des Epeneaux de façon magistrale mais qui sera peut-être plus difficile d'accès que le monumental 99 ou le médiatique 2000. Toutes les conditions sont réunies pour que 2002 soit également très grand. Pour conclure la dégustation, nous testons une version spéciale du Clos des Epeneaux 2000, vinifiée avec adjonction de CO2, et qui donne un vin très confituré avec une pointe de gaz (on se croirait chez le Dom !) et un Volnay Frémiets 2000, très pur et concentré.

    Un moment passionnant vient de se terminer et nous quittons Benjamin à  regret.

    Le soleil automnal brille toujours sur les vignes bourguignonnes et c'est l'heure de se diriger vers l'A6 entrée Beaune Sud et de faire le chemin inverse, sortie Poligny dans le vignoble jurassien, puis direction Pontarlier. De nouvelles visites en Bourgogne sont déjà au programme de l'année prochaine. Vivement !

    Olif