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Pélissols, la ruée vers l'Orb...

Bédarieux, haute vallée de l'Orb. L'Orb, fleuve impétueux niché dans les hauts cantons de l'Hérault, qui déborde à l'occasion, à grands coups d'épisodes cévenols répétés. De ceux qui gorgent la terre, remplissent les vallées et infiltrent les caves, comme en 2014. L'Orb, dont le débit a attiré les chercheurs, puis les tanneurs, et les vignerons, enfin, un peu. Des coopérateurs, exclusivement, pendant longtemps. Monsieur Bonnal père, né au domaine où son propre père travaillait alors comme ouvrier agricole, le rachète en 1976, réalisant ainsi son vieux rêve. Cette même année naissait Vincent, son fils, désormais au commande de Pélissols. Tout un symbole... 

Depuis qu'il a repris les rênes du domaine, en 2012, Vincent ne roule pas sur l'Orb. Ou alors bientôt. Sinon, juste un peu, lorsqu'il franchit le pont submersible, sans parapet, qui conduit à la propriété désormais familiale, qui couple chambres d'hôtes et domaine viticole. Une ancienne tannerie, qui possède de magnifiques caves voûtées de plein pied. Monsieur Bonnal père, longtemps actif dans la coopérative locale, a bien œuvré pour le potentiel qualitatif du vin de la haute vallée. Pas toujours bien compris en son temps, il fut l'un des artisans de l'implantation locale du chardonnay, qui, sur les terroirs d'altitude de Bédarieux, donne naissance à de jolis blancs floraux. Ce coup d'essai fût néanmoins son propre coup de grâce coopérateur. Il fut l'un des premiers à quitter la coopérative dans les années 90, suite à une succession de différends avec ses collègues. Et, par le fait, l'un des premiers à vinifier en cave particulière dans les hauts cantons, donnant l'exemple à bien d'autres par la suite. 

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Avant de revenir à ses racines et de succéder à son frère, chargé pendant plus de 20 ans de la gestion du domaine, Vincent Bonnal a pas mal bourlingué. Et emprunté bon nombre de chemins de traverses. Formé à la pétrochimie dans un premier temps. C'est dire si c'est du lourd. Tombé dans un cul de basse Fos (sur mer), même logé à Carry le Rouet, il plaque tout du jour en lendemain, à la veille de signer un CDI. Sa vie, évidemment, ça ne pouvait pas être ça. Passé par une formation viti-œno à Toulouse, puis par Londres, pour y apprendre l'anglais, et par le Chili pour y faire un peu de vin, il se retrouve quasiment du jour au lendemain à Pékin pour faire la promo, le commerce et le marketing du vin bordelais. Après une excursion dans le vignoble chinois comme winemaker, où il se heurte un peu avec la discipline ouvrière. Et c'est la peau tannée par le soleil levant, qu'il décide de revenir au pays, dans l'ancienne tannerie familiale, en rapportant de bien jolis souvenirs de là-bas néanmoins. Bédarieux-Pékin-Bédarieux express. Ou presque.

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Et, s'il accepte de reprendre en main le domaine de Pélissols, c'est à ses conditions. Depuis qu'il a définitivement délaissé la pétrochimie, Vincent l'a prise en grippe. Conversion en bio et orientation nature, pour faire revivre des vignes sous perfusion. Pratique de l'enherbement total, avant de retravailler légèrement les sols, pour favoriser l'enracinement sans traumatiser les ceps. En à peine 4 ans, les résultats sont déjà probants. La vigne des hauts cantons, quand elle ne s'est pas implantée dans la vallée, en zone submersible, se retrouve majoritairement bien cachée sur le plateau, en rive droite de l'Orb. Vignoble d'altitude, nouveau marketing revendiqué, sur des terrasses parfois aussi désertées que celles des cafés du littoral languedocien en plein hiver. Parce que souvent non mécanisables et, de façon irrémédiable et malheureuse, totalement arrachées. Pourtant, la vigne y donne souvent le meilleur d'elle-même.

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Retour en cave pour la dégustation des cuvées disponibles. En compagnie de quelques charcutailles locales à se damner, en provenance d'Hérépian. Quatre vins, essentiellement. Un blanc, 70% muscat 30% chardonnay, particulièrement enjôleur. Un poil de résiduel, bien intégré, pour un vin à dominante muscat pas trop aromatique. Joli! Le rosé, retoqué par les instances, a été déclassé en "brosé". On lui a trouvé en gros tous les défauts de la terre: trop coloré, réduit, oxydé, poussiéreux... Un vin de France, produit anonymement dans la haute vallée de l'Orb. Et c'est sans doute pour ça qu'on l'aime. Le rouge se décline en deux versions: un grand vin, Pélissols, assemblage des meilleures barriques (fin et élégant comme un pur sang après l'entraînement à une course d'obstacles), et Luna Novéla, le second vin, dans une approche marketing façon bordelaise. Même si, finalement, ça n'a pas grand chose à voir. Un vin à part entière, juste une entrée de gamme plutôt séduisante.

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Et, enfin, dans une volonté de démarche artistique, en accord avec ses cheveux longs et son côté punk revendiqué, une cuvée 1fusée, élaborée avec un de ses potes musicos, emballée dans un papier tue-mouches sérigraphié, avec carte microSD incorporée entre la capsule et le bouchon. Des bruits enregistrés dans la cave et utilisés comme des beats pour rythmer les arrangements. Culturelle et conceptuelle, tirée à 76 exemplaires, à consommer avec un casque sur les oreilles, pour le plus grand bonheur des quelques privilégiés.

 

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À Bédarieux, comme d'habitude, tout finit par des canons. Chai Christine Cannac, évidemment, il ne fallait pas déroger à la tradition. "L'endroit que tout le monde voudrait avoir en bas de chez soi", d'après le guide Omnivore. "Mais ce n'est qu'à Bédarieux", et nulle part ailleurs.

 

P.S.: Pélissols, le secret le moins bien gardé des hauts cantons. On en parle déjà ici, , ou même encore . Ce n'est désormais plus un scoop, tant mieux pour Vincent Bonnal.

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