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  • 14 contours de syrah au creux du Van

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    Couvet, commune Val de Travers. Son hôpital, sa piscine et son ancienne tricoterie Dubied, transformée en chai du domaine de la Clavenière, tronche de Travers du vignoble Neuchâtelois. Depuis la fusion administrative, toutes les communes du Val de Travers, canton de Neuchâtel, s'appellent Val de Travers. Sauf deux, Les Verrières et La Côte aux Fées, qui continuent de voler de leurs propres ailes exécutives. Le 11 juillet 2013, 19 heures, plusieurs berlines arrivent à la Clavenière, en roulant au pas, tous feux éteints. Normal, il fait encore jour. Des individus s'en extirpent lestement et se dirigent, la mine patibulaire, vers le rez-de-chaussée du bâtiment. Normal, ils ont rendez-vous à la cave pour une dégustation à la gloire d'un des plus grands cépages rhodaniens. 14 syrahs du Valais, en 3 shots, sur 3 millésimes différents, avec pour dénominateur commun, un des maîtres à penser de nombre de vignerons et/ou œnologues helvètes.

     

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    Noiraigue, commune Val de Travers. Son Creux du Van et son gaz de schiste dont il serait temps de ne pas vouloir. Noiraigue, c'est l'un des sites jurassiens ayant reçu une autorisation de forage, avec Pontarlier et Les Moussières, côté français. Les Moussières, en plein cœur du Parc Naturel du Haut-Jura. On se demande à quoi ça sert d'être un haut-lieu naturel soit-disant protégé! Du côté de Neuchâtel, la résistance commence à s'organiser. Parce que venir polluer l'Areuse et l'absinthe pour émettre des gaz aussi délétères pour l'environnement qu'un mauvais pet foireux dans une atmosphère confinée, non merci!

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    Le 12 juillet à 10 heures, soit très précisément le lendemain du 11 juillet, plusieurs berlines se garent devant la caserne des pompiers de Noiraigue. Des individus s'en extirpent péniblement, pas tous très frais. Pour bien profiter du plus beau cirque jurassien du monde, où van (la falaise, en celtique) et vent (le vent, en français basique, voire même en romand de Suisse voisine) se mêlent, s'entremêlent et se confondent, il vaut mieux en faire le tour. Ce qui nécessite un moindre effort, que la plupart des automobilistes purs et durs n'auront jamais le bonheur de connaître, eux qui préfèrent la montée motorisée par la route jusqu'à la ferme du Soliat pour se repaître d'une bonne grosse fondue apte à combler leur petit creux, avant de jeter un œil morne et un rot fromager sur le Creux, sans avoir à fondre en grimpant le sentier dans la chaleur torride d'un été jurassien plutôt réussi. Montée dans le sens anti-horaire, via la ferme des Œillons et le sentier des 14 contours, descente par la ferme Robert et le sentier pentu du Single, où l'on ne se sent étrangement pas seul à avoir une âme de primate, tel est le menu habituel du randonneur du Creux du Van, sans se vanter.

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    14, oui, le chiffre est exact, compté, recompté, vérifié, par une foultitude de randonneurs. 14, oui, le chiffre est inexact, puisque compté, recompté, vérifié, par une poignée de dégustateurs. Il y eut finalement 15 syrahs, servies à l'aveugle en 4 flys de 5+5+4+1. 2010, 2005 et 2003. +1. Pièges et/ou pirates non exclus. Vins transvasés dans une bouteille anonyme depuis leur bouteille d'origine. Et c'est parti pour 14 contours de syrah, en quête d'un mythe mais aussi du simple plaisir de déguster, d'échanger, de commenter, de partager, une fois les dernières petites modalités du débriefing mises au point, non sans mal, d'ailleurs.

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    Mise en bouche: la montée est rude, jusqu'à la ferme des Œillons, au départ de Noiraigue. Dans le gourdon, mieux vaut un vin désaltérant et aérien, avec deux ailes. Par exemple, un Chasselas Le Brez 2012 de la Colombe, à la gloire de Raymond Paccot, chantre de la biodynamie et de la sélection parcellaire sur la Côte vaudoise.

     

     

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    1er contour: ça attaque fort, dès le franchissement des Œillons et la montée dans la forêt. Du gros calibre pour une syrah plutôt consensuelle qui ne le fut pas. Boisée, certes, mais d'un bois fin et élégant qui ne m'a pas gêné plus que cela, tant les tanins furent veloutés et frais, avant de se fondre dans une finale très syrah, d'une grande longueur et d'une exquise fraîcheur. Syrah 2010, Cave des Amandiers, Alexandre Délétraz.

     

    2ème contour: sortie du bois. Les framboisiers qui bordent le sentier ne sont pas encore chargés de fruits, cette syrah si. Un petit bonheur de fruits rouges entrelardés, sur des tanins croquants, salivants et rafraichissants. On en redemande, en ayant de surcroît un gros doute sur le géniteur. Bravo! Syrah 2010, Christophe Abbet.

     

    3ème contour: on plonge à nouveau dans la forêt. Les fruits se font discrets. Ce virage-là est plutôt raide et il faut s'accrocher. Acidité, dehors toute! C'est frais, forcément, acidulé, mais la finale se resserre sur les gencives, astringente et asséchante. Du jus, il y en a, sans doute à attendre. Si Joris su, Joris pas venu? Mais si, voyons. En l'état, c'est tout de même un peu duraille pour mon palais. Syrah Chamosite 2010, Didier Joris.

     

    4ème contour: bien accroché dans la pente, il s'agit maintenant de dérouler. Le nez est très beau, sur le caractère végétal de la syrah, bourré de fraîcheur et de notes de tapenande et d'olive noire. Une petite touche de bois ne vient même pas faire de l'ombre. En bouche, la matière en impose. Une belle grosse masse tannique acidulée qui sèche légèrement en finale, mais qui ne demande qu'un peu de temps pour se fondre. Un grand vin, pour plus tard. Syrah Quintessence 2010, Benoit Dorsaz.

     

    5ème contour: une difficulté superposable à la précédente. Ça syrahte plutôt joliment, sur un léger boisé toasté. Les tanins sont encore appuyés, mais s'enrobent déjà délicatement. Il y a la matière, l'acidulé, la fraîcheur. Ne manque juste qu'un peu de temps... Syrah Vieilles Vignes 2010, Simon Maye.

     

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    6ème contour: les lacets commencent à se resserrer, les vins aussi. On avance pourtant dans le temps, franchissant 5 années d'une traite. Une série qui m'apparaîtra un peu difficile, avec des vins au grand potentiel, mais dans une phase peu épanouie. De la violette, il y en a, pourtant, dans cette bouteille-là. C'est plutôt agréable, d'autant plus que la rétro est fruitée. Entre les deux, le vin est un peu compact et dense, comme replié sur lui-même. La finale laisse apparaître une pointe d'alcool. Globalement, c'est plutôt bien, mais pas à point. Didier, Didier! Oui. Syrah L'âme des Pierres 2005, Didier Joris.

     

    7ème contour: nouveau virage un peu sec, pour cette syrah aux étonnantes notes d'agrumes sur fond métallique, avec une touche de vernis à ongles. Les tanins sont un peu sévères, avec une acidité marquée. Il faudra lui donner une deuxième chance. Syrah 2005, Cave Le Bosset.

     

    8ème contour: le nez dans la pente, il faut continuer de grimper. Des notes de cerise, avec un petit côté noyau, pourtant, il ne s'agit pas de grenache. Et peut-être un premier nez réduit sur le caoutchouc brûlé ("il pneute!", pour certain d'entre nous). En bouche, les tanins sont marqués et finissent sur de l'amertume, ce qui induit un effet salivant bienvenu. Il y a du vin dans cette bouteille, mais c'est quand même un peu sévère! Syrah 2005, Denis Mercier.

     

    9ème contour: première sortie de route dans un virage, il fallait bien que ça arrive un jour. Nez sur la pomme blette matinée de liège et/ou de champignon, trahissant un défaut de bouchon. Là aussi, de la matière, mais des tanins durs et asséchants en bouche. De façon visiblement anormale. Pas de chance, il faudra y regoûter pour confirmer le problème ponctuel de bouteille. Grain Syrah 2005, Marie-Thérèse Chappaz.

     

    10ème contour: l'espoir renait au fur et à mesure que le ciel se rapproche. Sortie de la forêt de chêne, les framboisiers sauvages poussent à nouveau tout au long du chemin. Ça sent aussi la groseille, même s'il n'y en a pas. Le bois se fond. Les tanins acidulés sont d'une grande finesse, la finale fait bien saliver, malgré la petite pointe d'alcool bien présente et globalement toujours ressentie dans cette série, millésime oblige? Aucune impression de déjà vu/bu, pourtant... La deuxième chance de la Syrah 2005 de la Cave Le Bosset n'a pas mis longtemps à se concrétiser. Les deux bouteilles n'ont pas été conservées dans la même cave, est-ce la seule explication? Ou alors l'ordre de passage dans la dégustation?

     

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    11ème contour: deuxième sortie de route en plein virage, impardonnable celle-là. Ça sent le TCA à plein nez, impossible d'y tremper les lèvres. Dommage! Syrah 2003, Christophe Abbet.

     

    12ème contour: la délivrance est proche, la perspective de toucher au but motive les troupes, qui retrouvent un deuxième souffle. Le nez est plutôt évolué, mais très joli. Du pruneau un peu cuit, mais une rondeur bienvenue en bouche. Vin plaisir, charnu et agréable, dont il ne faudrait pas se priver. Syrah 2003, Romain Papilloud.

     

    13ème contour: à partir de là, ça déroule. Cette syrah-là ne saurait renier ses origines valaisannes. Beaucoup d'élégance, de la finesse et un petit je-ne-sais-quoi dans la texture qui évoque irrésistiblement le Valais. Un vieillissement harmonieux pour cette très belle Syrah Osami 2003 de Didier Joris.

     

    14ème contour: le final, l'apothéose! Nez complexe et enivrant sur les agrumes, l'écorce d'orange confite et le poivre. En bouche, la texture est fabuleuse. Savoureuse, aussi. Et dotée d'une grande longueur et d'une belle fraîcheur. La trame tannique est parfaitement fondue, d'une grande finesse. Ça sent le Rhône septentrional, largement en aval du Valais. Du négoce haute couture, que cette Côte Rotie 2003 de Tardieu-Laurent. On comprend ceux qui aimeraient s'en inspirer pour leur petit commerce.

     

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    À la sortie du dernier contour, il faut encore et toujours monter. Plus pour longtemps. Juste celui d'un dernier verre de syrah, un bonus ludique, puisqu'il s'agit de retrouver l'un des contours déjà franchi, présenté en magnum et, de ce fait, décliné en deux bouteilles de 75 cl, si mes calculs sont exacts. Il s'agissait de L'âme des Pierres 2005 de Didier Joris, qui présentait ma foi fort bien, derrière le pirate du Rhône français.

     

    La récompense du grimpeur, au sortir des 14 contours, c'est un panorama 4* sur le cirque rocheux, qui mérite bien une petite pause casse-croûte, pour savourer le pain, le jambon et le paysage.

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    La récompense du dégustateur, au sortir des 14 syrahs rhodaniennes, c'est un panorama 4* sur la production valaisanne, qui mérite bien une petite pause casse-croûte, pour savourer le canard, la ratatouille et le vin à table.

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    La cerise sur le gâteau, ce sera ce petit verre d'Ambre 2004, de Christophe Abbet, servi avec une tarte aux pommes maison, qui a pourtant bien failli passer à Travers. Un oubli vite réparé, juste le temps d'un aller/retour à la cuisine familiale.

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    On ne remerciera jamais assez Christophe Landry, Helvète underground, vigneron de Travers et œnologue génétiquement modifié, d'avoir bien voulu nous dessiner les contours de la syrah valaisanne et de sa vision jorissienne sur trois très beaux millésimes.

     

    Et on ne remerciera jamais assez non plus le Creux du Van de nous offrir de si beaux paysages depuis tant d'années...

     

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    Olif

  • Ventoux, parce que tu le Vau(cluse) bien!

     

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    Carpentras, fraises, cerises, truffes et berlingots

     

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    Carpentras [karpɑ̃tra], capitale du Comtat Venaissin, traversée par l'Auzon et la Mède (dont les crues sont particulièrement craintes des Carpentrassiens, puisqu'elles les laissent dans la Mède, justement), possède une particularité phonétique cocasse [kokas]. Contrairement à Gigondas [ʒigɔ̃das] et à l'instar de Cassis [kasi], aucune trace de [s] lors de la prononciation de son nom. Merveilleuse complexité de la langue française qui permet aux érudits de ramener leur fraise à Carpentras [karpɑ̃tra]!

     

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    S'il ne fut pas aisé de photographier un berlingot devant un garage Citroën, même à Carpentras, le temps des cerises du Ventoux a fini par arriver avec plus de 15 jours de retard sur l'horaire initialement prévu. Ce qui a notamment contraint à l'annulation de la traditionnelle fête de la cerise de Venasque. Épreuve reine de ces traditionnelles festivités consacrées au "diamant rouge provençal", le concours de cracher de noyau de cerise peut à défaut se pratiquer à la maison, sur sa terrasse, même en nocturne ou après une dégustation de vins du Ventoux et un repas bien arrosé. Les résultats restent alors généralement confidentiels et controversés, faute d'une bonne luminosité, d'un décamètre opérationnel et d'un arbitrage à la hauteur.


     

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    Puisqu'on parle de diamant, le noir vaut bien le rouge, fût-il estival. Logiquement moins réputée que sa variété hivernale, la truffe d'été n'en offre pas moins de belles sensations gustatives, surtout lorsqu'elle est servie à toutes les sauces, avec tous les plats, de l'entrée au dessert. Ce qui est quand même plus goûteux que des patates et du lard, y compris dans une bombe glacée surprise. Chez Serge, à Carpentras, il y en a au menu. De la bonne trutruffe d'été qui se marie à merveille avec les vins du Ventoux. En blanc, par exemple, un Éclat de Fondrèche 2012, juvénile et gouleyant. En rouge, Moitié vide Moitié pleine 2009 de Solence, domaine qui ne fait habituellement pas les choses à moitié, car en bio depuis sa création.

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    Un Ventoux pour moi tout seul!

     

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    Bien avant que des hordes de camping-cars venus de l'Europe entière ne s'installent temporairement sur ses flancs, comme ce sera le cas encore cette année, au détour de la grande boucle du Tour de France, et ce, dans l'unique but de passer une journée sur leur chaise de camping avant de lever 5 minutes leur cul devant les caméras de télévision pour vociférer ou courir derrière une armée de cyclopédistes professionnels carburant à la potion magique customisée, quand ce n'est pas bêtement à l'eau claire, mais alors là, ils sont loin derrière, le Mont Ventoux est la proie d'amateurs de tout poil, qui n'ont eux aussi qu'une idée en tête: grimper au sommet, de quelque façon que ce soit. Quitte à finir sur les rotules ou ramper dans les derniers lacets.

    Devant la perspective d'une performance sportive mesurable et quantifiable, Mme Olif, qu'il n'aurait pas fallu emmener au sommet en voiture sans lui laisser la possibilité d'y aller aussi en vélo, a préféré ascensionner le Géant via Malaucène, plutôt que de faire une petite balade en VTT sur ses flancs en ma compagnie. Peu importe, je suis un adepte de l'effort solitaire. Quand tu te retrouves tout seul avec ton petit vélo face à la montagne pour la première fois, tu te sens quand même un peu tout nu. Et là, tout d'un coup, comme par magie, tu n'es plus seul, lorsque tu longes les murs du camp naturiste de Bélézy. Sur le GR91 au départ de Bédoin, pas un seul bédouin, par contre. Ni à pied, ni en deux-roues.

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    Une fois déposés les Clops, ça commence à fumer sévère, avant de toussoter, puis cracher ses poumons en longeant la Combe de Mars, même quand on n'a pas touché au tabac depuis des années. C'est à ce moment précis que tu regrettes de ne pas avoir rempli ta gourde avec un peu de vin blanc du Barroux, qui ne figure pas sur la liste officielle des produits dopants. La longue montée sur chemin caillouteux se négocie difficilement, mais avec dignité. Arrivé à Mazanet, cote 869m, le plus dur reste à faire. Encore 1000 mètres de dénivelé positif jusqu'au sommet. Pas les plus faciles. Mais comment j'ai fait pour grimper jusque-là, moi, déjà, rien qu'en suçotant des berlingots et à la force de mes mollets? Courage, fuyons! Marche arrière toute, pour une descente chaotique. L'ascension ultime sera inscrite pour moi au prochain ordre du jour, finalement.

     

    AOP Ventoux: action en hausse?

    Plus grande appellation rhodanienne par sa surface, l'AOP Ventoux vit pourtant à l'écart et à l'ombre des côtes du géant du Rhône, là où l'ombre du Géant de Provence devrait plutôt la mettre en lumière. Fascinante montagne à l'atout marketing indéniable, même si ce n'est évidemment pas ce qui prime pour l'amateur de vins. À côté des coopératives qui trustaient la majorité de ce vignoble de plus de 6500 hectares, il y a une vingtaine d'années, ce sont désormais plus de 130 vignerons en cave particulière qui haussent le niveau qualitatif en même temps que celui du cours du raisin. Une dynamique bio s'est installée, s'exprimant notamment au sein d'une association: les BioVentoux. Et puis quelques francs tireurs, parfois venus d'ailleurs, contribuent au rayonnement de l'appellation. Comme Philippe Gimel au Barroux, par exemple. Ou encore Olivier B. à Méthamis.

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    Le Barroux, petit village médiéval situé entre Carpentras et Malaucène, entre Ventoux et Dentelles de Montmirail. C'est là que Philippe Gimel s'est posé en 2003, diplôme d'œnologie en poche, après avoir appris auprès de quelques domaines parmi les plus réputés de Rhône-Sud. Saint-Jean du Barroux est un vignoble d'un seul tenant, en terrasses, exposé nord-ouest. De la vigne, évidemment, mais aussi des genêts et des haies, pour respecter au mieux la biodiversité et l'écosystème. Et un mirabellier également, apparu spontanément dans un coin, comme pour rappeler les origines lorraines du vigneron-œnologue. Du Ventoux en dentelles, pour résumer. La particularité du Barroux, c'est la proximité de la faille de Nîmes, qui a bouleversé la géologie du lieu et favorisé l'émergence des argiles rouges du Trias, généralement enfouies à plusieurs kilomètres sous la terre des vignes de la plaine. Une mosaïque de terroirs géologiquement distincts qui, combinée aux effets de l'altitude (entre 300 et 500 mètres) et de l'exposition, donne naissance à des vins de grande expression possédant beaucoup de fraîcheur innée, qu'il faut néanmoins savoir préserver.

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    Le choix de Philippe Gimel s'est porté sur une sélection de raisins pour élaborer ses cuvées, positionnées dans un registre crescendo de concentration. Vendanges par tries successives, donc, qui donnent des vins d'un style plutôt riche et opulent, mais dans un souci permanent de recherche de la fraîcheur maximale, pour ne pas perdre le caractère salivant et buvable du vin. On se plaît à imaginer ce que pourrait donner une sélection parcellaire, apte à faire ressortir les caractéristiques de chaque terroir, mais ceci n'est pas d'actualité, afin de ne pas rendre trop complexe une gamme déjà largement plébiscitée par les amateurs, notamment étrangers, les premiers à avoir succombé aux charmes des vins de Saint-Jean du Barroux: La Source, L'Argile et La Pierre Noire pour les rouges, La Montagne pour le blanc.

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    Pour cause de tout petit volume, la Montagne 2012 (clairette et bourboulenc) a été élevée pour moitié en cuve et en fûts de plusieurs vins pour l'autre moitié. Fallait-il assembler ou pas? Cruel dilemme! Le vin de cuve, au fruité très frais, a finalement été mis en bouteilles sur son fruit. La version fût est un peu plus complexe au nez, avec des notes de malt et d'anis. Sans doute attendra-t-elle encore un peu son tour dans la barrique. 2011 est déjà en place, un beau vin qu'il faudrait savoir attendre, si l'on en juge par l'éclat du 2007, magnifique de complexité, d'arômes et de texture. Grenache blanc, clairette et bourboulenc au sommet du Ventoux! En rouge, les trois cuvées, goûtées alternativement en bouteille ou prélevées sur fût, possèdent chacune leur style, désormais bien défini. Les 2012 s'annoncent plutôt très bien, si ce n'est que les volumes seront malheureusement plutôt limités. Côté vin en bouteille actuellement commercialisé, mention particulière à la Pierre Noire 2009, au jus alliant merveilleusement richesse et fraîcheur.

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    Et enfin, ce Micro-climat 2011, des raisins de grenache, syrah et carignan ramassés à une maturité exceptionnelle qui donnent un vin naturellement riche, lui aussi, exceptionnel. Et ultra-confidentiel, évidemment.

     

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    Chez Olivier B., dans le petit hangar de Méthamis, acheté, agencé, rénové, isolé, la Troisième en fait des caisses. Cette syrah des Nayes en est à sa troisième édition avec le millésime 2010, comme son nom l'indique. La Quatrième et la Cinquième ne sortiront des limbes que si leur état le permet, ce qui semble en bonne voie, vu le jus qui se trouve actuellement dans les fûts. Pendant ce temps, les Amidyves continuent d'élargir leur cercle. Et ils restent fidèles en amitié, même de nombreuses années après, comme peut en témoigner ce 2002, période Cascavel, dans un registre délicatement évolué, parfaitement à point.

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    Ayant digéré le buzz qui lui a permis de continuer l'aventure, Olivier B., le vigneron AJT, est reparti à fond, avec dans le viseur une deuxième année consécutive "zéro traitement" à la vigne. Il va pourtant lui falloir trouver un remède à une situation sentimentale compliquée administrativement parlant, de quoi s'en casser les côtes. Comme Olivier en a sous le chapeau, gageons que cette belle histoire d'amour connaitra rapidement un dénouement heureux.

     

    Monieux: une escapade romanesque

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    Faire un saut dans la Nesque fut le grand challenge pédestre de cette expédition vauclusienne, histoire de ne pas l'avoir en travers de la gorge au cas où on ne l'ait pas fait. Vingt-cinq kilomètres sans une seule âme, ou presque, entre Villes-sur-Auzon et Monieux, voilà qui n'est pas banal. Tout au plus quelque cycliste ayant bravé la pluie et le temps maussade de ce mercredi matin. Sans oublier un ou deux camping-cars belges, une fois. Un panorama à couper le souffle pendant tout le trajet, digne de celui des gorges du Verdon, culminant en face du rocher du Cire, balayé en son temps par le Mistral, Frédéric de son prénom. Parking à Monieux, joli village médiéval dont la boulangerie-épicerie est fermée le mercredi, point crucial qui mérite d'être souligné. Pas de chance! Direction le lac du Bourguet, légèrement plus petit que son quasi-homonyme savoyard, et descente le long de la Nesque, en rive gauche. Enfin, descente, façon de parler, puisque le sentier grimpe allègrement dans la forêt jusqu'au sommet des falaises bordant l'entrée des gorges. Le clou du parcours, ce sera la descente par le GR9, à flanc de falaise, jusqu'à la rivière, qu'il faudra traverser à gué. La pittoresque chapelle Saint-Michel, dont on se demande bien ce qui a pu pousser les habitants du XIIème siècle à venir l'ériger là, juste sous la falaise, s'offre alors à nos yeux ébahis et nos pieds trempés.

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    N'exclure aucune hypothèse, évidemment, mais n'escomptez pas faire la visite de cet édifice religieux sans un exquis mérite. Aucune excuse! Un parcours alternatif existe pourtant bel et bien, une esquive impraticable ce jour-là: suivre le cours de la rivière, généralement à sec désormais, sauf en 2013, bien entendu. La remontée s'effectue en rive droite de la Nesque, pour ceux qui ont tourné dans le sens des aiguilles d'une montre. Une remontée, que dis-je? Une escalade, presque. En surplomb de la falaise, avec moult passages rocheux en guise de bon escalier. Une escapade à déconseiller aux personnes à mobilité réduite, aux chamois paralytiques et à James Stewart dans Vertigo.

     

     

    Arrivée théâtrale en Avignon


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    Pendant que la cour d'honneur du Palais des Papes se prépare à résonner au son des tirades du gratin du théâtre contemporain, les rues d'Avignon sont un spectacle permanent: celui des colleurs d'affiches de spectacles de poche plutôt off. Ça grouille, ça pose l'escabot, ça grimpe, ça s'engueule, ça arrache les affiches des autres, quand elles viennent empiéter sur celles des uns, ça vit au diapason du grand théâtre de la vie. Le temps d'une promenade papale et d'une bière sur le parvis du palais, direction Verquières, pour nourrir le ventre autant que l'esprit. Et, surtout, en croquer méchamment! Du chou, mais pas que.

    Le Croque-Chou, à Verquières, presque une institution. Une affaire de famille, en tout cas, avec Sébastien Folz au piano, Monique et Daniel Folz en salle.

     

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    Des produits frais de premier choix, une cuisson impeccable, des plats justes et précis, une carte des vins pléthorique et judicieuse, faisant la part belle aux beaux et bons vignerons, un cadre agréable avec terrasse donnant sur l'église du village. L'assurance d'être absous du péché de bonne chère, c'est certain.

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    La trilogie d'œufs à la coque revisités, c'est un grand classique de la maison. Les accompagnements varient, suivant la saison. Dommage que celle de la truffe soit derrière nous, même si écrevisses et asperges ont bien joué leur rôle. Un délice de saveurs et de textures!


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    La côte de taureau, elle vient de Camargue, maturée à souhait et cuite à la perfection, le Petit Taureau, il vient du Roussillon, maturé à souhait et élevé à la perfection également. L'accord camargo-catalan est quasi fusionnel, olé! De quoi cloturer en beauté ce séjour au pied du Ventoux, qui devrait en appeler d'autres, j'en ai bien peur!

     

    Olif

     

    P.S.: le Tour de France au Ventoux, c'est aujourd'hui. Comme un petit relent de vacances...

     

    P.S.2: les vacances, ce n'est pas encore fini, enfin pas pour tout le monde. Mais il y a un peu de devoirs de vacances à faire, quand même, grâce à André Deyrieux, œnotouriste toute l'année, quel beau métier!